Le 1er mai est un jour de fête dans le monde du travail qui commémore la bataille des ouvriers pour obtenir la journée de travail de 8 heures, au lieu de 10 heures ou plus. En Algérie, cette fête fut le témoin de combats menés par les nationalistes. Le 20 juin 1889, le Congrès de la IIe Internationale socialiste, réuni à Paris pour le centenaire de la Révolution française, décide de faire du 1er mai un jour de lutte à travers le monde. L'année suivante, cette journée est pour la première fois célébrée en France, et dans plusieurs pays. Mais ils auront tout de même attendu 1919, soit 30 ans plus tard, avant que leur revendication soit entendue. Le Sénat français ratifie alors la journée de huit heures et fait du 1er mai de cette année-là une journée chômée. En Algérie, il y a 70 ans, une semaine avant le massacre de milliers d'Algériens désarmés, dans l'Est algérien, la France coloniale s'illustrait violemment contre de manifestants algériens célébrant, emblème national en tête, la fête des Travailleurs. A Alger et Oran, des militants du Parti du peuple Algérien (PPA), des Amis du Manifeste, des syndicalistes et de jeunes scouts avaient prévu de défiler pour réclamer la libération de Messali Hadj, déporté la veille (30 avril 1945) à Brazzaville, et celle de militants emprisonnés. Dans ces villes, les Algériens sont sortis massivement pour clamer leur droit d'exister, d'obtenir leur indépendance, et pour que la France suive l'exemple de la Grande-Bretagne qui, après la Seconde Guerre mondiale, a accepté de se retirer de ses colonies. Annie Rey Goldzeiguer, dans son ouvrage intitulé «Aux origines de la guerre d'Algérie», rapporte que l'événement avait été minutieusement préparé par les militants algériens avec à leur tête l'homme politique Ferhat Abbas. Face aux protestataires, écrit-elle, les autorités coloniales mobilisèrent un impressionnant dispositif, autant à Alger, Oran, Sétif que Guelma. L'objectif était de contrecarrer la marche des manifestants en réprimant par le sang, s'il le fallait, le mouvement. A Alger, la police coloniale a stoppé sauvagement la manifestation qui défilait dans le centre de la ville et en banlieue. Annie Rey Goldzeiguer signale que les Européens résidant aux abords de la rue d'Isly, l'actuelle rue Larbi-Ben-M'hidi, tirèrent sur les manifestants, tuant plusieurs d'entre eux. Selon le militant communiste Henri Alleg, on a relevé huit morts et de nombreux blessés dans les villes où eurent lieu les manifestations de protestation. Dans les jours qui ont suivi, les services de police et de renseignements procédèrent à des arrestations massives de militants syndicats et de nationalistes. Quelques jours après, le 8 mai 1945, le régime colonial s'est adonné à une démonstration de cruauté et d'extrême sauvagerie à l'encontre de manifestants algériens réclamant l'indépendance de leur pays, massacrant 45 000 parmi eux, à Sétif, Guelma, Kherrata, Béjaïa, et d'autres agglomérations du Constantinois.