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Mémoires anachroniques de l'Andalousie perdue
Publié dans La Nouvelle République le 29 - 05 - 2019

Choaïb Ibn Hocine El Ençari El Andaloussi, appelé Abou Médiène El Ghouts ou dans le langage populaire du Maghreb Central (l'Algérie) Sidi Boumédiène.
Il est né à Séville en 1126 sous le règne du calife almoravide Ali Ibn Youssef Ibn Tachefin et a étudié à Fès auprès de grands maîtres. Cheikh Abou Yeza l'a initié aux secrets du çoufisme. A la Mecque, il a connu Cheikh Abdelkader El Djilani, le saint de Bagdad, qui fit de lui un grand adepte de la doctrine çoufie et un excellent maître, en lui révélant les joies et les plaisirs de l'extase mystique. Entre temps l'école malékite prenait de l'ampleur au Maghreb et Choaïb a été contraint de revenir, poussé par cet amour de la science et de la culture. Il s'engageait dans l'enseignement dans la ville de Béjaïa, un pôle et un centre de rayonnement de la science qui était, à cette époque, en grand honneur. Les élèves accouraient en foule pour écouter «les doctes et fortifiantes leçons du saint et savant maître, dont on admirait surtout l'éloquence et la parole harmonieuse». Andalou lui-même, Boumédiène trouvait à Béjaïa des compatriotes nombreux, en même temps qu'un milieu intellectuel favorable. Très jeune, sa véritable inclination ne tardait pas à se révéler aux yeux de ses savants professeurs. Déjà, le saint perçait sous l'étudiant, l'amour de l'ascétisme et de la voie contemplative envahissait cette âme qui semblait mal à l'aise dans un corps humain et dont toutes les tendances étaient le détachement des choses de la terre et le besoin de s'en retourner vers le monde immatériel, sa patrie spirituelle. Ainsi, et compte tenu de toutes ces qualités, Mohieddine Ibn ‘Arabi, l'appelait «notre Cheikh et Imam… le maître des maîtres» et se référait souvent à lui. Sidi Boumédiène voyageait longtemps de ville en ville pour apporter la juste parole et répandre chez les jeunes les bonnes manières et la science utile. Il est retourné à Séville et à Cordoue – pris de nostalgie du pays natal – où il a séjourné quelques années. Il a profité pour enseigner la théologie, la rhétorique et la jurisprudence islamique. Il a connu également Salah Eddine El Ayoubi, avec lequel il a eu le grand privilège de combattre les croisés, à ses côtés, en 1187 au cours de cette fameuse bataille de «Hattine» où il a perdu son bras. Il a laissé, en legs pieux tous les biens qu'il a acquis en Palestine, aux Maghrébins qui venaient pour les études. Ainsi se terminait sa vie et lors d'un voyage vers Marrakech où l'appelait le calife almohade, il est tombé malade en cours de route, dans cette plaine qui domine Tlemcen. Là, il a indiqué à ses compagnons le Ribbat d'El Eubbad, puis il s'est écrié, comme inspiré: «combien ce lieu est propice pour y dormir en paix de l'éternel sommeil ! ». Ainsi, le même soir de l'année 1197, il rendait l'âme pour être enterré le lendemain dans cet espace paradisiaque qu'il a tant aimé. Dans le même sillage que Sidi Boumediene, il y a eu Mohieddine Ibn ‘Arabi ou Mohieddine Abou Bakr Mohamed Ibn Alî Ibn ‘Arabî El-Hâtimî, plus connu sous son seul nom de Ibn 'Arabi. Il est né le 27 Ramadan 560 de l'Hégire, le 7 Août 1165, à Murcie. Appelé aussi «Cheikh el-Akbar», (le plus grand maître). Il était un grand mystique, sur la voie de son maître spirituel Boumédiène Choaïb. Il a écrit beaucoup et a laissé des ouvrages de grande valeur. Son œuvre aurait influencé Dante, un siècle plus tard, et Jean de la Croix, bien après, au XVI siècle. Dans ses poèmes il traite de l'amour, de la passion, de la beauté et de l'absence. Ibn ‘Arabi représentait le sommet du soufisme et son œuvre, remarquable et singulière, une «œuvre théologique, mystique et métaphysique la plus considérable qu'aucun homme n'ait jamais réalisé», a marqué une date dans l'histoire de ce courant. En effet, elle est immense, car composée de 846 ouvrages convenablement