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Un code de la famille à réformer d'urgence
Publié dans Sétif Info le 08 - 03 - 2011

Depuis l'Indépendance, des droits élémentaires pour les femmes, tels que la liberté de circuler, consommer dans les cafés et aller au cinéma et autres lieux publics sont réduits à leur portion congrue.
Soucieux de ménager les milieux qualifiés de traditionalistes, le pouvoir a intégré dans sa stratégie la répression policière. Qui ne se rappelle la fameuse « campagne d'assainissement », hamlat et tathir aux lieu et place de hamlat et tahrir, campagne de libération. Il y eût un harcèlement des couples pour atteinte présumée aux moeurs avec pour toile de fond un marasme culturel chronique et une incapacité du Pouvoir à juguler le modèle de consommation de type occidental. Par ailleurs, la croissance démographique non maîtrisée qui, outre qu'elle obère de façon certaine le développement socio-économique, ne libère pas les mentalités des pesanteurs historiques d'autant plus qu'il faut ajouter à cela le caractère moralisateur des supports pédagogiques dans l'enseignement (ainsi que les « prêches » de certains maîtres d'école, de collège et de lycée aux lieu et place d'instruction civique), l'université étant hélas devenue le théâtre d'affrontements physiques entre « francisants » et « arabisants », entre « progressistes » et « traditionalistes » beaucoup plus qu'un lieu de savoir scientifique et de débats d'idées.
Il reste évident que les préjugés constituent l'un des principaux facteurs explicatifs de cette situation. En outre, nonobstant l'appel fait par l'ensemble des textes à caractère doctrinal (cf. les différentes chartes de l'Algérie indépendante) et à caractère juridique (les diverses Constitutions et lois) sur la participation de la femme à l'édification du pays, peu de femmes ont accédé à des postes de commande de la vie publique : ministres, députées, ambassadrices, préfètes et sous-préfètes, recteures, présidentes-directrices générales de sociétés, même si certains métiers réservés jusque-là aux hommes - armée et police - ont subi quelque peu le baptême du feu des femmes. Il est vrai que, toutes proportions gardées, cette situation prévaut dans les pays avancés, à la tête desquels les Etats-unis d'Amérique et l'Europe. En effet, malgré des textes éminemment protecteurs et égalitaires (ceux de l'Organisation internationale du travail, le Traité de Rome, la Déclaration universelle des droits de l'Homme, les principes constitutionnels), du chemin reste encore à parcourir dès lors que des discriminations y sont admises encre.
Du code de 1984…
Il est vrai néanmoins que, dans les pays avancés, on est loin de la situation d'infériorité dans laquelle la femme algérienne a été placée par le code de 1984 timidement modifié en 2004. Le tout est sans doute de réfléchir à des solutions graduellement satisfaisantes pour éviter les palliatifs tels que le travail à temps partiel de la femme et l'allocation de la mère au foyer, par exemple. D'où l'exigence de l'infrastructure sociale que constituent les crèches et les garderies d'enfants entre autres, la question de la « dualité des tâches » pour les femmes : travail professionnel et tâches ménagères demeurant l'apanage de chacun des couples. Sans doute, pour aboutir à une situation de paix sociale, la société civile doit éviter l'approche de nature conflictuelle (guerre des sexes : maris et femmes, pères et filles, frères et surs) et concilier la réalité sociologique avec les textes élaborés par des juristes soucieux d'équilibre social.
Dans cet ordre d'idées, l'Algérie a relativement peu emboîté le pas à la modernité au niveau des textes. Ainsi, dans la Constitution de 1976 et celles subséquentes, peu de dispositions sont consacrées à la question de la femme, si ce n'est de stipuler sous forme de considérations générales que « Tous les droits politiques, sociaux et culturels de la femme algérienne sont garantis par la Constitution », voire de consacrer l'égalité juridique de celle-ci avec l'homme par l'égal accès à tous les emplois, la prohibition de toute discrimination fondée sur le sexe, la protection de la maternité, la garantie et la sauvegarde des libertés et des droits fondamentaux et l'égalité devant la justice.
Si le constituant algérien s'est montré parcimonieux dans son approche du problème, le code de la famille de 1984 (loi n° 84-11 du 9 juin 1984) est prolixe en la matière. Réparti sur quatre chapitres (228 articles) : du mariage et sa dissolution, de la représentation légale, des successions et des dispositions testamentaires, le code s'inspire de la charia (rite malékite). L'économie du texte est la suivante : la polygamie sous réserve, la tutelle matrimoniale à l'égard de la fille (même majeure), la prohibition du mariage avec un non-musulman pour la femme, le divorce comme faculté exclusive du mari (la répudiation), l'interdiction de l'adoption (tempérée toutefois par le système de la kafala ou recueil légal), l'absence de statut pour la mère célibataire et le droit à la moitié des parts en matière successorale.
