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Du mythe de l'Atlantide à la prophétie d'une mer au Sahara
Remontée des eaux dans la vallée du Souf
Publié dans El Watan le 22 - 12 - 2004

Le phénomène de la remontée des eaux dans la wilaya d'El Oued a de nouveau été évoqué, et le ministère des Ressources en eau a annoncé la réalisation d'un mégaprojet de 22 milliards de dinars pour mettre fin à ce problème, notamment la propagation des eaux usées dans les nappes phréatiques les rendant impropres à la consommation et à l'irrigation.
La ville aux Mille coupoles se trouve noyée sous d'autres chiffres moins enchanteurs : plus de 50 000 fosses septiques, plus de 2000 ghots, 1,5 million de palmiers noyés,... El Oued comme son nom l'indique veut dire la rivière. Et si c'était une prédestination inéluctable ? Cette remontée des eaux ravive les mémoires, les mythes et les légendes que l'on trouve dans les bibliothèques des érudits. Les Algériens se souviennent certainement d'un truculent Constantinois dénommé Bencherif qui créa un parti politique, en 1989, et évoqua le projet fantasmagorique de « mer intérieure ». On se moqua de lui dans la presse et les discussions de café. Par ignorance. Ce projet existe bel et bien et se réveille à l'attention de quelques rêveurs, pratiquement à chaque décennie. La vallée du Souf et de ses chotts aurait été dans des temps immémoriaux une mer intérieure donnant sur le golfe de Gabès en Tunisie. Les chotts sont les lacs salés collectant les eaux de surface. Les plus grands sont le chott Melhrir en Algérie et le chott El Djerid en Tunisie. Le bassin hydrographique du chott Melhrir est connu pour être le point le plus bas, moins de 40 m en dessous du niveau de la mer, recensé sur tout le territoire algérien. Il s'étend sur 8 wilayas (Biskra, Tébessa, Khenchela, Laghouat, Batna, M'sila, Djelfa et El Oued) et se distingue par un important cours d'eau, l'oued Djedi, avec de nombreux affluents dont les crues peuvent être dévastatrices. Le lit du chott Melhrir communique à l'est avec celui du chott Sellem. De celui-ci jusqu'au golfe de Gabès, situé à 320 km à l'est, on trouve une série de bas-fonds semblables, dont les plus importants sont les chotts Rarsa et El Djerid. Le bord oriental de ce denier n'est distant de la Méditerranée que d'environ 18 km. Creuser un canal qui permettrait à la mer de se déverser dans les chotts, pour y constituer (ou restituer) une mer intérieure « une Baltique de la Méditerranée », est une idée qui hanta plus d'un bâtisseur. Le projet le plus élabo ré fut celui d'Elie Roudaire, officier français à l'époque coloniale, qui reçut le soutien peu connu de Jules Verne, le prophète visionnaire du modernisme.
Jules Verne et le projet Roudaire
A partir de 1864, l'officier Elie Roudaire participa à l'élaboration de travaux cartographiques de l'armée coloniale. Chargé des nivellements géodésiques dans la région de Biskra, il formule alors l'hypothèse d'une mer saharienne qui aurait recouvert une grande partie du Nord-Sahara depuis le Sud des Aurès jusqu'au golfe de Gabès. Les « restes » de cette mer étant, selon lui, les chotts qui occupent cette région. Roudaire appuyé par un certain nombre de politiciens, de scientifiques et surtout par Ferdinand de Lesseps, le réalisateur du Canal de Suez, démontra :
La présence en ces régions d'importantes concentrations salines formant des croûtes ou, quand il y a de l'eau, des boues salées ;
la découverte de coquillages formant de véritables amas coquilliers autour des chotts et dans nombre de sebkhas ;
l'altimétrie négative de nombreux points situés dans ces chotts ;
le niveau des eaux aurait graduellement baissé sous l'effet de la sécheresse et de l'évaporation à une époque indéterminée. Selon Roudaire et ses défenseurs, le fameux lacus ou palus Tritonis mentionné par de nombreux auteurs tels Scyllax, Ptolémée, Pomponius Mêla et Hérodote n'était autre que cette « mer saharienne » aujourd'hui disparue. Avant Roudaire, bien d'autres avaient émis cette hypothèse d'une mer saharienne. Dès le XVIIIe siècle, l'Anglais Shaw avançait que la zone des chotts correspondait au lac Triton des anciens, sur lequel fut jeté le vaisseau des Argonautes. Par la suite, avec l'arrivée française dans cette région (prise de Biskra en 1844) et la découverte que le chott Melhrir est situé au-dessous du niveau de la mer, cette thèse sera défendue par de nombreux chercheurs. Au moment où l'on s'apprête à célébrer en 2005 le centenaire de la mort de Jules Verne dans les villes qui l'ont vu naître (Nantes en 1828) et mourir (Amiens en 1905), il est utile de savoir que L'invasion de la mer, inspiré du projet Roudaire, est le dernier manuscrit que Jules Verne a confié en octobre 1904, peu de temps avant sa mort, à son éditeur Hetzel et ne figure pas parmi ses romans les plus célèbres. Ce manuscrit n'est cité dans aucune de ses nombreuses biographies. Aujourd'hui encore, hormis quelques spécialistes, peu de personnes on lu L'invasion de la mer, un titre prémonitoire. Dans la plupart de ses œuvres, Jules Verne fut un prophète comme il le disait lui-même : « Ce que j'ai écrit sera réalisé à la fin du siècle. » Du ballon (Cinq semaines en ballon) à la fusée (De la Terre à la Lune), au sous-marin (Vingt mille lieues sous les mers) à la spéléologie (Voyage au centre de la Terre), à la notion de vitesse (Le tour du monde en 80 jours), cet auteur apparaît dans l'imagerie commune comme un visionnaire scientifique, comme celui qui « rend perpétuellement l'irréel croyable ».
