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Professeur Boualem Remini (Expert en hydraulique, à propos de la gestion de la période de l'après-crue à Ghardaïa) : « Les eaux ont rencontré des ouvrages obstrués d'ordures »
Publié dans El Watan le 12 - 10 - 2008

Boualem Remini est docteur d'Etat en hydraulique, docteur en géographie de l'université de Reims (Champagne-Ardennes). En 2006, l'Agence nationale des recherches universitaires (Andru) lui a décerné le prix de la meilleure publication scientifique sur l'environnement. Ayant dépêché une équipe de spécialistes pour l'étude de la crue du 10 octobre 2008, il revient sur l'événement d'un point de vue hydrologique, mais surtout met en garde contre tout empressement en matière d'aménagement de la vallée du M'zab.
En plus de ce qui a été dit, du point de vue hydrologique, peut-on avoir des éclaircissements sur les inondations qui ont touché la vallée du M'zab ?
Il a été estimé, tel que paru dans la presse, un débit de 900 m3/s, mais pour notre part, en se basant sur la méthode Manning Strickler ou sur la méthode de Schezy, nos résultats ont convergé vers un débit plus important estimé à 1200 m3/s. C'est énorme comme quantité d'eau. C'est une crue exceptionnelle puisqu'elle a atteint sebkhet Sefioune qui se trouve à plus 180 km environ de Ghardaïa. A Metlili, on a enregistré une hauteur de 6 m, alors qu'en aval de Ghardaïa, celle-ci a frôlé les 8 m. Dubieff, un climatologue et hydrologue français qui a travaillé plus de 40 ans sur la pluviométrie au Sahara algérien, retient le fait que si lors d'une crue les eaux atteignent sebkhet Sefioune, on peut considérer que celle-ci est cinquantenaire. Sur le plan chronologique, la première crue dévastatrice remonte à 1306, une autre exceptionnelle, date d'octobre 1884, mais celle du 30 septembre 1901 a été rapportée avec le maximum de détails, entre autres la hauteur de l'eau qui a atteint les 10 m. Comme par hasard, elle correspond au 30 septembre 2008.
Le tissu urbain a été mis en cause dans l'amplification de cette catastrophe naturelle. Est-ce tout à fait vrai ?
Il faut considérer la vallée du M'zab dans son intégralité pour pouvoir expliquer le concours de circonstances qui a produit cette ampleur de dégâts. Le facteur tissu urbain est un paramètre parmi d'autres. La donnée géologie du site est à considérer dans ce contexte. Il faut que les gens sachent que la région du M'zab est une région rocheuse. Le ruissellement est donc presque à 100%. Chaque goutte qui tombe sera ruisselée. C'est une des raisons qui a amplifié la puissance des crues de l'oued M'zab. Il y a aussi le fait que tous les oueds, cette fois-ci, ont fonctionné à plein régime : Labiod, Erguedane, Laadiret, Noumirt, oued Nssa. Au moment de la déferlante, il faut savoir que les eaux ont rencontré des ouvrages comblés d'ordures, des troncs d'arbres… Il y a des gens qui se demandent pourquoi les Mozabites ont créé leurs oasis dans la vallée ou carrément dans l'oued, et là, il faut voir, il faut lire et il faut bien travailler sur les oasiens et connaître leur région. Dans certaines régions du Sahara, riches en eaux souterraines, on peut créer des oasis à Foggara, comme par exemple à El Gourara ou à El Oued où on peut créer des oasis à Ghout (des cavités profondes pour permettre aux racines des dattiers d'atteindre l'eau), par contre à Ghardaïa, à l'époque, on ne maîtrisait pas la technique des eaux profondes, les conditions hydrogéologiques ne sont pas favorables pour réaliser des foggaras. La seule source d'eau qui était mobilisable c'était les crues, donc lorsqu'ils ont réalisé cet aménagement, ils ont installé leurs oasis à bord de l'oued M'zab.
Quels sont les impacts éventuels en cas d'aménagement raté dans la vallée du M'zab ?
