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Tlemcen - La grande école de la musique «sana'a-gharnata» : des terroirs, des auteurs et des chants
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 21 - 10 - 2015


Suite et fin
Ce manuscrit original confirme également la terminologie couramment admise à ce jour, à savoir m'ceddar, b'taîhi, darj, inçiraf des structures de la nouba… Selon certains historiens, ce manuscrit aurait été trouvé dans la bibliothèque du célèbre faqîh, Yahia al-Wancharissi (né à Tlemcen, 1431, décédé à Fès en 1508) qui fut pillée par le comte d'Alcaudète, gouverneur espagnol à Oran, lors du sac de la ville.
Abdelouahid fils de Yahia al-Wancharissi est aussi l'auteur d'une épître originale consacrée à la musique, intitulée «Fi toubou wa-l-ouçoul» où il est question de ses modes (maya, h'sin, reml …) comme une thérapie de soins pour les malades, à l'instar de la vieille tradition indo-chinoise… Nous considérons que l'essentiel de ce que nous connaissons de la musique dite «sana'a» est contenu dans tous ces précieux manuscrits parmi également d'autres ouvrages éparpillés dans de multiples collections privées appartenant à de vieilles familles savantes. Il ne faut pas oublier également les contributions scientifiques utiles de chercheurs et universitaires qui ont consacré de nombreux travaux à l'art musical dit «andalou», nous citerons : Nadir Maarouf, Mohamed Souhil Dib, Dr Yahia Ghoul …
UN HERITAGE MUSICAL COMMUN.
L'héritage musical de Tlemcen est celui de Grenade, deux villes jumelles qui partageaient entre elles de nombreuses traditions. Dans son livre-testament Wassitat al-suluk fi siyasati al-muluk» le roi-poète zianide Abou Hammou Moussa II (1359-1389) conseillait à son fils, le futur sultan Abou Tachfin II (1389-1393), «de se porter prêt à apporter de l'aide aux rois nasrides, leurs cousins de Grenade«. Pendant la reconquista, Tlemcen accueillit le roi Boabdil et sa famille, les «Ibn Soultan» et les morisquos chassés d'Espagne, en 1610. L'âme andalouse y est là présente dans ses vieilles traditions poétiques et langagières, mais aussi l'urbanité ou «Tamaddoun» des habitants des deux vieilles cités, voire le côté musc et bon vivre de leurs habitants… Ville d'adoption du grand poète grenadin Lissan eddine ibn al-Khatib, auteur de la célèbre poésie «Hal dhara dhabyou lhima», Tlemcen est aussi la cité où le célèbre mystique andalou appelé «Cheikh al-akbar», Mahieddine Ibn Arabi, y a passé sa jeunesse chez son oncle maternel Yahia ibn Yaghan qui y occupait la fonction de gouverneur sous les Almohades. La cité fut couverte de poésies vantant les sortilèges de sa nature, voire Ibn Labbana de Dénia (1044-1113), Ibn Hayyan de Cordoue (897-1076), le grenado-tlemcenien Lissane eddine ibn Khatib(1313-1374), Ibn Khafadja (1058-1137), le grand soufi tlemcenin Ibn Khamis (1252-1309), mort assassiné à Grenade .
L'annulation du festival de la musique classique «sana'a» qui a échu à Tlemcen de l'organiser pendant plus de vingt-cinq années, de 1974 à 2002, continue toujours à susciter des interrogations et cela, dans les milieux des associations et de l'élite musicale. Il est à rappeler que ce festival, qui a figuré parmi les grands moments culturels de la cité des zianides, a contribué largement à ouvrir cette musique. Son organisation était à la charge bénévole de mécènes et esthètes avec des conférences, des expositions, enfin la publication d'une revue intitulée «Festival». Depuis, les associations et les mélomanes ne s'y mêlent plus. Le public très exigeant boude aussi, en se montrant moins fervent. La raison de l'annulation du festival de la «sana'a» et son remplaçant le «Hawzi» n'a pas convaincu le public connaisseur, habitué à la «sana'a», patrimoine au cœur du lourd héritage de la cité en matière de musique «sana'a-gharnata» et de son écologie propre : hawzi, Gherbi-malhoun, aroubi, sama'a … L'héritage de la «sana'a-gharnata«et les croisements qui l'ont enrichi au fur et à mesure de son évolution dans le temps est indissociable des expressions artistiques connexes fécondées en symbiose avec l'art musical dit andalou.
