Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie auprès de la République du Malawi    Accident au stade du 5 juillet: le PDG de Sonatrach au chevet des supporteurs blessés    Frappes américaines contre l'Iran: le régime international de non-prolifération pourrait s'effondrer    Délivrance des autorisations relatives à l'organisation de la Omra pour la nouvelle saison    Frappes américaines contre l'Iran: "les populations de la région ne peuvent pas subir un nouveau cycle de destruction"    L'ANPP obtient la certification de conformité à la norme internationale "ISO 9001"    Face aux tensions budgétaires et pour plus de justice sociale, pour une politique de subventions ciblées    Rezig appelle les opérateurs économiques à conquérir le marché africain    Téhéran ciblé par des bombardements américains    Un gala pour l'armée sioniste en plein Paris    Triste fin de saison pour le monde sportif algérien    Le président du Conseil de la nation reçoit l'ambassadeur de la République de Corée en Algérie    Lutte contre les incendies de forêts: une manœuvre de simulation à Skikda et à Jijel (DGPC)    Les services de sécurité se mobilisent pour assurer la protection des estivants pour l'été 2025    Réunion de coordination pour la mise en œuvre du Décret portant transfert de l'OREF    Le quotidien El Moudjahid lance sa plateforme multimédia à l'occasion du 60e anniversaire de sa création    "Alger, Capitale de la Culture Hassaniya" 2025: de précieux manuscrits historiques et des livres illustrant l'authenticité et la culture du peuple sahraoui    Attaf s'entretient à Istanbul avec son homologue égyptien    L'ESTA de Dar El-Beida: sortie de la 31e promotion des élèves officiers de carrière    Ouverture de la saison estivale 2025 : le wali d'Alger inaugure plusieurs infrastructures    Athlétisme: coup d'envoi du Championnat National des Epreuves Combinées au SATO du complexe olympique    La fantasia, une épopée équestre célébrant un patrimoine ancestral et glorifiant des étapes héroïques de l'histoire de l'Algérie    Ghrieb et son homologue omanais conviennent de promouvoir le rythme des partenariats industriels    Le président de la République ordonne une enquête    Le chef de l'AIEA convoque une «réunion d'urgence»    Le bilan s'alourdit à 3 morts et 81 blessés    La manifestation "Nuit des musées" suscite un engouement du public à Constantine    Quatrième sacre consécutif pour le HBC El-Biar    « Aucune demande d'autorisation n'a été enregistrée jusqu'à présent »    L'US Biskra officialise sa rétrogradation    Des chiffres satisfaisants et des projets en perspective pour la Sonelgaz    Il y a vingt ans disparaissait l'icône du style « Tindi", Othmane Bali    « Si l'on ne sent plus la douleur des enfants, on n'est plus humain »    Ligue 1 Mobilis: Le MCA sacré, la JSK en Ligue des champions et le NCM relégué    « Abdelmadjid Tebboune n'a pas accordé d'entretien à des journaux français »    Déjouer toutes les machinations et conspirations contre l'Algérie    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Je ne veux ni refaire la guerre, ni partir en France
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 10 - 05 - 2010

« … Pourquoi tant de passé et si peu de présent ? Depuis que je suis né, il en est ainsi : l'histoire de mon pays est un monstre vociférant qui tue les vivants et ravive les morts. A la fin, j'en suis fatigué : je n'aime ni les colonisateurs, ni les décolonisateurs. Les deux ne veulent pas mourir pour que moi je repose, vivant, en paix. La France ? Je n'y jamais mis les pieds que deux fois de ma vie; encore moins, l'Algérie : j'attends d'y arriver enfin avec mes enfants. Enfant, j'ai dessiné, jusqu'à la nausée, des chaînes brisées au-dessus de volcans en colère, je connaissais le Kalachnikov avant la fleur, il suffisait de me désigner du doigt pour