Un manuscrit inédit de Virginia Woolf, retrouvé après plus de 80 ans dans une demeure anglaise, sera publié en octobre par Princeton University Press sous le titre The Life of Violet (La Vie de Violette), le titre d'une des trois nouvelles de ce recueil. Ecrites en 1907 et retravaillées en 1908, ces nouvelles constituent une biographie parodique d'une amie de l'autrice, Mary Violet Dickinson. Longtemps considérées comme des textes privés sans grande importance, elles annoncent pourtant certains thèmes et procédés stylistiques qui marqueront son œuvre. La découverte des nouvelles de Virginia Woolf est le fruit du hasard : en consultant les archives de Longleat House, la chercheuse Urmila Seshagiri est tombée sur un manuscrit dactylographié, corrigé à la main par l'autrice en 1908, raconte The Guardian. Le manuscrit comportait les nouvelles The Life of Violet, The Magic Garden et une troisième, sans titre, qui se déroule au Japon. Conservé plus de 80 ans dans ce grand manoir élisabéthain du Wiltshire en Angleterre, notamment célèbre pour son architecture, son parc et ses riches archives, le document révèle une version revue et corrigée de Friendship's Gallery (le titre original du recueil), texte jusque-là connu uniquement dans sa forme initiale à la New York Public Library. Ces corrections, longtemps ignorées, attestent que Woolf prenait ces écrits de jeunesse bien plus au sérieux qu'on ne l'avait supposé. La raison pour laquelle elle n'a jamais publié ces nouvelles est qu'elle souhaitait que Mary Violet Dickinson, sujet de ces fausses biographies, en soit la seule lectrice, avec une de leurs amies en commun. Le contexte de l'écriture de ces nouvelles a également pu jouer sur son envie de les cacher : l'autrice souffrait de dépression nerveuse à la suite du décès de son père. Ces récits, à la fois satiriques et fantastiques, oscillent entre scènes aristocratiques dans un manoir anglais, aventures mythologiques et épisodes exotiques au Japon. Les personnages, tels qu'une « géante rieuse » ou des déesses voyageant sur le dos d'une baleine, témoignent de l'imagination foisonnante de la jeune écrivaine. Des idées en germe Si Woolf, alors encore Virginia Stephen, avait d'abord jugé ces nouvelles trop imparfaites ou privées pour être diffusées, leurs révisions montrent un réel investissement, notamment dans la recherche de rythme et d'expressivité. Dans Le Jardin magique apparaît ainsi l'idée d'« avoir une maison à soi », qui sera développée vingt ans plus tard dans l'essai fondateur Une chambre à soi. Plus largement, les textes laissent entrevoir une réflexion sur l'égalité et la remise en cause des structures patriarcales, annonçant les débats qui traverseront Orlando et Trois Guinées. La publication de ce manuscrit, enrichie d'une préface et d'une postface d'Urmila Seshagiri, apportera un nouvel éclairage sur une période formatrice de Woolf. La Vie de Violette révèle en effet une autrice en pleine expérimentation, déjà animée par une imagination radicale et une volonté de détourner les conventions à travers des formes narratives audacieuses. Pour le moment, aucune traduction de l'ouvrage en français n'a été annoncée.