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TLEMCEN - El Hassar Benali : « La culture en question »
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 14 - 03 - 2015

La situation de la culture à Tlemcen, voilà un sujet qui mérite une présentation et une analyse. Nous avons sollicité pour cela le journaliste-écrivain El Hassar Benali pour le faire puisque le sujet a partie du cheminement de sa carrière mais aussi de ses préoccupations professionnelles constantes en tant que spécialiste ayant été lui-même un temps responsable des services des antiquités et des monuments historiques de Tlemcen et par-là aussi, un membre actif de sa société civile.
Nous rappellerons que notre journaliste et auteur a eu aussi une longue carrière professionnelle dans la presse en tant que rédacteur en chef régional de l'APS pendant plus de vingt-cinq années chargé de missions de reportages en Allemagne, au Rwanda, en Roumanie, au Maroc… Il est membre actif de société civile ayant été élu membre du conseil national de l'Union des journalistes algériens. Il fut également membre du conseil national de la Ligue des droits de l'homme (LADDH). En tant qu'écrivain, il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages publiés en Algérie et à l'étranger, notamment en France dont un livre sur l'écrivain algérien Kateb Yacine écrit en collaboration avec sa femme Zoubida Chergui «Parce que c'est une femme « (Paris, 2002) avec la présentation de ses pièces inédites «Saout en niça la voix des femmes», «La Kahina ou Diya», «Louise Michel et la Nouvelle Calédonie«. Ces deux derniers titres parus en France ont été consacrés à l'histoire politique au Maghreb dont les titres sont les suivants: «Les Jeunes-Algériens et la mouvance moderniste au début du XXe siècle: les frères Larbi et Benali Fekar», «Maghreb Lectures» (Paris , 2013) .
Quel bilan faites-vous de la situation de la culture à Tlemcen, ville où vous avez figuré parmi les acteurs de son mouvement associatif ?
Il n'y a pas mieux aujourd'hui que de faire l'état des lieux de la culture dans notre si belle ville. Si le passé de Tlemcen fut florissant jusqu'à nos jours, c'est grâce à la fécondité de ses femmes et hommes qui ont façonné l'image et fait la réputation de cette ville qui a produit de grands hommes ayant pesé par la force de leur esprit et de leur imagination sur la scène de l'histoire, de l'art et de la politique dans tout le Maghreb. Nous citerons par là quelques-uns d'entre eux tant aussi il est impossible d'en dresser une liste, hormis Ibn Mériem qui a pu l'établir au XVIIe siècle et qui est de loin incomplète, sans compter les grands hommes qui ont suivi jusqu'à nos temps modernes avec Messali Hadj, les frères Larbi et Benali Fekar, Abdelkader Mahdad… Le marasme culturel et artistique qui pèse aujourd'hui sur la ville remonte ses racines à l'âge du parti unique et ses conséquences sur la vie politique aujourd'hui. Ce moment a sacrifié tout ce qui soignait l'image forte de cette cité, pendant toute la période de l'occupation coloniale, le cœur palpitant des idées et de l'engagement, à savoir le mouvement associatif du savoir, de la connaissance et du patriotisme. Avec le cercle des Jeunes-Algériens, nadi Radja, nadi islami, nadi ittihad, les Amis du livre, la SLAM, Rachidiya… Tlemcen a vécu un grand moment de la société civile dans ses différentes couches et ses expressions diverses: nationaliste, progressiste, islamiste… Une expérience prédémocratie appliquée à la vie de la cité. Ce fut là un moment historique de patriotisme par l'art et la culture. Ce fut aussi, politiquement, un moment fort d'expression et de création de son passé moderne qui a vu, à force d»engagement et de militantisme, émerger des nationalistes de la trempe de Mohamed Gnanèche, Boumédiène Mohamed Maarouf, Mustapha Berrezoug, Abdelkrim Benosman, Mohamed Mamchaoui, Choaib Tchouar mais aussi de grands artistes tels Abdelhalim Hemch, Bachir