répertoriés. Elle traite de toutes les sciences religieuses islamiques : celles de la Charia ou «Loi exotérique» (Coran, Sunna ou Tradition du prophète Mohamed, droit), celles de la Haqiqa ou «Vérité métaphysique et ésotérique», et celle de la Tarîqa, c'est-à-dire la voie spirituelle et initiatique menant à la «réalisation de la Vérité». Les historiens le considèrent comme «un des plus grands théosophes visionnaires de tous les temps ». L'œuvre est d'un abord difficile, car, malgré son étendue immense, elle est souvent rédigée dans un style elliptique et très concis qui appelle le commentaire». Avant Ibn ‘Arabi, le soufisme était une mystique imprégnée de la morale comme celle d'Abou Hamed El-Ghazali, c'est-à-dire une mystique pratique et non pas intellectualiste. Le maître du soufisme Mohieddine Ibn ‘Arabi est mort en 1240 à Damas, non sans laisser beaucoup d'adeptes, même parmi les femmes. A ce propos, l'Andalousie a de quoi être fière. En son temps Ibn 'Arabi rendait hommage, aux grandes femmes ascètes de Séville et de Cordoue qu'il avait rencontrées. Parmi elles, Fatima bint al-Muthanna (XIIIe siècle), la Cordouane. Selon les propos du Maître andalou, elle était «la miséricorde des habitants de cette terre». Et, en dépit de son dénuement, elle était constamment d'une bonne humeur, chantant gaiement la Grâce divine. Ibn 'Arabi a rencontré également Shams, «la mère des pauvres», une femme très âgée. Il la décrivait comme une mystique de haut rang, douée d'une intuition peu commune mais qui, le plus souvent, tenait secret son niveau spirituel élevé. Dans le dîwân d'Ibn Arabî, sur vingt-cinq poèmes consacrés à la «khirqa» qui est un vêtement par l'attribution duquel certains maîtres symbolisaient l'investiture spirituelle qu'ils donnaient à un(e) disciple, quinze évoquent des investitures accordées par le Maître à des femmes. A propos de Fatima bint al-Muthanna, il déclarait : «J'avais le désir que me soit donné une fille. Par elle, Mon Seigneur m'a comblé». D'une autre femme, Safiyya, il dit ceci : J'ai revêtu Safiyya de la khirqa des pauvres. Car elle s'est ornée de la parure des ùmana* Elle a réalisé toute vertu, s'est départie De ce qui est contraire et a surpassé ses pareilles. Elle a parfait et sanctifié ses qualités Et a assumé tous les Noms divins. (*Les ùmana sont ceux qui sont dignes de confiance et représentent dans l'hagiologie akbarienne un degré supérieur) 18- Le royaume de Grenade sous les Nasrides Nous étions à l'époque des troisièmes Taïfas, et l'Espagne musulmane, qui avait perdu de grands territoires au profit des chrétiens, arrivera à subsister encore un quart de millénaire grâce à la fondation à Grenade d'une nouvelle dynastie par Mohamed Ier Ibn Nasr El-Ahmar (El Rojo), surnommé El Ghalib (le vainqueur). Je l'ai dit, répéta Mohamed Chérif Izemis Abou Skander qui poursuit le récit de ces événements. En 1228, Ibn Houd, un descendant de la dynastie houdide de Saragosse, se proclamait indépendant, à l'image de ceux qui l'ont précédés, et Murcie devenait capitale de l'Andalousie, non sans mettre sous sa dépendance la majeure partie du territoire, excepté la région de Valence. Mohammed Ibn Nasr se déclarait être son vassal. Mais quatre ans plus tard, en avril 1232, il s'insurgeait contre Ibn Houd sous la protection de son oncle Yahya Ibn Nasr, et se proclamait émir de la Taïfa d'Arjona. Ensuite il devait conquérir Jaen et affronter Ibn Houd pour prendre Cordoue et Séville. Par ailleurs, le mécontentement de la population contre Ibn Houd à cause de lourdes sommes d'impôts qu'il payait au roi de Castille, a abouti à son assassinat à Almería. C'était une occasion des plus propices pour Mohamed Ibn Nasr de s'emparer d'Almeria, de Malaga, des Alpujarras et d'assiéger les villes de Guadix et de Baza en 1238. Après cela, il a conquis Grenade dans la même année et a fondé le royaume, dernier Etat musulman d'Espagne qui allait englober toute la côte méditerranéenne de l'Andalousie, en