Tous les historiens doivent avoir accès aux archives pour l'écriture de l'histoire de la colonisation française de l'Algérie, a affirmé lundi l'auteur de "Labyrinthe algérien : passé masqué, passé retrouvé", Maurice Mauviel. "Naturellement, tous les historiens doivent avoir accès aux archives, à toutes les archives", a-t-il dit dans un entretien à l'APS, précisant que celles d'Aix-en-Provence (en France) "très riches sont ouvertes à tous". Pour cet universitaire, il doit être possible, par les moyens de reproduction qui existent actuellement, de "faire en sorte que les deux pays puissent posséder un double des documents". La question des archives occupe une place importante parmi les dossiers importants et sensibles dans les relations algéro-françaises, rappelle-t-on. Les quelques archives restituées ne semblent guère répondre aux attentes de la partie algérienne. L'Algérie a de tout temps revendiqué à la France la restitution des archives qu'elle a expédiées en France au lendemain de la signature des Accords d'Evian en 1962. "Je souligne que pour le passé antérieur à 1945, par exemple, il existe de nombreuses sources qui ne retiennent pas suffisamment les historiens ou pas du tout parfois", a ajouté Maurice Mauviel qui propose, dans son ouvrage de plus de 400 pages, de découvrir une Algérie méconnue et arrache à l'oubli de nombreux Algériens et Algériennes qui ont marqué l'histoire de leur pays. Pour son ouvrage, il a précisé qu'il s'est "efforcé de suivre les leçons de Germaine Tillion qui souligne que l'histoire algérienne et l'histoire française (au sens large du terme) depuis 1830 sont liées", soutenant que l'historien de la colonisation en Algérie "doit posséder un minimum d'information sur les deux histoires et s'efforcer de les lier pour mieux appréhender la passé". "Autrement, a-t-il averti, on se condamne à une histoire unilatérale, partielle, tronquée et réductrice", ajoutant que "beaucoup d'individus cultivés aujourd'hui, journalistes et historiens, ne s'attachent pas suffisamment à ce que je pourrais appeler la périodisation de la présence française en Algérie depuis 1830". Il a souligné que "l'historien doit diversifier ses sources", relevant que "bien souvent, plus ou moins consciemment, il tend à utiliser celles qui vont dans le sens de son idéologie, de ses passions, de sa colère". En ce qui concerne son ouvrage, qui sera édité en Algérie chez El Kalima en septembre prochain, Maurice Mauviel il a expliqué qu'il n'a pas eu comme projet de se "confronter" aux versions connues de l'histoire de la colonisation française, mais il a "essayé de montrer que certaines sources, n'allant pas dans le sens de l'histoire qui prédomine, sont refoulées ou ignorées". "Je me suis efforcé dans mon livre de souligner le caractère vicié du colonialisme tout en mettant en lumière l'Algérie chaleureuse (...)", a-t-il dit, faisant remarquer qu'il a esquissé quelques aspects de la complexité qui n'apparaît guère dans l'historiographie actuelle (algérienne, française ou autre). Il a déploré, en conclusion, que les réactions, entretiens et recensions autour de son ouvrage montrent que les lecteurs sélectionnent "ce qui va dans le sens de leurs habitudes, de leurs préoccupations, de leurs lectures", souhaitant qu'ils "dépasseront leur horizon habituel pour embrasser l'ensemble".