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Les non-dits
67e partie
Publié dans Liberté le 11 - 11 - 2020

Résumé : Nedjma est rentrée. Elle parle de Rédha et du djinn qui détruit sa vie. Fadhéla n'a rien remarqué. Rédha a toujours été égal à lui-même. Mais Nedjma réussit à la convaincre. Elle partira avec Rédha pour qu'il soit soigné au pays. Sa valise est bouclée bien avant que Rédha ne rentre du bureau. Ils ne tardent pas à se rendre à l'aéroport...
Hacène est là, à les attendre dans le hall de l'aéroport. Il ignore pourquoi sa belle-mère est revenue le lendemain même, triste et les yeux larmoyants, et pourquoi Rédha a le regard fuyant. Samra ne lui a rien dit de ce qui arrivait à son frère. Mais il ne peut s'empêcher de les interroger.
- As-tu fait des gaffes, là-bas ? Fuirais-tu la police ? La justice ?
Nedjma le rassure tout en passant une main sur ses yeux.
- Rédha est malade. Il a besoin de voir un raqy. Un démon lui gâche la vie.
- Comment ? Ce n'est pas possible !
- Si, mon garçon risque de se perdre s'il n'est pas soigné à temps.
- Yemma, on va en reparler à tête reposée.
Rédha a gardé la tête baissée. Une fois arrivés à la maison, Rédha s'enferme dans sa chambre. Samra empêche sa mère de le suivre.
- Laisse-le, il a besoin de se retrouver seul.
- C'est le démon qui le pousse à s'isoler, dit Nedjma. Va savoir quelle idée il va lui souffler à l'oreille. Si on ne le soigne pas, il sera perdu.
- Yemma, intervient Hacène, je pense qu'il devrait voir un psychiatre. Il lui prescrira un traitement et tout rentrera dans l'ordre. J'ai beau être musulman et pratiquant, l'idée qu'il aille voir un raqy ou autre charlatan ne m'enchante pas.
- Je ne me tournerai vers la science qu'après avoir consulté les religieux. Ils sont nombreux à être guéris de la sorcellerie et du mauvais œil. Ces cheikhs ont le pouvoir de le débarrasser de ce djinn qui le détourne de la religion et de sa famille. Je n'abandonnerai pas mon fils.
Samra lance un regard à son mari pour qu'il n'insiste pas. Elle connaît sa mère. Elle ne changera pas d'avis.
- Je ne sais pas pour vous, mais moi, je suis épuisé. La journée a été longue. Je rentre à la maison. Samra, tu viens ?
- Je voudrais rester avec eux ce soir, dit-elle en prenant le bras de sa mère. Je ne pourrais pas fermer l'œil, loin d'eux.
- Yemma, la nuit porte conseil, dit-il avant de leur souhaiter bonne nuit. Samra le raccompagne jusqu'à la porte.
- On s'appelle demain. Rentre bien.
- Tente de la raisonner, lui conseille-t-il. Ton frère risque gros s'il tombe entre leurs mains. Démon ou pas, parle-lui. S'il le faut, toute la nuit. Ton frère a peut-être des troubles de la personnalité. Peut-être même qu'est bipolaire. Ma chérie, les séances d'exorcisme risquent d'aggraver son cas. Je parle en connaissance de cause.
Samra le lui promet. Hacène part. Elle reste un moment adossée à la porte, gagnée par l'inquiétude. Dès qu'elle retourne au salon, sa mère lui fait signe. Elles vont à sa chambre. Nedjma ouvre sa valise et cherche les photos qu'elle avait cachées la veille et les lui montre. Le cœur serré, Samra s'attarde sur chacune d'elles. Elle pleure et se demande pourquoi son frère est différent des autres.
- Tu as toujours eu des doutes sur son orientation sexuelle. Son mariage t'avait rassurée. Yemma, il est homosexue, il faut l'accepter.
Laisse-le vivre sa vie. Allah l'a créé ainsi.
Mais Nedjma refuse.
- C'est un djinn qui le pousse vers des relations contre nature. Mon garçon était normal. Tu comprends ? Je suis sa mère, c'est moi qui l'ai élevé. J'ai tout fait pour qu'il soit un homme, un Vrai. Tout le monde était jaloux de lui. Il est beau, instruit. Mais voilà que ce djinn veut le détruire. Et je ne le laisserai pas faire. J'irai avec lui chez les meilleurs cheikhs qui prendront soin de mon fils. Rédha redeviendra comme avant. Tu entends ?
Samra hoche la tête. Si elle a accepté qu'il soit homosexuel, sa mère le nie et préfère croire qu'un esprit maléfique l'habite.
(À SUIVRE)
T. M.
[email protected]
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