LE MYTHE DE L'ATLANTIDE
Bien avant le projet Roudaire, il y eut le mythe de l'Atlantide qui fascina tant d'auteurs. Platon fut le premier à « découvrir » l'Atlantide, sans situer exactement son emplacement. Ce n'est que plus tard qu'il fut déduit que le Sahara fut une sorte de paradis terrestre, car il avait tout pour être une contrée florissante en ces temps reculés. On trouve dans le Sahara de grandes vallées d'érosion et des traces de végétation, ainsi que des traces de troncs pétrifiés et de végétaux arborescents. On trouve également la trace d'une mer intérieure au sud de l'Algérie et de la Tunisie. Cette mer de 400 km de long aurait été alimentée par une série de quatre fleuves : le Souf, l'Ighargar, l'oued Miya et l'oued Djedi qui sont en réalité les quatre fils du Nil. Les vestiges de la civilisation montrent que la flore y était des plus abondantes. On y trouve des dessins primitifs sur la pierre desséchée représentant des lions, des rhinocéros, des gazelles, des hippopotames et des caïmans. On peut trouver aussi en abondance des silex taillés sur les bords de ces anciens fleuves. Il y a aussi des traces de construction d'anciens canaux. A Mertoutek, dans le Sahara central à 2000 m d'altitude, on a trouvé des peintures rupestres représentant des hommes et des troupeaux de bœufs ; ces peintures sont comparables à celles que l'on trouve en Egypte. Ce qui tendrait à prouver une civilisation d'il y a plusieurs millénaires dans cette partie d'Afrique centrale. Elle fut sans doute l'ancêtre de la civilisation égyptienne dont le berceau fut le Hoggar, où des fouilles ont révélé l'emplacement de la tombe de la mystérieuse reine Tin-Hinan (Antinéa dans la littérature de l'Atlantide) toujours vénérée par les Touareg. On y a découvert, près du squelette féminin, de nombreux bijoux, colliers et bracelets d'or et une statue du style aurignacien. Ce squelette montrait une ressemblance avec la race Cro-Magnon, ce qui laisserait supposer que les habitants de l'époque de cette région étaient de grande taille, à peau blanche, aux cheveux blonds et aux yeux clairs, ce qui ne correspond en rien à des races africaines de la même latitude. Ils y seraient venus avant la séparation de l'Europe et de l'Afrique. En raison de tous ces avantages climatiques que ces végétations luxuriantes, ce pays fut donc considéré comme un eden, et c'est pour cela que l'Atlantide a toujours été considéré comme le pays idyllique. Les conteurs parlent souvent des contrées jadis florissantes, couvertes de cultures abondantes et de palmeraies entourant d'importantes villes. Il est possible qu'un mouvement tellurique ait dévié le cours du Nil de son ancien lit à celui qu'il a actuellement. De ce fait, le manque d'irrigation de cette partie de l'Afrique du Nord a désertifié toute la région et le Sahara est devenu le désert que nous connaissons maintenant. Deux récents ouvrages incitent à réexaminer le projet de cette mer intérieure, à la lumière des nouvelles connaissances scientifiques en la matière. Le réchauffement de la planète et la fonte des glaces polaires entraînent une montée graduelle du niveau des mers et océans. L'organisation d'un colloque de scientifiques et spécialistes algéro-tunisiens à El Oued ou à Tozeur sur l'éventualité d'une résurgence d'une mer au Sahara et ses implications géo-économiques serait la bienvenue.
Bibliographie à consulter
Aumassip G., 1991, Autour de la mer saharienne, Awal. Balland A., 1995, La mer oubliée. Paris, Grasset. Broc N., 1987, Les Français face à l'inconnue saharienne : géographes, explorateurs, ingénieurs (1830-1881) », Annales de géographie. Charles-Roux F. Goby J., 1957, « Ferdinand de Lesseps et le projet de mer intérieure africaine », revue des Deux Mondes. Coque R., 1990, « Les vicissitudes d'un mythe : la mer saharienne quaternaire », Sahara. Heffernan M.J., 1988, « A French colonial controversy : Captain Roudaire and the saharan sea (1872-1883) », The Maghreb review. Le Tolle R., Bendjoudi H., 1997, Histoires d'une mer au Sahara. Utopies et politiques. Paris, l'Harmattan. Marcot J.L., 2003, Une mer au Sahara, Ed. la différence, collection outre-mers Martins C., 1864, « Le Sahara. Souvenirs d'un voyage d'hiver », Revue des Deux Mondes. Roudaire E., 1874, « Une mer intérieure en Algérie », Revue des Deux Mondes. Roudaire E., 1877, Rapport à M. le ministre de l'Instruction publique sur la mission des chotts- Etudes relatives au projet de mer intérieure. Paris, imprimerie nationale. Valete J., 1977, « Le projet de mer intérieure du colonel Roudaire et la politique coloniale de la IIIe République », revue d'histoire maghrébine.


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