L'ANNULATION DU FESTIVAL DE LA «SANA'A-GHARNATA»…
L'héritage poético-musical d'inspiration populaire a marqué, aussi, dans cette cité, à partir du XVe siècle, une étape d'affranchissement de la langue parlée par rapport à la langue des Belles lettres arabes de la qâçida, du Mouwaschah, dans la chanson andalouse. Le «Beldi» était annonciateur de la naissance d'une nouvelle zone littéraire débordant les frontières de la langue arabe. Il est témoin de la forme d'expression poético-musicale qui a fait, de sa nouvelle strate, (Qâçida, Mouwaschah, Zadjal, Zadjal beldi, Beldi) incursion dans la littérature populaire d'une écriture et d'un penser simple, d'un grand humanisme, ce qui explique l'immense et éternel succès de ses chansons. En tant que nouvelle quête poétique du »beldi-hawzi», elle prendra aussi des proportions et se veut spirituelle avec le poète maghraoui, du Dahra, Lakhdar Benkhlouf (début du XVIe siècle) dont la rencontre avec le poète Benmkahla fut décisive au mausolée de Sidi Abou Madyan. Avec le poète épique Lakhdar Benkhlouf et le poète moraliste Mohamed Ben M'saïb, le parler écrit est entré pour la première fois dans la langue liturgique, voire aussi son contenu métaphorique très riche. L'expérience des arts et des lettres populaires est déjà là, depuis plusieurs siècles, dans les mœurs raffinées de la société citadine. Elle a ouvert la voie à d'autres formes d'une autre typologie, cette fois-ci, reflet d'une réalité socio-culturelle vivante, voire le «Aroubi» incarnant la vie paysanne, son mode de vie et de pensée, le »Gherbi-malhoun» (désignant la formes poético-musicale du Gherb, c'est-à-dire du Maroc), le «Zendani» un genre assimilé aux plaisirs… soit dans son ensemble une fresque poético-musicale admirable, traduisant une foisonnante diversité, dans tout le Maghreb. Il est à noter que l'art de la «sana'a-gharnata» est couvert au Maroc du nom de «gharnati» tradition qui s'est perpétuée dans de nombreuses villes au Maroc où de vieux maîtres de style qui se sont installés et bien avant aussi, à Oujda, Rabat, Casa, Fès… voire maalam Elie Ibého Bensaïd (1880-1972), qui, après un séjour à Alger où il était membre d'al-Moutribiya fondée par Yafil en 1911, a rejoint son maître Makhlouf Rouch dit B'taîna; Mohamed Bensmaîl, Cheikh Rédouane Bensari, Cheikha Tetma qui, dans son itinéraire s'est, un moment, installée à Fès... sans oublier aussi Cheikh Larbi Bensari et Omar Bekhchi à l'honneur, plusieurs fois, à la cour royale de Marrakech.
L'ECOLE PROSAIQUE ET MUSICALE DU «BELDI-HAWZI».
