Première du genre dans la wilaya, cette rencontre a regroupé plusieurs générations de sportifs qui ont débattu de la situation du sport dans la région. L'APC de Tazmalt a organisé, le 29 juin dernier à la maison de jeunes, les assises du sport, initiant ainsi la première rencontre du genre à l'échelle de la wilaya de Béjaïa. A ces assises ont assisté d'anciens et d'actuels sportifs de la commune, des cadres du secteur, quelques personnalités sportives de la région, le président de la commission des sports de l'APW, ainsi que les élus et les autorités locales représentés par le maire et le chef de la daïra de Tazmalt, le maire de Boudjellil et le chef de la daïra d'Ighil Ali. L'objectif principal affiché était de tracer les orientations d'«une politique sportive moderne, réaliste et pérenne». En d'autres termes, il est question de réfléchir sur l'avenir du sport à Tazmalt en touchant du doigt d'abord son présent qui est fait d'une pratique sportive, que la réalité a rendue laborieuse, et de quelques résultats qui tiennent lieu d'exploits en l'absence flagrante d'infrastructures. «Tazmalt n'a pas d'infrastructures sportives». C'est le constat amer de tout le monde, y compris des autorités. La ville de Tazmalt, chef-lieu de daïra, dispose d'un stade communal qui a gardé son tuf jusqu'à dernièrement avec l'ouverture d'un chantier pour la pose, enfin, du tartan. Excepté ces travaux, cette vieille infrastructure est restée de très longues années en état d'abandon. «Il n'a pas changé d'un iota», témoigne l'ex-arbitre international Hocine Oulhadj, qui retrouve le même stade qu'il avait connu il y a des décennies. L'infrastructure est complètement dépassée par le temps, autant par son terrain de foot que par ceux de handball et volley-ball et sa voûte d'un autre âge. «SVP messieurs les responsables... !» Le club local de football, SRBT, qui souffre lui aussi d'abandon, est contraint d'évoluer à l'extérieur de ses bases, dans les communes voisines, pour ses matches et ses entraînements, ce qui l'embourbe dans les difficultés du championnat de division honneur et lui fait jouer le maintien. Et rien ne dit que le stade sera prêt à l'entame de la prochaine saison sportive. Certains parmi les anciens sportifs estiment qu'il est plus indiqué de verser ce stade communal au patrimoine de la DJS pour qu'elle puisse le gérer et le rentabiliser. «La commune n'en a pas les moyens», estime-t-on. La commune vit des maigres subsides des PCD et des adjudications de son marché hebdomadaire. Elle gère une faible bourse communale, d'où elle réserve une part d'à peine 3%, que se partagent insuffisamment une nuée d'associations sportives. «La solution est dans la création d'une zone industrielle», s'accordent à dire élus et habitants. Les assises ont permis de rappeler cette réalité où manquent non seulement l'argent mais aussi, et surtout, la volonté politique de s'occuper de la jeunesse. «La dernière infrastructure réalisée est le CSP, qui remonte à 1995» est-il rappelé. Depuis 23 ans rien, ni de la part des autorités de la wilaya, encore moins des autorités centrales. Pire, le peu qui existe a dépéri. L'on s'est accrochés à la promesse de l'ex- ministre de la Jeunesse et des Sports, Ould Ali Lhadi, de mettre la main à la poche et de décider de certains projets, dont une piscine. Ould Ali Lhadi évincé, son successeur, Mohamed Hattab, n'endosse pas les promesses de son prédécesseur. Bien qu'ancien wali de Béjaïa, Hattab ne connaît que trop bien la situation du sport dans la wilaya, avec ses disparités. «Nous rêvons d'avoir les moyens des grandes villes. Nous avons la volonté, mais nous manquons de tout. SVP messieurs les responsables... !», ont supplié trois jeunes enfants qui ont lu, dans les trois langues, kabyle, arabe et français, une lettre à l'adresse des autorités du pays. Des champions malgré tout Le manque de tout prend toute sa signification dans l'arrière-pays, dans les villages et hameaux. «Nous ne demandons pas du tartan, mais juste un gardien pour le semblant de stade que nous avons et qui est devenu un refuge de tous les vices», réclame le président de l'association du village Rodha. «La seule arme pour combattre les fléaux sociaux c'est le sport», plaide le vice-président du SRBT, qui vient de se doter d'une nouvelle équipe dirigeante. 25 CSA sont en activité dans la commune, dont la majorité a été absente aux assises. Le manque de moyens a poussé certaines disciplines vers leurs derniers retranchements, certaines ont disparu (basket, volley...), d'autres survivent (hand, foot...). Sous de tels auspices, de nombreux athlètes ont migré vers d'autres communes (M'Chedallah, Akbou, El Kseur...) en quête de meilleurs cieux. «Il y a énormément de difficultés, mais nous continuons à avancer», témoigne le boxeur Goumeziane Rafik, au palmarès étoffé (5 fois champion d'Algérie...) et qui cumule 16 combats professionnels. La boxe a enfanté plusieurs champions depuis son lancement au lendemain de l'indépendance. Et elle n'est pas la seule. Tazmalt compte des champions dans plusieurs disciplines. Les statistiques partielles, qui ne concernent qu'une dizaine de CSA, présentées lors de ces assises donnent 133 champions dans diverses compétitions nationales, régionales et continentales, 29 coupes de wilaya et d'Algérie, 53 médailles d'or, 23 athlètes internationaux... On s'enorgueillit aussi de compter de nombreux techniciens et cadres du sport issus de la commune dont trois présidents de fédération et un actuel membre d'une Fédération internationale. Des ateliers ont été installés pour réfléchir sur plusieurs axes, dont celui concernant la création d'un conseil communal des sports, qui demeure un organe consultatif, précise un cadre de la DJS. D'aucuns espèrent aussi que l'on redynamise la ligue communale des sports. En attendant que l'on communique aux autorités les recommandations de ces ateliers, cette rencontre «pourrait servir de modèle» aux mêmes assises que l'APW compte organiser sur le sport dans la wilaya. Tazmalt a donc pris une avance. Ces assises lui ont permis de prendre la pleine mesure des défis des jeunes qui gagnent des podiums malgré tout, en espérant que les pouvoirs publics leur prêtent attention.