m'entendre chanter l'hymne national et tout n'était que torticolis tourné vers le passé à m'en tordre le cou et ce fut fait. J'en suis désarticulé à vie : ma tête ballote et mes jambes sont une indépendance brinquebalant dans des chaussures chinoises. Dieu ! Pourquoi chez nous les morts ne veulent pas mourir ? Pourquoi, même né longtemps après la guerre, j'y participe tous les jours à mon insu et sans que je le veuille. Ce que je veux ? C'est le Présent vigilant. L'ample présence au monde découpé en couple par mes deux poumons. Quelque chose qui me soit contemporain et avec quoi je coïncide de toute ma taille et de mes bras et de la force puissante de mon inspiration. Bien sûr que je dis merci aux martyrs, mais je veux dire, surtout, bienvenue aux nouveau-nés. Et c'est la peur qui m'habite: j'ai peur que la décolonisation dure plus longtemps que la colonisation et que j'en meure avant de profiter d'un moment nu et d'un don paisible qui ne me parlent pas de la guerre. Les martyrs ? Je les ai détestés longtemps : tout le monde se prenait pour eux et dès que j'ai appris à parler, ils parlaient déjà à ma place. Ce n'est que plus tard que je me suis réconcilié avec leurs cimetières et que j'ai appris à converser avec eux directement, sans passer par des factotums. Que de déceptions et de découvertes alors ! La première est que l'histoire nationale est une entreprise individuelle pour chaque Algérien. Chaque Algérien est dans l'obligation de remonter le temps tout seul et de découvrir l'histoire de son pays dans la solitude tant il y a des menteurs et des vendeurs de buissons ardents. Chaque Algérien possède sa propre copie du journal intime de son propre pays. A la fin, j'ai fini par comprendre que l'Histoire a été peut-être belle, mais cela n'a pas changé grand-chose : je déteste encore et toujours le passé tant tout le monde veut me le voler pendant que je dors ou que je respire. Les martyrs sont trop lourds à porter pour mon mince corps. J'en suis fatigué. S'ils sont morts pour m'offrir la vie, pourquoi dois-je la refuser en leurs noms ? De tout temps, j'ai ressenti l'étouffement quand on me parlait de la Révolution. C'était comme si on me reprochait d'être vivant alors que les meilleurs sont morts et comme si je devais dire merci jusqu'à la centième génération et comme si j'étais le traître d'une guerre qui a eu lieu bien avant ma naissance. A la fin, je veux moi aussi fuir : cette terre étouffe sous le poids inversé de ses morts et tous ses nouveau-nés naissent avec l'ardoise injuste d'une dette à payer de toute une vie d'écrasement.
Et c'est à chaque fois, la même histoire : à chaque fois que je me dis enfin un peu de présent volé à trop de passé, je m'y retrouve coincé entre un Français qui ne veut pas partir et un ancien moudjahid qui ne veut pas se la fermer et un enquêteur qui a retrouvé de nouveaux ossements. Que m'importe un nouveau «qui tue qui ?» qui remonte le passé ou les aveux d'un ancien combattant devenu vieux meuble de la Nation ou les jacassements tristes de quelques vignerons déracinés ? Moi, j'ai les pieds bruns, les mains blanches, ma balle est un ballon et ma terre est à refaire et ma langue est pétrie par ma mère et j'ai l'âge de ma respiration pas celui de la révolution. Alors par Dieu, arrêtez ! Je veux juste respirer, voyager et me sentir vivant sans que cela soit une dette à payer. Je ne veux pas refaire la guerre mais seulement des enfants. Je ne veux voir le retour ni de la France, ni des martyrs, ni de la guerre, ni de la même histoire.
Je veux seulement voir revenir les meilleurs moments de chaque vie. Je veux ressentir l'immense amplitude du vivant et rendre la vie plus incandescente par mon intime vigilance. Je ne demande ni des excuses, ni des explications, ni de nouveaux témoignages ».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.