Sans être une préoccupation majeure pour les différents régimes successifs, le statut de la femme a fait l'objet d'une première codification en 1966 fondée également sur la charia, le projet ayant été élaboré par le ministère de la Justice. Suite aux protestations qui s'ensuivirent, le gouvernement de Boumediène préféra retirer le projet. Le même scénario eut lieu au cours de l'année 1973. Sous Bendjedid, en 1981, un code similaire quant à ses dispositions vit le jour. Ce code ne fut pas adopté suite au tollé soulevé dans la rue par des femmes saluées comme des figures de proue de la guerre de Libération nationale - parmi lesquelles Djamila Bouhired, Zohra Drif et Fatouma Ouzegane. En effet, le 24 janvier 1982, le projet fut retiré sur décision de la Présidence, pour réapparaître, toutefois, en 1984.
A titre comparatif, la Tunisie s'est dotée d'un code dès 1956. Certes, empreint de mimétisme dans ses principales dispositions et en avance bien évidemment sur les pratiques sociales, la modernité fut le levain de ce code. Au plan juridique, le statut de la femme tunisienne apparaît nettement valorisant et valorisé. Reste que l'écart entre la théorie et la pratique doit être mesuré. En tout état de cause, deux exemples parmi d'autres peuvent servir à marquer la différence entre les statuts algérien et tunisien. Ainsi, le divorce par consentement mutuel est inexistant dans le premier cas ; bien plus, l'adultère, les injures et sévices graves ne sont pas constitutifs de faits entraînant le divorce. Par ailleurs, le droit au travail n'existe que si le contrat de mariage le stipule.
S'agissant de la polygamie, la sourate 4, verset 3 est claire : « Epousez donc celles qui vous seront plaisantes par deux, par trois ou par quatre ; mais si vous craignez de ne pas être équitables, prenez-en une seule. » La sourate 129 est tout aussi explicite : « Vous ne pourrez traiter équitablement toutes vos femmes, quand bien même vous le désireriez. ». A ce sujet, les rédacteurs du code ont entendu limiter à trois conditions la formation du lien matrimonial : le consentement, la présence obligatoire d'un tuteur et l'obligation d'une dot versée par l'époux. Selon l'article 8 : « Il est permis de contracter mariage avec plus d'une épouse dans les limites de la charia si le motif est justifié, les conditions et l'intention d'équité réunies et après information préalable des précédentes et futures épouses. » Ici, l'équité est de mise. Toutefois, comme déjà constaté, la conclusion du mariage pour la femme incombe à son tuteur matrimonial (wali), le père ou un proche parent (article 11), sous réserve de ne pas contraindre la personne placée sous sa tutelle (article 13). Là, l'accent est mis sur le consentement.
La principale obligation qui pèse sur le mari consiste à « subvenir à l'entretien de l'épouse dans la mesure de ses possibilités » (article 37). Telle que rédigée, cette disposition du code laisse sous-entendre que la femme est au foyer. Quant à l'épouse, elle est tenue d'« obéir à son mari et de lui accorder des égards en sa qualité de chef de famille » et de « respecter les parents de son mari et ses proches » (article 39). Il est à regretter que cet article ne puisse avoir de contrepoids en devoirs équivalents pesant sur l'époux ; et ce d'autant plus que l'on peut légitimement se demander si l'ambiguïté ne vient pas d'une mauvaise interprétation de la sourate 38 selon laquelle « les hommes sont supérieurs aux femmes par le fait qu'Allah en a élevé plusieurs au-dessus des autres et aussi par le fait qu'ils dépensent de leur fortune ».
Autre question d'importance : la filiation qui est établie par le mariage valide (article 40). Quid des enfants extraconjugaux, ceux dits naturels, adultérins ou incestueux ? Quel est le statut et quels sont les droits de ces enfants ? Ainsi, selon l'article 41, seul le mariage légal permet d'affilier l'enfant à son père, c'est-à-dire par la possibilité des rapports conjugaux (« sauf désaveu de paternité selon les procédures légales »). Quid de la fille-mère et des subsides qu'elle serait censée demander, par voie judiciaire, au géniteur fuyard ? Il reste évident que le législateur a entendu, en la matière, évacuer du droit algérien les éléments pouvant présumer - voire certifier - de la paternité extralégale, tels que les actes de notoriété et la possession d'état. Il est navrant que cette question ne puisse trouver de réponse satisfaisante lorsqu'on sait que nombre d'enfants naissent en dehors de tout lien conjugal, enfants recueillis par l'assistance publique et que la délinquance et autres maux sociaux et psychologiques guettent.
Concernant l'adoption, le chapitre VII sur la kafala (recueil légal) règle cette question en 10 articles. Ainsi, l'article 116 dispose que « le recueil légal (kafala) est l'engagement de prendre bénévolement en charge l'entretien, l'éducation et la protection d'un enfant mineur au même titre que le ferait un père pour son fils. Il est établi par acte légal ». De même, l'article 119 indique que l'enfant recueilli peut être de filiation connue ou inconnue, enfant auquel est reconnu le droit aux prestations familiales et scolaires comme pour l'enfant légitime. Il peut même prendre le nom du kafil. Serait-ce là une reconnaissance déguisée des enfants nés de relations extraconjugales ?
