Les propositions des partis engagés dans les législatives du 4 mai prochain pour une sortie de la crise économique induite par la chute des prix de pétrole, sont pour la plupart "à caractère général" et manquent de "concision et de détails", s'accordent à dire observateurs et experts en économie. "Le contenu économique des programmes électoraux est dans la plupart des cas très vague, les partis politiques fixant des objectifs généraux mais sans donner avec précision les instruments et moyens pour les atteindre", a estimé l'économiste Kamel Rezig dans une déclaration à l'APS. Pour cet enseignant à l'Université de Blida, "les programmes annoncés jusque-là par les partis sont inspirés du programme présidentiel et ne sont qu'une "reformulation" du programme actuel du gouvernement sans proposer de nouvelles alternatives, ce qui aurait permis aux citoyens de mesurer le poids de chaque programme. De son côté, l'expert international Abdelmalek Serrai a déploré la non publication des programmes électoraux par la plupart des partis considérant que ce qui est annoncé pour le moment durant la campagne en cours "manque de clarté et de visibilité". Toutefois, le discours électoral tourne globalement autour de certaines idées complémentaires permettant de sensibiliser davantage les citoyens sur la période difficile que traverse l'Algérie et les amener vers une prise de conscience quant au défi de l'avenir. Le professeur Chems Eddine Chitour, expert en Energie, a qualifié les propositions des partis notamment celles concernant la transition énergétique et l'économie durable, de "langue de bois", soulignant que ces formations politiques n'ont pas montré le chemin à suivre pour réaliser ces objectifs de manière méthodique et étudiée. Regrettant l'absence de programmes "fiables" et "détaillés", Ferhat Ait Ali, expert en économie, soutient, pour sa part, que les candidats aux législatives par "méconnaissance", n'ont pas de données sur la situation économique du pays. Pour cet expert, les programmes devaient évoquer en détail les propositions concernant certains secteurs, notamment la relance de l'industrie et la réforme bancaire ainsi que le développement des énergies renouvelables. "Il faut expliquer, comment traduire sur le terrain les mesures relatives à la sortie de crise, avec quel argent et à travers quels mécanismes et quelle stratégie ?", a-t-il soutenu. Quant à l'économiste Abderrahmane Mebtoul, il a estimé que le nombre des partis qui ont présenté un programme économique "qui se tient" ne dépasse pas trois partis, expliquant que leurs programmes tiennent compte de la conjoncture difficile actuelle, des exigences de l'efficacité économique avec une très profonde justice sociale et des nouvelles mutations de l'économie mondiale. M. Mebtoul a souligné, dans le même sillage, l'importance de dire la vérité et de mobiliser la population. "La situation est difficile. Il nous faut un large front social. Personne n'a le monopole du nationalisme. Il faudra réunir tous les algériens pour surmonter cette crise. Je suis persuadé que l'Algérie a des potentialités importantes pour traverser cette période, mais il faut un langage de vérité, sans ‘sinistrose', ni autosatisfaction déconnectée de la réalité locale et mondiale", a-t-il avancé. Cependant, certains partis politiques "versent dans le populisme" avec des promesses intenables, a-t-il également constaté. Consensus sur l'impératif de réorienter la politique économique Dans son programme électoral, le parti du Front de libération nationale (FLN), ne parle pas explicitement de la crise économique mais évoque la "baisse continue des prix de pétrole", appelant à adopter "une approche économique dans la gestion de l'économie nationale sur les plans de la réglementation, du contrôle, et du financement", en préservant le rôle de l'Etat dans la conduite du processus du développement. A ce propos, le parti FLN propose la réalisation de grands projets dans le domaine des énergies renouvelables et l'encouragement de la recherche scientifique pour trouver d'autres ressources d'énergie mais "sans toucher à l'environnement". Cette formation politique appelle à attirer de nouveaux investissements avec des partenaires Algériens et étrangers, "maintenir" et "renforcer" le soutien à l'investissement productif de biens et de services. Pour le parti du FLN, le tourisme est parmi les secteurs économiques importants porteur de nouvelles ressources financières et postes d'emploi. Le Rassemblement nationale démocratique (RND) évoque la crise économique dans un chapitre intitulé "pour l'accélération de la transition économique". Le RND affirme que la chute des prix des hydrocarbures a "affecté le budget de l'Etat et ralenti le rythme des investissements", soulignant "l'urgence d'une transition économique" qui devrait s'accélérer à travers notamment, la réforme bancaire, la promotion d'un dialogue associant les partenaires économiques et sociaux ainsi que les partis politiques, pour dégager un "consensus national" autour de cette transition. En outre, le parti parle de la "préservation" de l'indépendance énergétique du pays et propose le développement des énergies renouvelables ainsi que l'exploration et l'évaluation des gisements de gaz et pétrole de schiste, en veillant à la sauvegarde de l'environnement et à la préservation de la santé de la population. Le RND propose de donner la priorité aux entreprises locales dans les marchés publics et d'obliger les entreprises étrangères qui exportent en Algérie d'investir localement, sous peine de perdre l'accès au marché national. Il prône également le report des échéances d'ouverture du marché national au titre des zones de libre- échange avec l'Union Européenne, le Monde arabe ou l'OMC, pour le parachèvement de la transition économique. De son côté, l'Alliance du Mouvement de la société de la paix (MSP) avec le Front de changement (FC), soutient la rationalisation des dépenses publiques pour faire face à la dégringolade des prix de pétrole. Dans son programme, le MSP s'engage à offrir un environnement "propice et encourageant" pour les investisseurs et attirer les capitaux, plaidant également pour l'instauration de la finance islamique et la réforme de plusieurs secteurs dont les banques, les douanes, la fiscalité et l'administration. Quant au Parti des Travailleurs (PT), il appelle à l'annulation des "mesures d'austérité et à empêcher le gouvernement de recourir aux emprunts extérieurs, affirmant que les "solutions existent" pour trouver des sources de financement du développement économique et social. Comme solution, le PT insiste sur "le recouvrement" des impôts ainsi que les crédits dits économiques "colossaux non remboursés". Pour ce parti, il s'agit de "récupérer l'argent de la collectivité nationale pour faire face à la chute du prix du baril". Le PT appelle, en outre, à criminaliser la fraude fiscale, la corruption et la confiscation des fortunes mal acquises. Le Rassemblement pour la Culture et la démocratie (RCD), qui est de retour à la participation aux législatives après le boycott de scrutin de 2012, estime dans son programme que la chute des cours des hydrocarbures remet à l'ordre du jour "l'urgence" de l'assainissement des finances publiques. Dans ce cadre, il propose de réhabiliter l'impôt dans le financement des dépenses publiques et d'élaborer des lois des finances sur la base d'objectifs à caractère culturel, social, économique et sécuritaire et non pas à partir des demandes des wilayas et des ministères dépensiers. Le parti ambitionne de mettre en œuvre un programme de numérisation de l'administration fiscale, une réduction des dépenses de fonctionnement, à travers notamment, la réduction du nombre des départements ministériels à 15. Le RCD défend aussi une réforme structurelle "profonde" en confiant la politique industrielle à un panel d'experts pluridisciplinaires sous "l'autorité directe du Premier ministre issu de la majorité parlementaire", l'inscription de toute subvention dans le budget correspondant et l'évaluation des nombreux projets n'ayant pas atteint leurs objectifs socio-économiques.