s'étendant au nord jusqu'à Jaén. C'était le mois de juin 1238 que Mohamed Ibn Nasr entre dans Grenade par sa grande porte, «Puerta de Elvira» (la porte d'Elvire) pour occuper l'ancien palais. Et c'est là qu'il prononça sa fameuse phrase en glorifiant Dieu : - «Wa lâ Ghâlib illâ Allâh !». Cette phrase va devenir la devise de la dynastie et sera constamment dans la décoration de tous les palais construits, au cours des siècles suivants. Ensuite il s'est proclamé roi «Mohamed Ier de Grenade» et a fondé la dynastie nasride dans cette ville qui a été construite par nos ancêtres les berbères, entre 1019 et 1073. En effet, ce fut le roi Habous et ensuite son fils, le roi Badis, qui ont pris l'initiative de construire la ville de Grenade. Yacoute ne racontait-il pas, dans son chef-d'œuvre «Mo'djem El Bouldène» (Le Dictionnaire des pays ou des capitales) que Grenade, à sa fondation, portait un nom berbère «Agharnata» ? Cette thèse est très plausible puisque «elle a été construite et fortifiée par Habous Es-Sanhadji, puis achevée par son fils Badis», confirmait Ibn Hadia El Korachi, homme de lettres et Premier ministre auprès des rois zianides de Tlemcen. Mohamed Chérif Izemis Abou Skander qui raconte Grenade, nous explique quelles ont été les motivations qui ont poussé les souverains musulmans à en faire une ville aussi importante que Cordoue ou Séville, en leur période de gloire. Pour cela, il nous rapporte un dialogue avec son père : - Dis-moi père, pourquoi Grenade devint si importante en ce début du XIIIe siècle ? - Il n'y a aucun secret mon fils. Remontons l'Histoire. Voyons d'abord comment elle a été créée, ensuite nous saurons le reste. Grenade de son vrai nom, ou de son nom ancien s'appelait «lbyr». Des gens dont on ne connait l'origine bâtirent des masures sur les hauteurs de la rive du fleuve. Bien après, les Romains qui conquirent la Péninsule, s'installèrent dans le site même et se fortifièrent, non sans latiniser son nom qui devint «Iliberis». Les Berbères qui conquirent l'Espagne, pour l'expansion de l'Islam, lui donnèrent le nom d'«Elvira» et, plus tard, quand les deux citadelles des deux rives du fleuve – la deuxième étant celle de l'autre rive appartenant aux juifs – se fondirent finalement en une seule, elle s'appela «Agharnata» ou Garnata ou Granata. Ainsi, mon fils, continua le père, pendant les cinq siècles
qui ont suivi, notre ville ne faisait que s'agrandir et prendre de l'importance. Pendant ce temps, les chrétiens qui n'ont jamais supporté leur défaite depuis les Wisigoths, et qui s'étaient réfugiés dans le nord, poursuivaient leur chasse aux musulmans dont les souverains, vivant leurs discordes, ne se souciaient guère ou peu, de l'avancée de ces derniers en leurs territoires. Les plus belles cités musulmanes, Cordoue, Séville et tant d'autres tombaient au fur et à mesure et leurs habitants, surtout les plus riches, allaient trouver refuge à Grenade. Ainsi, raconteront plus tard les historiens, «le désastre fit de Grenade la ville la plus riche et la plus importante d'El-Andalus. L'apport de gens et de richesse bouleversa la ville et il fallut construire un nouveau château, plus grand et plus puissant, choisissant comme site la large falaise de l'autre côté du fleuve. Les premières tours furent élevées à l'extrémité sud du plateau, à l'emplacement de la forteresse des juifs, qui fut reconstruite et entourée de l'enceinte de la nouvelle alcazaba. Plus tard, on commença à construire sur la même hauteur une suite de magnifiques palais, avec des salles et des jardins d'une élégance sans pareille, où les sultans et leurs femmes pouvaient jouir de leur paradis sur terre, avant qu'il ne disparaisse». (Extrait du livre : «Grenade, ville de mes rêves» de Lorenzo Bohme) Cependant, mon fils, à la fin du XVe siècle les royaumes chrétiens, finalement unis sous le règne d'Isabelle et de Ferdinand, partirent en croisade pour imposer leur foi et leur loi dans l'extrême sud de la péninsule. La suite ? Eh