Yellés, Choukri Mesli… L'indépendance fut arrachée au prix de martyrs tombés au champ d'honneur, parmi eux d'illustres héros de la Révolution: Dr Benaouda Benzerdjeb, Dr Tidjani Damerdji, Maliha Hamidou, le pharmacien Lakhdar Benseghir, le professeur Sid Ahmed Inal, le colonel Benali Boudghène «Lotfi»… Ce passé fut invalidé au profit d'un modèle qui n'a cessé d'éloigner le citoyen de la vie de la cité. Ces lieux d'identification ouverts au progrès y ont fait florès comme aussi, ils étaient ouverts aux courants de pensée les plus modernes. Certes, les élites ont joué un rôle important dans ce mouvement de renaissance. Or, aujourd'hui, ces élites sont mises à l'écart, c'est ce qui explique le vide culturel que traverse depuis la cité millénaire. La mise à mort de ses anciens relais créés à l'initiative de son élite, voire: les associations «Jeunesse culture et progrès«, «Ahbab ettourath» (les Amis du patrimoine ), «l'Association pour le développement économique et culturel (ADESC), «JASR» (pont)… a mis fin à cette trajectoire culturelle de l'antique cité. On se rappelle toujours du temps où, malgré le peu de moyens, de grands évènements étaient organisés par le mouvement associatif voire les semaines culturelles et touristiques, les grands moments culturels voire les colloques «Tlemcen ville méditerranienne», «L'émir Abdelkader et le khalifa de Tlemcen» , «la rencontre internationale sur Messali Hadj», «l'histoire de Honaïne« , les «26 éditions du Festival national sur la musique classique algérienne«... Les grands noms de la culture et de l'art y étaient invités pour des rencontres ou des conférences voire Kateb Yacine, Mouloud Maamri, Mohamed Khedda, Mahfoud Keddache, sungrund Hunk…
Qu'attend la cité pour renouer avec ce dynamisme d'antan ?
Les infrastructures créées par l'Etat ne sont «rentables« que si la société est «productive» en initiatives et que l'Etat (wilaya, APC, la Culture…) encourage, à défaut aussi d'une représentation politique réelle et efficace. Or les élites, les mécènes… font partie aujourd'hui du monde de la marge. Aussi, il faut souligner que l'Etat, en créant la maison de la culture, choisissait l'exemple français. Ce choix, qui correspond à d'autres besoins, ne privilégie que le volet «diffusion» de l'art et de la culture. L'aspect formation a été de ce fait relégué et cela, en l'absence de conservatoire, d'école des beaux-arts, d'ateliers d'art dramatique et plastique. Le très bel exemple de patriotisme culturel fut l'acte par lequel le grand mécène et avocat maître Boukli Hacène Omar (m. en 1972), fondateur du Croissant-Rouge algérien en 1956 à Tanger, a légué à l'Etat, sous forme de fondation, sa maison de maître avec jardin aux abords du village de Sidi Abou Madyan et le bain de rapport (hammam Sliman) proposant, selon ses voeux testamentaires, la création d'un hospice, ou, à défaut, un espace rattaché au saint savant, à l'honneur de la culture. Or, depuis voilà plus de quarante années, ce lieu est fermé et la fondation, créée pour prendre possession des lieux, dissoute. Depuis sa fermeture à la mort du donateur, les biens (manuscrits, objets d'art, meubles…) ont, en partie, disparu… Nous rappellerons que cette maison fut un lieu de grandes rencontres qui a accueilli de grands historiens et hommes politiques tels Messali Hadj, Jacques Berque, Charles André Julien, André Nouchy, Ferhat Abbès, cheikh Taleb el Ibrahimi… Durant l'exil au Maroc de son propriétaire pendant la Guerre de Libération nationale, elle fut érigée en poste militaire français. Sa fermeture depuis 1970 jure avec mépris de la volonté patriotique de son donateur-testamentaire alors que le geste de son donateur mérite d'être élevé en exemple aujourd'hui encore.
Dans vos écrits en tant que journaliste, vous avez toujours accordé de l'intérêt à la protection du patrimoine historique et archéologique de votre ville. En tant que connaisseur, quel bilan faites-vous de la situation ?
