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Clio et les huit autres muses, rendraient-elles l'histoire plus humaine ?
Ode antique pour une année nouvelle
Publié dans El Watan le 10 - 02 - 2005

Dans la nuit du mercredi 2 au jeudi 3 février 2005, les Neuf Muses au grand complet s'étaient donné rendez-vous. Cette nuit-là, dans la salle du Congrès US, le programme était quasi sacré : le discours présidentiel sur l'état de l'Union.
L'union de l'Etat dans toutes ses composantes, rendait nécessaire la complicité des Neuf Sœurs ensemble, réunies depuis un âge ancien, neuf sœurs illustres et surdouées pour « vendanger l'hymne jaillissante », « inventant la figure inextricable » d'un présent recommencé. L'hymne a jailli sur fond de bannière étoilée de l'Union Jack, la main sur le cœur et le Christ en tête. C'est toi, Euterpe, qui a donné le la, rythmant la cadence d'une parole laudatrice, louant la généreuse Amérique promettant de battre le pavé du monde pour mener une nouvelle croisade contre le mal sur son axe oriental. Le Verbe était haut, « tout impatient de la fureur de frapper la première mesure. » L'Ennemi était à la porte. Syrie, Iran, qu'importe ! Quel que soit son nom et son identité, Il était l'Orient terroriste, réfractaire à la rengaine douce et démocratique. L'Autre ! L'Enfer ! La Dictature ! Les peuples de là-bas, opprimés, maltraités. Les pauvres, ces impuissants ! La parole occidentale qui naissait, s'animait, et dans le bruit des consonnes qui avalaient les faibles voyelles, j'ai reconnu Erato, la muse élégiaque qui modulait le cri jusqu'à lui faire atteindre les sommets de la symphonie héroïque. Le crescendo était assuré par la chère Polymnie qui s'était juré de transporter la salle jusqu'au seuil de la transe jubilatoire. Une Union sacrée pour un Etat mondialement américain. Trois des neufs muses avaient assuré l'ambiance pure, exorcisant les démons, électrisant l'orchestre lyrique. L'action patriotique avait trouvé ses accents fondateurs. Il ne restait plus qu'à faire entrer les acteurs. La Tragédie tout naturellement trouva sa place. Clio, la première, apparut en compagnie de deux femmes, l'une Irakienne, l'autre Américaine. Avec toi, Clio, l'histoire devenait humaine, pathétique. Deux femmes ennemies réconciliées, embrassées, l'une, Américaine avait donné son fils, un GI mort au combat, pour que l'autre, une Irakienne, puisse voter. Les congratulations symboliques donnaient raison contre tous au deuxième mandat présidentiel. L'Occident et l'Orient accordés à l'harmonie universelle. L'Orient (une partie, en attendant le reste) pestiféré avait rejoint le troupeau sous la houlette du bon pasteur. Réplique exacte, mais en sens inverse, d'une « vieille » Europe qui découvre, colonise, invente un nouveau monde à son image à partir du XVe siècle. Depuis, le nouveau monde s'était fait vieux, il avait compris les leçons du passé. A son tour, il était allé croiser le fer en Orient contre l'infidèle Irak, et il s'apprêtait à le rendre à son image, moderne et démocratique. Toute une histoire résumée en une image. Magique.
Une figure inextricable
Je reconnais bien là le travail d'Uranie qui a mis sa main dans celle de Clio pour montrer que l'histoire qui se répète s'appelle Destin, inscrite dans les étoiles par tous les temps. Mais la muse de l'histoire et celle de l'Astronomie n'auraient pu réussir l'instantané miraculeux sans Melpomène qui préside toute séance tragique. C'est toi, Muse de la tragédie, qui a lancé ces deux femmes dans les bras l'une de l'autre, dans le silence et dans les pleurs. Pathétique. Quel talent ! ma hiératique Melpomène. Six muses antiques assuraient la réussite du show en ce soir du 2 février 2005 à Washington. Ensemble, elles étaient venues « vendanger l'hymne jaillissante, inventant la figure inextricable ». L'hymne jaillissait à la gloire de la démocratie, et la figure restait inextricable comme ces deux femmes qui n'arrivaient pas à s'extraire de leurs bras réciproques. L'une exhibait encore, en un geste presque obscène, son doigt taché d'encre, et l'autre ne montrait rien, le cadavre de son fils restait clandestin pour couper court au syndrome vietnamien, à la vision des soldats revenus chez eux, ficelés dans du plastique noir. L'encre visible sur le doigt irakien était-elle noire ou bleue ? Rouge peut-être d'un sang invisible sur la scène. Figure inextricable. L'encre de mon doigt pour la mort de ton fils. Du mauvais Shakespeare. Presque comique. Thalie, la muse de la comédie, hésitait à se présenter sur le plateau lorsque soudain, Terpsichore, la muse de la danse s'avisa de dire au président de faire une contorsion. La tête lentement se tourna sur le côté, un regard appuyé du côté des pleureuses, sous l'œil d'une caméra complaisante. Et que croyez-vous que le grand homme fît ? Il pleura. Une larme de trop, et la tragédie tourne à la comédie. ô sages Muses ! sages sœurs ! vous en avez trop fait ce soir-là. Calliope elle-même, la dernière d'entre vous, la Muse de l'éloquence, en perdit la voix. Le comble ! Un soir de discours sur l'état de l'union. Alors, il a bien fallu sauver la situation. La dixième des Muses a quitté le banc de touche. La folle, la Ménade, « la Bacchante roidie dans le dieu tonnant », celle qu'aucun hymne ne garrotte, s'est lancée sur la scène. Elle était femme, Irakienne d'Irak, fulminant sur les ruines de sa maison pulvérisée par les bombardiers américains. Je la vois, entre deux images sur Euronews, et je la fais hurler, le bras accusateur, les mains ouvertes, propres malgré la poussière : « C'est ça, votre démocratie ? Où vous croyez-vous ? Chez des barbares ? Vous êtes venus de nulle part, et vous n'avez nulle part votre place dans l'une des plus vieilles civilisations du monde. » Grief et revendication. La dernière des Muses, celle que personne n'attendait, a sauvé la tragédie. Action resserrée. Unité de temps et de lieu. L'histoire, l'art et la manière, tout était réglé jusqu'à atteindre la perfection. Les Neuf Muses s'étaient fourvoyées, loin de chez elles, un soir de février 2005. Elles auraient dû rester en Orient. C'est là qu'elles sont nées. Ailleurs, elles meurent si on les ampute du dixième doigt de leurs deux mains unies comme des Sœurs. (Avec la collaboration de Paul Claudel et de l'Actualité).


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