Simon Blumenthal, avocat français à la retraite et militant des causes justes, a passé plusieurs années à la prison de Fresnes pour son soutien au FLN durant la guerre de libération. Présent la semaine dernière en Algérie, à l'occasion de la tenue du colloque international sur « La problématique de la libération et les défis internationaux actuels », il nous livre, dans cet entretien, sa vision par rapport à la mondialisation, surtout la mainmise des Etats-Unis sur les affaires du monde. Quelle est votre position par rapport à la mondialisation ? Il ne s'agit pas d'être avec ou contre la mondialisation. L'important est plutôt de savoir quels sont les objectifs assignés à ce nouvel ordre international, et ce, pour mieux s'armer. Car il faut savoir que la mondialisation va ériger des puissances financières internationales auxquelles les Etats vont devoir se soumettre. D'où la nécessité d'élaborer, à temps, des réponses et des solutions pour tenter d'atténuer les effets négatifs de ce phénomène mondial. Mais comment atténuer les effets néfastes de la mondialisation ? Aujourd'hui, les Américains et leurs alliés tentent de s'imposer comme la seule alternative dans le nouvel ordre mondial. Or l'Union européenne, malgré ses incohérences, s'imposera sur la scène internationale. Cela sans oublier que la Russie est en train de se redresser et que le géant chinois devient de plus en plus une puissance, économique surtout, que Washington ne peut ignorer. Ces entités sont de nature à pondérer les prétentions américaines. C'est-à-dire effacer, peu à peu, l'idée selon laquelle l'unipolarisme est inéluctable. Mais comment en est-on arrivé là ? Il faut savoir que les Américains ont favorisé, encouragé et alimenté, durant des années, l'émergence de mouvements extrémistes religieux, notamment islamiques, pour contrer le communisme de l'époque URSS. De même, ils ont mis en action des mouvements nationalistes pour maintenir certains Etats dans une situation de fragilité structurelle et permanente. La chute de l'empire soviétique a mis le monde dans ce qu'on appelle aujourd'hui l'unipolarisme. C'est-à-dire que les Etats-Unis sont devenus, par la force des choses, les gendarmes du monde. Surtout après les attentats du 11 septembre 2001 où la lutte contre le terrorisme sert de prétexte pour imposer une vision unilatéraliste dans la gestion des affaires internationales. Quel est alors le sort des Etats nationalistes ? Le grand problème des pays en développement est de compter trop sur l'extérieur et de croire qu'il peut leur apporter toutes les solutions à leurs multiples et souvent complexes problèmes. Or quand on voit l'exemple de la Chine, on est tenté de dire que la volonté manque à ces pays pour vraiment s'en sortir et préserver un tant soit peu leur souveraineté, notamment sur leurs richesses naturelles et les potentialités de leurs ressources humaines. Il faut donc ne compter que sur soi, avoir du courage et de l'opiniâtreté. C'est la seule manière pour ne pas être totalement écrasé par les effets pervers de la mondialisation.
