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Souidani Boudjemaâ, une légende révolutionnaire
Publié dans El Watan le 19 - 02 - 2006

Avec la Révolution française et la Seconde Guerre mondiale, la guerre d'Algérie est de ces époques-là.» Signé, Service historique de l'armée de terre, en introduction de l'inventaire 1945-1967, Tome I (Château de Vincennes, 2000).
Cet éclair de vérité, soudaine, est la conséquence de l'adoption de la loi du 18 octobre 1999 autorisant l'expression «guerre d'Algérie», pour la séquence 1954-1962. Bienvenue à la guerre des mots !
Profitons des aveux de cette «Grande muette», énumérant les contingents engagés depuis la 3e République, pour rappeler qu'en terminologie polémologique ou en français banal une colonisation maintenue par un quadrillage militaire permanent se dit occupation.
Quel (le) gamin (e) de Guelma, dans la torpeur des vacances d'été, ne répétait dès l'âge de six ans, bien avant le premier coup de feu de 1954, il faut «sortir nos vainqueurs» (nissara) ?
Après, un rappel du contexte international et national post-1945, spécifique au Constantinois, nous illustrerons notre hommage par un portrait de Souidani, héros parmi tant d'autres, membre du «Comité des 22», assassiné le 16 avril 1956, en se rendant en mission, sur la route de Blida. Comme chacun le sait, la stratégie coloniale ne se pratiquait pas par des moyens identiques dans les trois départements. L'Algérois servait de vitrine administrative et présentait «tous les caractères d'une collectivité urbaine de type métropolitain».
L'Oranie, compte tenu de la promiscuité de nombreux Etats européens de Méditerranée, servait de creuset pour noyauter l'identité algérienne. Reste le Constantinois. Le bréviaire colonial pour le désigner est infini : sous-administré, département indigène, bouillon de culture de l'insurrection… et enfin, la palme «population hermétique à toute civilisation coloniale». Mais ces «hermétiques», hommes, femmes, jeunes et moins jeunes qui n'étaient pas profs à Sciences Po, n'en étaient pas moins de redoutables pédagogues, visités par le génie de la Libération.
Les activités des maquis (El Mahouna, Arris, Foum-Toub), la constitution des caches d'armes, documents du SHAT à l'appui, ne s'arrêtèrent jamais depuis 1945.
La chute de Dien Bien Phu est venue faire le reste. Le 8 mai 1954, la sonnerie aux morts, le sous-préfet, la main au képi et le regard penaud, le plaisir à peine contenu dans les yeux des indigènes, les enfants chuchotant dans les rangs des badauds, ce qui est arrivé à l'armée française, la veille en Indochine.
Plus tard, nous saurons que 28 000 hommes avaient été laissés dans la cuvette sous commandement de Bigeard et Lacheroy qui viendront, en Algérie, assouvir une tentation illusoire de revanche.
Une parenthèse, pour rappeler que l'engagement de la France en Indochine devait offrir une revanche sur la défaite éclair de juin 1940, sur la Meuse ; la répression de 1871/72, en Algérie, était une revanche sur le traumatisme de Sedan et l'invasion de 1830, une revanche sur les 32 divisions laissées à Waterloo et l'humiliant traité de Vienne de 1815. A défaut d'avoir pu «franciser» l'Europe, il fallait «franciser» l'Algérie. Le Constantinois va avoir droit aux honneurs militaires dus à son rang de «foyer de la dissidence». Chaque zone était subdivisée en secteur, sous-secteur, groupement de secteur, secteur autonome zone opérationnelle, groupement opérationnel. Lacheroy, fort de la débâcle d'Indochine, va se transformer en théoricien de la «guerre subversive» pour «écraser la rébellion» : services spéciaux, infiltration par des informateurs, tri et traitement des suspects et prisonniers par les DOP, etc.
Si Ali Lounici rappelle fort justement la participation des forces de l'OTAN, à la «pacification».
De Gaulle leur affirmait que le soldat français en Algérie était la sentinelle, en Méditerranée, contre le communisme, car les nationalismes nord-africains sont un simple avatar de la subversion communiste. «Pensés dans le contexte de la guerre froide, fondés sur le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, ces organismes devaient servir à préparer un repli français sur le théâtre d'Afrique du Nord après l'invasion de l'Europe occidentale par les troupes du bloc de l'Est.» Fin de citation (p. 21, cité supra).
Naturellement, le déséquilibre des forces en présence n'avait sûrement pas échappé au Groupe des 22, qui se réunissaient en août-octobre 1954 pour affiner le 1er Novembre.
L'été 1953, la police française avait assassiné l'un des organisateurs qui quadrillait le secteur de Souk Ahras, Hachani Madani. La coutume policière consistait à qualifier les militants de bandits de droit commun. Le lendemain, la police judiciaire, transportée sur les lieux pour dresser le procès-verbal de pure forme, s'était trouvée devant les murs de Souk Ahras recouverts d'inscriptions, au risque de provoquer un bain de sang : «Hachani Madani est mort pour sa patrie.»