Avant 1717, il y avait des crues qui avaient fait des ravages. Les Mozabites appelaient cet oued, El Ouahch (monstre), c'était considéré comme une fatalité. Le fameux fondateur du système hydraulique qui a permis d'exploiter ces crues au profit de l'irrigation et autres besoins et modérer leurs puissances, s'appelle Hamou Ould El Hadj. C'est un système complexe comprenant à l'amont des réseaux de dérivations de plusieurs oueds qui convergent, des manœuvres synchronisées de fermeture et d'ouverture des vannes de partage, des galeries souterraines, des conduites de distribution. Il faut donc considérer ce système dans sa totalité. C'est un système complet de l'amont à l'aval. Il n'y a pas mal d'intervenants qui proposent de faire des aménagements dans l'oued M'zab, de réaliser des digues, des recalibrages du profil de l'oued ou d'autres dérivations, etc. Il ne faut pas oublier que cet oued présente un patrimoine d'effort humain de sept siècles en matière d'aménagement et qu'il faut impérativement préserver. Ces intervenants qui vont procéder à l'aménagement de la vallée du M'zab doivent trouver un compromis entre préserver les vies humaines et assurer la durabilité du patrimoine hydraulique qui cumulent sept siècles d'expérience et de savoir-faire pratique. Il faut que les intervenants, en plus du savoir technique doivent cumuler une grande expérience dans la connaissance du M'zab. C'est facile de réfléchir à l'installation des digues à l'amont, mais peut-être allons-nous bousiller le phénomène de la recharge artificielle des soubassements des palmeraies. Il n' y aura plus aucune goutte d'eau qui va s'infiltrer au niveau de ces jardins florissants. Cette technique de la recharge artificielle a été, notons-le, créée la première fois au monde au niveau de la vallée du M'zab. Il y a peu d'études de crues qui ont été faites avec le maximum de détails. Le premier travail qui doit se faire avant de jeter l'argent du contribuable par la fenêtre, c'est l'étude des crues. Les crues dans la région du Tel, ce n'est pas comme les crues dans les régions arides. Ce n'est pas le même cas, l'oued M'zab présente, par ailleurs, un aménagement unique au monde. Il faut une équipe pluridisciplinaire, il faut des spécialités de la dynamique fluviale. L'oasien a réalisé des aménagements qui permettent le transport des sédiments fertiles et de les répartir sur les surfaces cultivées de telle sorte à ne provoquer ni d'intenses activités de l'érosion à l'amont des palmeraies ni de laisser le sol appauvri en matières organiques à l'aval. L'emplacement des digues ainsi que leur dimensionnement doit prendre en compte tous les paramètres climatiques, hydrologiques et hydrogéologiques du site, sinon les palmeraies mourront. Un dattier irrigué qu'avec de l'eau souterraine pure finira par céder, mais a-t-on remarqué, qu'après chaque crue les dattiers envahis par les sédiments renaissent. L'aménageur doit faire en sorte de garder l'équilibre écologique de cet écosystème en pérennisant les processus d'infiltration qui permettent l'irrigation permanente des dattiers, sachant que l'irrigation temporaire n'est effective qu'au moment des crues. Par ailleurs, les Mozabites, depuis plusieurs siècles, utilisent ces boues : la première couche pour la fertilisation de leurs terres et la deuxième pour la construction de leurs maisons.
Certains ont lié ce qui s'est passé à Ghardaïa au phénomène des changements climatiques. Qu'en pensez-vous ?
C'est très avancé comme hypothèse. D'après Dubieff, chaque 50 ans il y a une crue de ce calibre, mais à partir de 1969, on a remarqué qu'il y a une certaine fréquence de répétition qui nous a fait dire que ces crues, d'après les archives de la Protection civile de la wilaya de Ghardaïa, ont tendance à se produire chaque décennie. En raison de la taille plus ou moins réduite de l'échantillon de données enregistrées, nous ne pouvons pas établir des corrélations certaines entre ces événements et le présumé phénomène des changements climatiques. Il y a aussi l'activité du soleil qui connaît une certaine périodicité et donc il est tout à fait prématuré de prétendre établir des relations dans ce contexte. De 1901 à 2008, nous avons relevé environ une centaine de crues de différentes ampleurs.
Qu'allez-vous faire dans les prochains jours ?
On va effectuer cette semaine une deuxième mission au niveau de la vallée du M'zab. Il y a une équipe qui travaille sur site depuis quelque temps pour évaluer le tonnage des sédiments déplacés par la crue et il y aura incessamment des propositions. Je tiens à préciser que ce travail nous le faisons dans le cadre de la pure curiosité scientifique et nous nous prenons en charge nous-mêmes. Pour finir, je dirai que s'il y a une leçon à apprendre en matière de gestion de l'eau, c'est chez les Mozabites qu'il faut aller la chercher. Si on maîtrise les questions liées à l'eau comme les maîtrisent les Mozabites, on n'aura jamais de pénurie d'eau.


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