Le sociologue maghrébin Abderrahmane Ibn Khaldoun désigne sous le nom de «Aroud al-balad», la poésie du terroir populaire traduisant la sève du peuple. L'œuvre partiellement sauvée des grands prosateurs-compositeurs Saîd al-Mandassi, Ahmed Bentriqui, Mohamed Ben M'saïb, Boumédiène Bensahla, M'barek Bouletbag, Daoudi al-Faroui… illustre parfaitement cette transition historique de la langue du parler écrit qui, en mettant fin à sa forme verbale, a libéré l'idiome du parler commun des règles de la langue arabe du classicisme. C'est l'école prosaïque et musicale du «beldi-hawzi» qui va naître marquant un tournant dans la production artistique en Algérie. Les textes poétiques sont versifiés, au début, tantôt dans la langue andalouse ou zadjal, tantôt dans le «Beldi», tantôt dans les deux langues «Zadjal-beldi». Les versificateurs, maîtres de l'art du «bien dire» nous ont laissé des traces indélébiles dans la langue parlée de musc et de sève du peuple, il y a déjà plusieurs siècles et cela, à travers des chansons immortalisées par les maîtres dans l'art et la perfection de la chanson dite «andalouse», voire Maalma Yamna, Dahmane Benachour, Sadek al-Bidjaï, Mohamed Khaznadji, Tahar Fergani, Rédouane Bensari, Abdelkrim Dali… Parmi les chansons du «beldi» nous citerons : «Rabbi aqbal» de Saîd al-Mandassi ; «Tal adabi ou tal nakdi», «ya ouacham», «ya ouchâq eszzine», «ghab aliya khial Mouny»... de Ahmed Bentriqui ; «fi-l-manam ya siyâdi», «alqâb bat Sali oua khatar farah», «qahl al-ayn m'dabal chafar», «fah al-ouard oua soussan», «sara al-ghas kada mahboubi»…de Mohamed Ben M'saïb ; «sidi man yasal aala kahl ayn«, «louma al f'doul», »soubkhân khalqî soltani»… de Boumédiène Bensahla ; «al baz oua-l-hamam» ,» Mohamed al-habib», «habba narou g'dat» de Hadj Tahar, «maïli sadr h'nin» de Mohamed Ben Amer, «lillah ya b'n al-ouarchan» de Bellahcen Benachenhou, «al-frâq «(chanté par Cheikh Mohamed al-Anka) de Mohamed Bensmaîl… «Ces genres sont tellement apparentés qu'il est dificile de vouloir établir une barrière étanche entre eux, d'une part, et la musique andalouse, d'autre part. Le hawzi puise sa veine littéraire dans la langue du peuple. Ce critère langagier n'est pas exclusif au hawzi, car la musique savante dite andalouse a utilisé dans son évolution l'arabe dialectal dans la poésie strophique du type zadjal, contrastant avec la langue académique, celle du mouwaschah», écrit Yahia Ghoul dans son étude traitant des systèmes modaux et rythmiques en musique andalouse. Des chefs d'œuvre de la langue populaire remplissant les conditions de goût et de beauté d'où son ancrage dans la société qui l'a produite. Ces littérateurs dont certains sont en même temps poètes, musiciens et compositeurs et qui ont besoin d'une reconnaissance aujourd'hui, avaient une grande culture événementielle et musicale citant les instruments, les rythmes, les modes, les genres musicaux «Oubad» et «z'djoul» et qui ont disparu, deux genres qui ont disparu du répertoire tlemcenien. Ils sont aussi témoins d'une phase importante de l'histoire du pays et de leur ville natale sous les Ottomans y décrivant l'atmosphère et les évènements voire l'incendie, de son temps, du mausolée de Sidi Abou Madyan du vivant du poète Boumédiène Bensahla… Leurs œuvres sont considérées comme une véritable bibliothèque lexicographique de la langue populaire et de ses aspects épistémologiques et sémantiques. Ce que l'on peut dire en conclusion est que le «Beldi» est conséquence de l'évolution naturelle de la langue arabe, au Maghreb. Tous les genres musicaux contigus ou périphériques, nés en marge de la «sana'a» sont d'un tempérament profondément algérien. La plupart des poèmes «Khlass» ou «mokhlas» tels «wahad al ghoziel», «rimoun ramatni «, «ala man takoun», «mahla charab»… d'introduction tardive dans la nouba «sana'a-gharnata», en tant que mouvement final «khlas» ou «mokhlas», appartiennent aux poètes populaires de la chanson «Zadjal-beldi». Dans la chanson le «beldi» ou «hawzi» il est mis en valeur l'œuvre poétique des grands poètes du «zadjal-beldi» qui, dès le XVIe siècle, ont imposé la langue parlée comprise de tout le monde, dans l'écrit ; voir Saîd al-Mandassi, Ahmed Bentriqui, Mohamed Ben m'saïb …
Aujourd'hui, ce patrimoine admirable du point de vue de l'art a besoin d'approches systématiques aux plans des études sur les rythmes, les dessins mélodiques, les textes afin d'établir les critères souvent complexes de son historicité et de son classicisme. Le travail méritoire accompli jusque-là par les associations reste insuffisant et cela, à défaut de conservatoires, de centres d'études pour une prise en charge scientifique réelle du vaste champ constitué par les terroirs patrimoniaux.
*Chercheur universitaire et auteur


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