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Histoire vivante
Publication. Jours tranquilles à Ramallah
Publié dans El Watan le 18 - 12 - 2008

Gilles Kraemer est journaliste et enseignant chercheur en sciences de l'information. Né en 1965, il a enseigné à la faculté de communication de l'Université du Caire et a été responsable-adjoint de la coopération internationale au CFPJ de Paris (Centre de formation et de perfectionnement des journalistes).
Passionné par les questions euro-méditerranéennes, il a fait des recherches sur la presse francophone en Méditerranée et a publié notamment un ouvrage sur ce thème. De 2004 à 2007, il a dirigé le Centre culturel franco-allemand de Ramallah, en Palestine. Durant ces trois années passées en Cisjordanie, il était tenu d'observer un droit de réserve. Toutefois, il envoyait à ses amis, via Internet, ses impressions sur ce qu'il observait au jour le jour, ses réflexions personnelles sur les faits et les hommes en notant tout ce qu'il ressentait. Ces notes qui sont un véritable témoignage sur le vécu au quotidien des Palestiniens sont aujourd'hui publiées. Le ressenti à chaud de certains évènements historiques dans la région (et d'abord la mort d'Arafat), mêlé à des scènes tout à fait anodines et, à première vue, sans importance, donne aux cent quatre-vingt pages que forment Jours tranquilles à Ramallah (publié chez Riveneuve Editions) une forte signification. On y découvre d'abord la capacité extraordinaire des Palestiniens et des Palestiniennes à survivre au jour le jour à des situations souvent kafkaïennes qui deviennent leur lot quotidien. Gilles Kreamer souligne comment la révolte se mêle à l'humour, l'agacement au désespoir. Mais la vie doit continuer et elle continue ainsi que cela est montré symboliquement par exemple à travers la description de la végétation palestinienne ou des petits oiseaux qui prennent une importance remarquable au quotidien. Ces deux éléments révèlent de manière marquante à notre sens la fragilité et l'espoir et surtout le désir de liberté du peuple palestinien. En illustration de cette manière d'écrire, ce passage rédigé le 3 mars 2006 : « Deux chats roux batifolent dans les herbes folles de mon jardin. Je sais que Nabil, mon propriétaire, ne comprend pas que je laisse autant de liberté à tout ce qui pousse autour de la maison … J'ai préféré laisser le trèfle, les crucifères et les astéracées coloniser les espaces, former des plages, des bosquets, des ondulations parsemées de points dorés et mauves tandis que les feuilles des jonquilles jaunes et blanches tranchent en lames vert sombre. Le soleil dans un ciel stable annonce le printemps ». Cette description est révélatrice de l'état d'esprit de l'auteur de ce journal qui décrit l'absurde et l'injustice vécus à huis clos et exprime tout le désir de liberté d'un peuple en souffrance. Les check-points sont présents, humiliants, car la plupart du temps, ils ne sont là que pour exprimer la force et la mainmise des Israéliens : « Une jeep en travers de la route et quatre soldats qui ne font passer qu'au compte-goutte les femmes, les enfants ainsi que quelques vieillards… ». Les autres attendent, sans broncher, car les représailles peuvent être dures. Dans ces non-lieux, les Palestiniens restent dignes malgré des attentes qui durent jusqu'à deux heures, voire trois, et retardent tous ceux qui vont travailler, étudier ou rendre visite à d'autres membres de leurs familles. Gilles Kraemer rapporte comment, à l'un de ces check-points, une femme l'interpelle et lui crie : « Français ? Vous êtes Français ? Regardez ce que nous font les Juifs, regardez.
C'est comme ça tous les jours ! ». Devant de telles scènes, on comprend mieux l'ironie pertinente du titre du livre : Jours tranquilles à Ramallah, une ironie à l'image du ton et du style adoptés dans les textes. Ainsi, sur l'efficacité de ces points de contrôle : « Quant aux recherchés, des jeunes surtout, on imagine aisément que se pointant au détour de la route et constatant de loin le ruban d'embouteillage et les deux jeeps israéliennes, ils seraient bien curieusement inspirés de venir se jeter dans la gueule du loup pour, après deux heures d'attente en plein soleil, se laisser cueillir comme une fleur ! ». La sécurité devient une obsession. Au lieu de négocier et de trouver des solutions au conflit, les Israéliens construisent un mur qui est dénoncé à la candide dans une note intitulée ironiquement « Précis d'architecture » : « Moïse aurait-il tant souffert pour n'offrir à son peuple qu'une vaste carrière où l'on étête les montagnes, on tranche des voies rapides à vif dans les vallons, on écrase les terrasses d'oliviers pour dresser un mur de béton ? ». Le paradoxe est fort car au moment où on célèbre l'anniversaire de la chute du mur de Berlin, le silence est lourd autour de la construction du mur israélien long de 730 km ! Et pour montrer davantage le décalage entre deux espaces, la question du temps est mise en évidence. En effet, les territoires palestiniens et Israël s'inscrivent dans deux temporalités différentes. Les heures d'hiver et d'été ne sont pas les mêmes et ce fait en dit long sur le fossé qui sépare les deux parties d'une même terre. Le peuple palestinien veut vivre heureux mais l'intégrisme rôde et le peuple est pris en otage. Les autres courants continuent à résister mais, parmi eux, nombreux ceux qui veulent aujourd'hui partir. Gilles Kraemer n'est pas revenu indemne de cette partie du monde. Il témoigne d'un peuple palestinien qui garde la tête haute malgré la douleur. Le lecteur sent à travers ces pages la peine éprouvée par l'auteur qui rapporte sans ambages le décalage entre la politique, la diplomatie et le désir des Palestiniens de disposer tout simplement de leur Etat, ici et maintenant, et de reconquérir leur liberté, sans oublier les citoyens israéliens qui aspirent sincèrement à la paix et à la concorde. Ces notes, sans prétention, sans donner de leçons, décrivent des faits et n'auraient pas autant de valeur si elles décrivaient un autre lieu que la Palestine.
Jours tranquilles à Ramallah de Gilles Kraemer. Riveneuve éditions, Paris, 2008.


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