Souidani Boudjemaâ, dont le père fut assassiné le 8 mai 1945, sortait à peine de l'adolescence, est entré en clandestinité et s'était immédiatement mis à l'œuvre de formation de jeunes orphelins de 1945, comme lui. Certains enfants n'ayant plus de parents étaient parqués dans les orphelinats sur les hauteurs de Guelma. Il arrivait à y pénétrer et les informait de la lutte qui continuait. Lors de leur sortie, ils racontaient ce que Souidani leur a appris. Ils ajoutaient toujours : «Souidani est très intelligent.» Naturellement, il avait toutes les polices du Constantinois à ses trousses. Il faisait échec à tous les pièges et barrages qui lui étaient tendus, par sa connaissance méticuleuse du terrain, sa mobilité et ses capacités de déguisement. Il était une vraie légende, il avait «le pas aussi silencieux que l'humidité». Quand la police l'attendait à Guelma, le lendemain, la ville bruissait des détails de sa visite. La maison de sa mère était surveillée jour et nuit, elle était continuellement harcelée : si elle aidait à son arrestation, on lui laisserait la vie sauve. Mais, à Guelma, qui avait peur de mourir ? Il n'y avait pas une seule famille qui n'ait assisté à l'arrestation, au convoyage d'un ou plusieurs de ses membres, par le marchand de spiritueux du quartier, le médecin du coin de la rue, le colon de la maison d'en face, qui se sont relayés pour les exécuter dans les campagnes environnantes. En plein été, les Européens partaient en vacances en métropole, et nous restions entre nous ou presque. Le soir, nous observions les colons, à l'opulence provocante, s'attardant à table, à leurs terrasses, sous les lumières. Souvent, pendant le repas familial, la voisine la plus âgée racontait comment elle avait suivi les suppliciés et son souvenir de celui qui a eu le temps de sortir un mouchoir de sa poche pour se couvrir le visage. Les enfants buvaient ses paroles dans un silence religieux. Le ciel à Guelma était très clair la nuit, balayé par les vents de Djebel Mahouna. En août, il pleuvait des moissons d'étoiles filantes. Les voisins dormaient au frais en plein air, et l'on entendait des voix de jeunes filles, de femmes faire des vœux : «Aidez-nous Dieu à avoir l'indépendance.»
Traditionnellement, les femmes ajoutaient un attribut à leur prénom pour spécifier leur engagement, par exemple «El Watania» pour celles qui affrontaient ouvertement la police ou «Ma Mbarka» pour celles qui avaient suivi les suppliciés sur le chemin de Sidi El Hadj Embarek. Les regards étaient lourds. Les cours intérieures des maisons bruissaient. Un joueur de flûte égrenait ses classiques, en berçant la ville au chair de lune. Les braises sous la cendre. Certains, silencieux, toujours stationnés aux endroits panoramiques de la ville, ne perdaient rien de vue, telles des statues de commandeur : Boukharouba père, vêtu de sa kachabia, été comme hiver ; l'imam Bouzaheir en tenue blanche immaculée ; l'emnafga mère de Souidani, torche vive drapée dans sa mélaïa noire. Aucune pellicule, aucune focale, aucune page ne pourra rendre fidèlement ces images sculptées sur le cristal d'une mémoire enfantine.
Le 1er novembre, Souidani avait rejoint Alger. Le 16 avril 1956, la radio annonce sa mort vers 17 h. Il se rendait à Blida en scooter. La police avait mis longtemps à l'identifier, croyant qu'il lui avait échappé, une fois de plus, et avait tué un fils de colon à sa place.
Les Républiques successives françaises n'étaient pas des dictatures militaires. C'est la responsabilité pénale des exécutifs successifs qui se trouve engagée pour avoir ordonné cette férocité sanglante, abusant de leur suprématie technologique contre un peuple désarmé, sous domination depuis plus d'un siècle, avec la complicité active des organes législatif et judiciaire, réputés, pourtant, indépendants du pouvoir exécutif. Enfin, il n'échappe pas à un observateur avisé que la plupart des exécuteurs des basses besognes ont appliqué en Algérie les méthodes de la Wehrmacht, de la Gestapo et de la Propaganda Staëffel, censés avoir combattu chez eux : Chataigneau, Achiary, Soustelle, Lacoste auraient lutté pour la France libre, mais ont joint leurs actions à celles du petit tâcheron de la Collaboration, Papon ou du vichyste Mitterrand, décoré de la Francisque à sa demande. Le peuple algérien a écrit avec son sang la page d'histoire de la libération de sa patrie. Les héritiers de ces aïeux légendaires ont l'obligation impérieuse, aujourd'hui, de veiller à la reconnaissance de leur immense sacrifice. D'ailleurs, de nombreux Français, illustres ou anonymes, de toutes les classes d'âge, en hommage aux réfractaires à la doctrine coloniale, expriment leur soutien à la légitimité de leur revendication. Aucun traité d'amitié ne peut s'édifier sur «des décombres» (terme emprunté à une belle image d'Alistair Horne).
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