Le gouvernement s'est trouvé une nouvelle passion, la réglementation. C'est dans l'air du temps, les gens auront d'ailleurs remarqué que le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a une tête de règlement intérieur. Le port d'Alger, les banques, les importations ou le permis de conduire sont soumis à de nouvelles règles, non négociables, destinées à tout conformiser, le service, l'opération ou le produit, voire à réglementer le consommateur lui-même, passablement dérèglementé. Dans un pays où des secteurs importants ne sont pas réglementés, comme l'urbanisme, la justice, l'hygiène ou la dépense publique, l'attitude peut paraître déplacée. Un peu comme si le propriétaire d'une maison en flammes demandait aux pompiers de s'essuyer les pieds sur le paillasson avant d'entrer éteindre le feu. Pourtant, un pays a besoin de réglementation et de contrôle, et même l'Algérie, ex-terre de pirates (presque) repentis, est obligée d'y venir. Sauf qu'elle y vient par le bas, la réglementation n'étant obligatoire que pour les petits, et que d'un autre côté, cette réglementation ne devrait être valable que si tout le reste suit. A Oran, des écoliers ont été renvoyés pour avoir mis un tablier non réglementaire. Les parents d'élèves ont protesté, expliquant qu'ils n'ont pas trouvé ce tablier, ce à quoi a répondu le marché (non réglementé) en expliquant que ces tabliers existent au noir, à 800 DA pièce. M. Benbouzid réglemente donc les tabliers mais pas le nombre d'enfants par classe, par exemple, qui est non seulement aléatoire (non réglementé) mais de plus en plus grand. On dit que c'est le ministre de l'Education qui a dessiné les tabliers, en tant que designer de l'école algérienne, ses premiers modèles ayant été conçus avec de la peau d'élèves exclus du système scolaire. Rumeur bien sûr. Mais comme l'information est trop réglementée, il faut déréglementer la rumeur.
