Parce que c'en est un, le soulèvement populaire doit être perçu comme un râle de concitoyens observant une Algérie filant droit vers la désintégration. Plus qu'une mal-vie, tout ou presque dans les comportements, les réflexions et l'esprit indiquait une métastase qui préfigurait un futur désastreux. Ce n'est pas le vivre aujourd'hui qui préoccupait tant mais c'étaient les lendemains incertains présageant un suicide national qui ont interpellé les consciences et la raison. A la limite, le père de famille lambda pouvait se passer du kilo de viande à 1.800 dinars et donner le dos à sa facture d'électricité comme, même contrarié, jeter à la poubelle sa lourde ordonnance médicale. Il en a vu d'autres et il a su se familiariser avec les leçons de la patience et de la fatalité. Mais celles-ci face au péril ont montré leur limite. Perspicace et avisé quand le danger est avéré, dans un monde en totale ébullition, le peuple a saisi que, pour nourrir des générations, les loger, les éduquer, les soigner, il fallait l'impératif de s'inscrire dans une farouche compétition mondiale et que l'indépendance et la souveraineté ne pouvaient en aucune manière se suffire seulement d'un hymne et d'un étendard. Tout comme ouvrir la porte de la présidentielle à plus d'une centaine de candidats farfelus n'est qu'une œuvre de démocratie saugrenue. La large frange éclairée de la jeunesse algérienne a plus que toute autre force compris les enjeux. Elle le prouve tous les mardis et les vendredis. Elle le démontre chaque instant avec une perspicacité et un humour décapants. La vision juste et la compréhension d'un état des lieux cependant ne suffisent pas. Des peuples autrement mieux aguerris et plus développés s'échinent sans résultats à régler des tempêtes sociales de ce nouveau siècle. Les exemples qui viennent d'ailleurs doivent indiquer aux Algériens qu'ils sont face à la nécessité d'entreprendre une œuvre d'âpre et longue haleine qui ne saurait se conformer à des exercices et des manœuvres folkloriques. Pour ce faire, personne ni quiconque n'a de recette. Un début de solution pourrait advenir par la prise de conscience de cette vérité et l'effacement de tous devant l'intérêt général.