Je commencerai tout d'abord par vous rappeler que j'ai occupé pendant plusieurs années, de 70 à 75, le poste de premier responsable des services des antiquités et des monuments historiques après l'indépendance. Il m'était dévolu le rôle de rouvrir le musée et d'autres tâches que j'ai assumées dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine. J'ai parallèlement assuré l'organisation de plusieurs campagnes nationales et internationales de fouilles à Agadir sur plusieurs campagnes en collaboration avec mes amis Sid Ahmed Baghli enfin, Mounir Bouchenaki, Abderrahmane Khelifa et Saïd Dahmani, historiens et archéologues, qui passaient pour les pionniers de l'archéologie post- indépendance en Algérie avec aussi l'ouverture de plusieurs chantiers à Tipaza, à la Kalaa des Bani Hammed, à Honaine… Ces moments de fouilles à Agadir, Honaïne, Siga, Saint-Leu (Béthioua) ainsi que les opérations de restauration des mosquées de Tafesra, Nedroma, Sidi Abou Madyan, Sidi al-Haloui… m'ont appris beaucoup de choses, outre aussi les expositions auxquelles j'ai participé dont celle organisée à Bonn intitulée «Cavaliers et rois numides«. L'histoire musulmane eut le privilège des premières recherches archéologiques engagées dès l'indépendance. La protection des monuments et sites archéologiques fait certes partie d'un contexte global qu'il faut gérer dans ses diverses dimensions: historique, urbanistique, économique, culturelle et environnementale. Tlemcen compte pas moins d'une cinquantaine de monuments classés. Le problème posé est celui comment protéger les monuments et les sites avec leur environnement à 200 m de rayon pour chacun, selon la loi de 1967 modifiée en 1998 et cela en l'absence de règles de normalité fixant la visibilité, l'élévation, la typologie… ? Normalement, l'université doit contribuer aux études techniques. La plupart des sites et monuments de l'époque musulmane en grande majorité sont situés à l'intérieur du tissu urbain (bain, mosquée, site archéologique...). La notion de protection mal définie reste encore une notion très vague qui a besoin d'une traçabilité pour une lecture lisible, applicable pour tout le monde sur le terrain. A cause de ce vide c'est, depuis, un peu la navigation à vue. Le périmètre des 200 m tel que fixé par la loi a besoin de règles spécifiques opposables à tous, pour chacun des sites ou monuments. Il y a la nécessité d'élaboration d'un dossier technique pour chaque monument et aussi d'une carte archéologique désignant l'emplacement et l'étendue de l'espace des sites protégés (lacs préhistoriques de Karar -Remchi-, Chiguer -Maghnia-)…La société civile a déploré, impuissante à cause, à mon avis, d'un déficit de représentation et de représentativité l'état d'abandon dans lequel se trouvent de nombreux monuments tels les mausolées de Sidi Daoudi Ben N'cer al-Asadi (m. 1050), premier commentateur musulman de la vulgate de Sahih al-Boukhari; Sidi Abi Djamaa Talalissi, médecin-poète grenadin du XVe siècle mort à Tlemcen, le site du palais de Mansourah… et aussi la disparition sous les pics de vestiges de vieille mémoire historique et culturelle, voire: l'escale almohade de Koudia, le siège de l'Odjak, la prison turque, la maison de Mohamed al-Bouhmidi, khalifa sous l'émir Abdelkader, le tombeau de Baba Safir, un des deys d'Alger mort à Tlemcen, «Dar S'bitar», les demeures d'hommes de lettres et de savants: Choaib Aboubekr, Mohamed Dib… et d'hommes politiques tel Messali Hadj… en dehors des restes de la vieille médina qui disparaît peu à peu sous l'effet d'une mort lente. La création d'un atelier des monuments historiques composé d'un architecte, d'un historien et d'un archéologue, à l'instar de celui de la vallée du Mzab, fut longtemps souhaitée par les habitants pour une gestion efficace du patrimoine, au-delà aussi de la nécessité de faire fonctionner le Conseil de wilaya de l'urbanisme mis en veille depuis sa création officielle, il y a plus d'une décennie.


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