En matière de tutelle, l'article 87 fait du père le tuteur de ses enfants mineurs ; à son décès, l'exercice de la tutelle revient à la mère de plein droit. La question se pose de savoir s'il n'y a pas lieu de réformer cette disposition en instituant l'exercice conjoint de la tutelle (voire de l'autorité parentale) du vivant des époux ? En matière de divorce, s'il est loisible de constater, à la lecture des articles 53 à 55, certaines garanties à l'épouse, force est de constater que « la femme divorcée par ce droit (le domicile conjugal unique) une fois remariée ou convaincue de faute immorale dûment établie » (article 52, alinéa 3). Le législateur n'évoque pas cette situation pour l'homme monogame puisque le polygame jouit dans tous les sens du terme de cette « faute immorale » (l'adultère n'étant plus réprimé pénalement - en France, par exemple -, mais pouvant constituer le fondement d'un divorce pour faute avec toutes conséquences de droit, une fois établi). Pourtant, dans la sourate 2 La Génisse, les versets 231 et 242 sont édifiants à cet égard. Le premier rappelle que lorsqu'il faut répudier des femmes, « gardez-les avec honnêteté ou renvoyez-les avec honnêteté » ; le second : « Un entretien convenable est dû aux femmes divorcées. C'est un devoir pour ceux qui craignent Allah. ».
...Aux timides réformes de 2004 L'autre dimension juridique du statut de la famille est constituée par le chapitre relatif aux successions ; question complexe et ardue, s'il en est. Ainsi, des dispositions générales énoncées (articles 126 à 138), celles de l'article 138 paraissent curieuses du point de vue de la formulation. Cet article est ainsi libellé : « Sont exclues de la vocation héréditaire les personnes frappées d'anathème et les apostats ». Quant à l'article 143, il détermine les parts de succession ; la moitié, le quart, le huitième, les deux tiers, le tiers et le sixième. Les catégories d'héritiers délimitées sont au nombre de trois : les héritiers réservataires (héritiers fard), les héritiers universels (héritiers aceb) et les héritiers par parenté utérine ou cognats (daoui el arham).
Or, autant pour la première catégorie, il y a une certaine équité respectée entre hommes et femmes, autant pour la seconde on peut relever quelques observations ; ainsi par exemple, l'article 150 du code indique que « l'héritier aceb est celui qui a droit à la totalité de la succession ». A la tête des héritiers réservataires, ayant droit aux deux tiers de la succession, figurent les filles mais lorsqu'elles sont deux ou plus à défaut de fils du de cujus (donc un fils de cujus - 2 filles ou plus ?). Il en est de même des descendants du fils du de cujus, des surs germaines et des surs consanguines. Quant à la mère, elle fait partie des héritiers réservataires ayant droit à un tiers et encore « à défaut de descendance des deux sexes du de cujus » (article 148, alinéa 1er).
Comme on peut le constater, la question de la femme se révèle complexe, telle qu'exposée dans le code de la famille de 1984. Sans doute que, en l'état actuel des choses, la réforme la plus raisonnable à envisager serait d'instituer un système civil qui permettrait de tenir compte des aspirations légitimes de certains segments importants de la société civile algérienne face à la tendance démesurée d'autres segments de la même société qui s'opposent à tort à l'accession de l'Algérie à une technologie juridique d'autres nations ayant atteint un degré évident d'évolution de la règle de droit telle qu'appliquée à la société. Ainsi, parmi les nouvelles dispositions il y a le maintien de la polygamie assortie, il est vrai, du consentement de la première épouse - consentement vérifié par le juge mais il faut toujours à la femme un tuteur matrimonial pour le mariage, même majeure (rôle assumé par le juge, le cas échéant). S'agissant du mariage, la principale innovation concerne la suppression de la procuration à un tiers pour représenter l'époux et l'alignement de l'âge du mariage à 19 ans révolus pour l'homme et la femme ; concernant le divorce, l'époux est désormais tenu légalement d'assurer le logement à ses enfants mineurs, avec la précision que l'épouse ne peut demander le divorce que dans des situations particulières, notamment pour infirmité sexuelle de l'époux, absence de plus d'une année sans motif valable, « pour toute faute morale gravement répréhensible établie... ». De même, l'épouse peut se séparer de son conjoint sans l'accord de celui-ci, moyennant le versement d'une somme. En matière de succession, il n'y a pas de changement. A titre comparatif, le Maroc, qui a également modifié sa Mudawana, (Code du statut personnel), de façon plus substantielle (par exemple : consécration de l'égalité des droits, suppression du tutorat, co-responsabilité parentale...) ; cependant, il semblerait que deux ans après son entrée en vigueur, le nouveau texte souffre d'application due notamment aux mentalités empreintes de traditionalisme encore tenace chez les juges et une partie des citoyennes marocaines… Toujours est-il que le code de la famille, tant décrié, est à réformer d'urgence. En effet, si le bonheur reste une vieille idée, ce n'est point une idée vieillie ; encore moins une idée vieillotte.
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(*) Avocat - Auteur Algérien


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