bien…, tu la sauras… après !!! Tu la sauras quand nos souverains «bien aimés» accentueront leurs dissidences et laisseront le pays aux mains des «croisés» qui s'allieront au nom de la chrétienté pour combattre les musulmans et les chasser de ces terres qu'ils ont si bellement cultivées et édifiées. Mais maintenant, voyons d'autres aspects chez nos ancêtres, des aspects si concrets sur le plan du développement culturel et scientifique que nous gardons au moins ce privilège de postuler, devant l'Histoire, notre part de considération. Ces aspects nous honorent mon fils et, pour cela, il faut les raconter aux générations de demain pour qu'elles sachent que notre présence en Andalousie, au risque de nous répéter, n'a pas été uniquement une suite de conflits et de querelles, mais une présence également déterminante et utile sur le plan du développement et du progrès. Effectivement, le fondateur de la dynastie des Nasrides, Mohamed Ier, entreprend la même année de sa conquête de Grenade, en 1238, la construction de l'Alhambra. Avec ce palais monumental, la ville devient un grand foyer de culture, et une véritable éclosion artistique voit le jour dans ce royaume qui s'impose comme dernier refuge de l'Islam ibérique depuis la victoire chrétienne de Las Navas de Tolosa en 1212, étape déterminante de la Reconquête. Construite sur une hauteur boisée, sur un éperon rocheux de la Sierra-Nevada, l'Alhambra domine la ville. En face, le quartier traditionnel de «l'Albaicin», avec sa «Médersa», ses mosquées, ses bains maures, ses patios ombragés et ses jardins parfumés, lui donne plus de charme tout en constituant avec ce palais un ensemble cohérent qui chante la culture et l'art mauresques. L'Alhambra s'étend sur une bonne surface et des monuments, furent intégrés au tissu urbain par la suite, en respectant l'harmonie originelle. Le nom féminin «Alhambra» est un mot arabe qui signifie Al Hamra «la rouge», en raison de la couleur que prennent les murs du monument au coucher du soleil. Dans l'Alhambra, il y a «l'Alcazaba», qui est une forteresse remontant au XIe siècle. C'est la partie la plus ancienne qui a été fondée sous la dynastie des rois Zirides. Construite à la pointe occidentale de la colline de l'Alhambra (Sabîka), elle est de forme triangulaire et domine la ville de Grenade. A l'intérieur de ses remparts, il y a un quartier réservé aux militaires avec leurs appartements, leur bain, leur cuisine collective, leurs dépôts et leurs écuries. La dynastie des Nasrides (1232-1492) a fait, de par la construction de nombreux palais dans l'enceinte même de l'Alhambra, la réputation mondiale de ce monument de la civilisation arabo-musulmane. Ces palais somptueusement édifiés ont inspiré de nombreux poètes, arabes d'abord, ensuite les nouveaux maîtres de l'Andalousie, après la prise de Grenade en 1492, qui en ont fait leurs résidences privées, parce que charmés par la beauté de ces lieux. Et comment ne pas être charmés, voire envoutés, par la beauté des formes et le foisonnement des détails dans la décoration ? Voyons par exemple la cour des myrtes ou cour de l'Alberca, «El Birka», un nom arabe qui signifie le bassin. Cette cour précède la tour des «Comares», la plus grande tour de l'Alhambra, qui servait de salle de trône du temps de Youssef Ier et également de réception d'ambassadeurs, d'où son nom. Cette salle richement décorée, possède un magnifique plafond de bois superbement travaillé. La tour volumineuse qui apparait très imposante et même agressive depuis le pied des remparts est en fait un palais et cela représente parfaitement le paradoxe de l'Alhambra qui, de l'extérieur apparaît comme une forteresse austère, alors qu'en fait elle est une cité élégante. Quant à l'Alberca, c'est un grand bassin rectangulaire, qui occupe une surface importante dans la cour, autour de laquelle se répartissent les appartements, la pièce d'eau centrale, la présence d'un jardin paysagé. C'est le style nasride où «la sobriété, l'enchaînement