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Nouvelle : Le village gris
Publié dans El Watan le 17 - 08 - 2008

Les nouvelles, c'est toujours bien. Surtout quand elles sont bonnes. Voici une bonne feuille de notre collègue Abdelwahab Boumaza intitulée Le village gris.
Tu me passes une cigarette, Rafik ? - Je n'en ai qu'une seule, je la laisse pour après le manger, mais je vais l'allumer maintenant. Je t'en donnerai quelques bouffées…
La misère, la misère noire, mon frère Rafik…
Avec ton diplôme de technicien en informatique, tu dois avoir dégoté un job depuis bien longtemps…
Non, mais, montre-le moi, et j'irai illico le prendre… Même manœuvre, je demande même le poste de manœuvre, et je ne le trouve pas. Pays de piston et de corruption…
Moi, je creuse dur avec cet entrepreneur, qui ne nous a pas payés depuis bientôt huit mois !
Tu sais bien que moi aussi, je réclame trois mois de salaire à Tayeb, ce promoteur à la noix ! D'ailleurs, les travailleurs, du moins ceux qui ont été dans ce chantier, veulent intenter une action en justice. Mais il paraît que les honoraires de l'avocat dépasseraient de loin nos arriérés… » Sur ces entrefaites, un camion semi-remorque a mal négocié le virage, à l'entrée du village, et s'est autant dire disloqué en deux, dans un bruit infernal. La cabine s'est enfoncée dans le fossé, tandis que, glissant de travers un instant, la remorque s'est arrêtée, barrant carrément la route, formant un angle droit avec la cabine. Presque la moitié du chargement s'est éjectée sur la chaussée. C'étaient des barquettes de bière, dont certaines s'étaient ouvertes et les canettes brisées, laissant dégouliner leur contenu qui inondait la route.
Coup de starter !
Le chauffeur, qui s'en était sorti indemne, descendit du véhicule difficilement, fit le tour de la remorque, puis remonta dans la cabine. Il essaya de redémarrer le moteur. Au deuxième coup du starter, le moteur vrombit. Il le laissa tourner au ralenti, puis ressortit. Il se mit à recharger les barquettes intactes, sous les yeux ébahis de Rafik et de Salah, son compagnon. Eux aussi se mirent de la partie, lui donnant volontiers un coup de main. Les badauds commençaient à venir, tout survoltés. Le chauffeur, après quelques barquettes, dit aux deux volontaires de laisser tomber et grimpa dans sa cabine. Il accéléra tout en braquant, voulant sortir de l'ornière. Tout doucement, il arriva à remonter le talus, et revint à la route, la remorque s'aligna avec la cabine.
« Foutu pays, les jeunes me regardaient avec un œil torve, comme si j'avais tué leurs pères ! » laissa échapper le chauffeur, jetant un œil sur un rassemblement de jeunes qui ne cessait de grossir. Le camion parti, ce fut la razzia. C'était à qui prendrait le plus de bouteilles possible, qui s'en accaparerait dans une frénésie sans pareille. Les gosses en prenaient et les jetaient à même la chaussée pour les briser ; ils se grisaient à ce jeu. Un jeune homme, ayant une barbichette, et portant une calotte et un kamis, les incitait à les casser, « pour qu'on les boive pas », selon ses termes. Cependant, d'autres enfants en ramassaient et les mettaient de côté, en les cachant à la vue de ce jeune homme, pour les revendre à des adultes, qui, en contrepartie, leur avaient proposé en catimini une petite somme d'argent. Ils n'osaient pas le faire eux-mêmes, car ils passaient pour des gens qui n'avaient rien à voir avec l'alcool.
Par petits groupes, l'on s'adonnait à la bière, l'on buvait tout son soûl ; des postes-cassettes diffusaient du raï et aussi du rap, et même certains dansaient sans répit tout en ingurgitant de la bière. On ne tarda pas à être ivre. « L'ivresse est assurée, cette nuit », dit Rafik à son ami. Tous deux, après avoir ramassé deux barquettes de quinze bouteilles chacune, étaient aux anges. Ils avaient un sourire figé aux lèvres. Le village avait veillé tard dans la nuit, contrairement à son habitude, où les habitants se cloîtraient dans leurs maisons et n'en ressortaient que le lendemain matin. Que faisaient-ils chez eux ? Ils zappaient et regardaient vivre d'autres gens, sous d'autres cieux. Ils vivaient avec eux à travers le tube cathodique, puis dormaient pour revenir le lendemain à la dure réalité. De la grisaille partout, le climat, les visages, les bâtisses inachevées… Tout est gris ou noir, même les habits des enfants que les parents leur choisissent…
Ali l'aviné
Ali, un ivrogne notoire, ne cessait de crier à qui voulait bien l'entendre que Dieu les avait mis à nu. Lui, il buvait devant tout le monde ; il n'avait pas peur des hommes ; il vivait nu devant Dieu ; il buvait, il ne s'en cachait pas ; voilà, vos hommes, c'étaient des buveurs, eux aussi, ils le faisaient en cachette, « espèces d'hypocrites ! » Il disait aussi que beaucoup parmi eux partaient pour la Tunisie ou l'Europe pour y faire les quat'cents coups, mais qui se comportaient au village comme des saints ; ils y allaient pour l'alcool et les femmes, alors qu'ici on ne manquait ni de l'un ni des autres, « espèces d'hypocrites ! » On voulait le faire taire, « Laissez-moi vider mon sac ! » répliquait-il. Il disait aussi : « C'est une occasion inespérée de me venger, de dire les quatre vérités aux fourbes et aux caméléons ! Tout le temps, vous êtes derrière mon dos, vous vous occupez de moi, vous vous immiscez dans ma vie privée !
Voilà Dieu, dont vous parlez comme si vous le connaissiez mieux que tout le monde, le voilà qui vous débusque dans votre honteuse réalité ! Ha ! Ha !Ha !Ha... » Certains parmi ceux qui avaient vécu cette scène racontaient que des vieilles auraient siroté de la bière sur le conseil d'un vieil homme coquin, qui leur aurait dit que c'était bon contre la toux et les rhumatismes. Mais cela était faux, ce qui était vrai, par contre, c'est que cette fameuse nuit aura été le thème du prêche du vendredi. Les ivrognes en prirent pour leur grade. Offusqué au plus haut point, l'imam lancera l'anathème contre eux, et contre les parents, « dont certains sont ici parmi nous, qui auront failli dans leur mission, en n'éduquant pas leurs enfants ! », selon ses propres mots.


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