de formes simples et extrême richesse des détails décoratifs confèrent toujours à ces lieux un charme incomparable». Rien d'étonnant diront, plus tard les historiens et les spécialistes des créations de cette facture, que «la grande qualité de la réalisation, aussi bien au niveau architecturale (pureté des formes, perfection des voûtes et des systèmes de piliers) qu'au niveau décoratif (sculpture, composition géométrique) illustre la maîtrise des techniques de construction des artisans musulmans». Dans l'Alhambra, il y a cette fameuse «Cour des lions» qui tient son nom de sa fontaine centrale (une large vasque portée par douze lions stylisés) qui constitue le joyau de tous les palais et représente l'apogée de l'art architectural musulman en Andalousie. Les dépendances et appartements du palais sont répartis autour de ce large patio bordé d'une multitude de colonnes dont la répartition bien étudiée, et l'agencement des portiques, de manière ordonnée, relèvent cet espace ombragé qui entoure la cour et les dissimule. Dans la colline de l'Albaicin – en arabe «El Bèyèzine» (les fauconniers), du nom persan «el-bèz» (faucon) – se trouve une ancienne citadelle «l'Alcazaba Cadima», qui ne peut être confondue avec l'Alcazaba de l'Alhambra. C'est en fait l'ancienne ville de Grenade, du temps des Ibères et des Romains qui l'ont choisie comme forteresse, et, après quelques siècles d'abandon, les Nasrides, l'ont occupée au XIème siècle, pour en faire le centre de leur royaume. Ensuite sont venus les Almoravides et les Almohades. Ils l'ont pris en charge et l'ont conservée convenablement. De cela, résulte que le quartier résidentiel de l'Albaicin conserve «un riche ensemble d'architecture vernaculaire maure dans laquelle l'architecture andalouse traditionnelle se fond harmonieusement.» En fait, l'Albaicin est un quartier qui respire l'Histoire, puisque de nombreux peuples vont vivre dans ses quartiers, arpentant tous les jours ses rues étroites et sinueuses, sentant le parfum de plantes qui ornent les maisons et vivant de ce plaisir que leur confère ce caractère de métissage culturel intéressant. Dans une ruelle, «le Callejon de las Monjas», (la ruelle des nonnes), entre le palais et la muraille ziride, on distingue cet aqueduc qui, autrefois, ramenait l'eau depuis la sierra. En plein Albaicin, se dresse également la demeure que l'émir Abou El Hassen fit bâtir pour son épouse Aïcha «El Hourra», après l'avoir expulsée de l'Alhambra pour des raisons que nous verrons plus tard. Les grenadins lui ont donnée le nom de Dar El Hourra, la «maison de la Reine» qui sera investie par une autre reine, Isabelle de Castille, après la conquête de Grenade en 1492. Oui, ce n'est pas par hasard qu'un poète a décrit ce quartier ancien, ce bel ensemble architectural musulman comme «un paradis qui ne s'ouvre qu'aux élus». Pour terminer avec cet aspect culturel, mais surtout civilisationnel, voyons un autre volet qu'affectionnaient les musulmans de l'Andalousie. Il s'agit de la verdure, de ces beaux paysages et de ces fameux jardins qu'ils implantaient çà et là, pour agrémenter leur vie et lui procurer plus de calme et de repos. Il est vrai que dans la civilisation musulmane, le jardin revêt cette dimension forte d'harmonie. Ainsi ceux de l'Alhambra, sont emprunts de cette poésie de la nature célébrée par le Coran, symbole de la paix suprême. «Les jardins luxuriants, agrémentés de fontaines, recouvrent désormais pratiquement toute la moitié sud-est de la cité, et donc une grande partie de l'ancienne médina». Pour les musulmans, la verdure, les jardins, «El Janaïne», le pluriel de «Jannah», sont l'évocation du Paradis promis aux vertueux. «Le paradis de l'éternité, ô gens d'Andalousie, ne se trouve que dans votre patrie et s'il m'était donné de choisir, je n'en voudrais d'autre que le vôtre », Ibn Khafadja de Cordoue (1058-1138) disait dans son poème concernant «El-Andalus».


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