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Poèmes au-delà du Mur
Cinéma-Le temps qui d'Elia Suleiman
Publié dans El Watan le 09 - 10 - 2009

Cette œuvre palestinienne marquante a été l'un des moments forts des JCA.
Elia Suleïman n'a rien oublié des Palestiniens de 1948. Il a gardé le souvenir de ces soldats israéliens attaquant un village du côté de Nasirah, dans El Jalil. Fouad, son père, a tenté, avec d'autres jeunes, de résister aux occupants. Ce n'était plus possible face à une armée bien entraînée par les Anglais. Le maire, coiffé de tarbouche rouge, capitulait avant d'être « invité » à se faire prendre en photo avec les nouveaux maîtres. Les soldats israéliens marchaient avec la keffieh sur la tête dans les rues sinueuses et silencieuses du village. Ils voulaient créer la confusion. C'était le 16 juillet 1948, le début d'une longue histoire... Dans Le Temps qui reste (The Time That Remains), projeté mardi soir à la salle Cosmos, à Riadh El Feth, à la faveur des premières journées cinématographiques d'Alger, Elia Suleïman a relu les carnets de son père (mort d'un cancer) et les lettres de sa mère.
Du coup, l'œuvre ressemble à une autobiographie poétique. Jeune et vigoureux, Fouad Suleïman, joué par Saleh Bakri, tente, dans un village envahi, de bricoler des armes. Mais pour qui ? Les autres ont lâché prise, lui reste fier... Il est vite repéré par les militaires israéliens qui lui bandent les yeux, ligotent ses mains derrière le dos et le mettent à genoux dans un champ d'oliviers. Il est parmi des dizaines d'autres prisonniers. Ces images rappellent curieusement celles vues à Guantanamo Bay ! Les soldats vident les maisons du village, l'un d'eux met en marche un gramophone : la voix de Leïla Mourad, chanteuse égyptienne d'origine juive, se lève : « Ana, qalbi dalili, kali bithibi » (mon cœur, mon guide, m'a dit que tu es amoureuse)... le mouvement des militaires ressemble à des gestes de théâtre. C'est l'une des marques de fabrique de Elia Suleïman, justement. « Je me balade beaucoup, je regarde et je m'imprègne de ce que je vois. J'aime les arts de la scène, j'aime les mouvements des corps », a-t-il toujours dit.
Des scènes sublimes
Et puis, le temps passe... Le petit Suleïman, qui ne parle pas dans le film, dit pourtant des « choses » qui déplaisent au directeur de l'école. « Qui t'a appris à dire que l'Amérique est colonialiste ? Que l'Amérique est impérialiste ? ». Les questions du directeur ne trouvent pas de réponse. Le petit Suleïman préfère regarder ses souliers. Il se fait un malin plaisir de jeter dans la poubelle le plat de lentilles d'Olga, la voisine israélienne. La mère, incarnée par Samar Tanus, ne cesse d'écrire à sa cousine Nadia, réfugiée en Jordanie. Olga, elle, entre comme elle veut et quand elle veut chez ses voisins. Elle sait tout. Fouad fume sans arrêt. Sa santé en prend un coup. Le soir, il pêche comme s'il cherchait quelque chose dans la mer obscure. La pêche se fait pourtant sous surveillance militaire. Chaque soir, la patrouille arrive et pose la même question : « Alors, ça mord bien ? ». Le compagnon de Fouad répond toujours en hébreu, comme pour rassurer les militaires. La méfiance à l'égard des Palestiniens de l'intérieur n'a jamais cessé. La police débarque chez Fouad Suleïman et l'accuse de faire de la contrebande d'armes vers le Liban.
Une police qui prend du bourghol (blé concassé) pour de la poudre d'explosif ! Elia Suleïman adore se moquer de la simplicité, de la violence et de l'obsession sécuritaire mais sans forcer le trait. L'humour n'est jamais loin. Il y a par exemple, ce voisin ivre qui, habillé en pyjama, menace chaque jour de s'immoler mais qui ne le fait pas. Il se dit désespéré. Et puis, le temps coule… Elia Suleïman (joué par lui-même comme il l'avait fait dans Chronique d'une disparition, en 1996) revient à sa maison, située en haut d'un jardin, beau quartier quand même. Un policier qui fait de la vaisselle, y habite. Un Palestinien ? Un Israélien ? Le policier l'accueille et lui offre un plat de taboulé. Elia est revenu rendre visite à une mère malade. Une mère qui s'installe au balcon, qui prend tranquillement son café et qui ne fait même pas attention à un feu d'artifice lointain. Une mère silencieuse comme Elia. Il l'a regarde presque en continu. Regard mélancolique. La mère, chrétienne, attend la mort. Elle est déjà dans l'au-delà, dans les jardins du Ciel... Elia se rend à Ramallah dans les territoires palestiniens. Il voit au loin un jeune sortir d'une maison pour déposer un sac dans la poubelle.
Le jeune homme, qui prend rendez-vous au téléphone avec son copain pour la soirée, est menacé par le canon du char d'assaut Merkava. Un canon qui suit mécaniquement le mouvement du jeune. La scène est sublime et se passe de commentaire, exactement, comme cette autre scène où l'on voit Elia sauter, à la perche, le fameux mur de séparation. Alors, l'espoir est-il permis ? Mais, en fait, en quoi et en qui ? « La seule issue possible serait qu'Israël apprenne à exister comme un Etat qui comprendrait le peuple israélien, bien sûr, et serve tous ses citoyens démocratiquement, égalitairement. Ce qui implique de tenir compte du million de Palestiniens qui y vivent et qui devraient bénéficier des mêmes droits, y compris le droit à leur identité historique, c'est-à-dire la reconnaissance de l'existence du peuple palestinien », a déclaré le cinéaste palestinien au quotidien français de gauche, L'Humanité. A Ramallah, dans un club, les jeunes dansent.
En bas, un soldat israélien crie sans être entendu : « C'est le couvre-feu. » La musique est plus forte que l'ordre militaire, l'ordre des puissants. « Mon film parle du passé, mais son titre, Le temps qui reste, regarde l'avenir, pas seulement de la Palestine, mais du monde. Et je crois qu'on a très peu de temps, s'il n'est pas déjà trop tard pour sortir de notre distraction égoïste, pour être vrais, pour agir bien », a confié Elia Suleïman, lors de la présentation de son long métrage au dernier Festival de Cannes. Ce cinéaste anticonformiste, de 49 ans, a toujours irrité par ses propos. « La Palestine, c'est un concept, pas un pays. Ce n'est pas un chez-soi. Je n'y suis pas chez moi. En d'autres termes, je n'ai aucun sens de ce qu'on appelle s'établir », a-t-il dit un jour, suscitant des critiques. Pourtant, ce réalisateur, acteur et scénariste, a une démarche artistique qui puise dans l'absurde, un peu dans le cynisme et qui rappelle légèrement celle de l'Américain Buster Keaton au flegme célèbre.
Comme Keaton, Elia Suleïman ne rit pas, ne sourit pas, n'exprime presque aucune sensation dans ses rôles, sauf celui de regarder et d'observer… Cette démarche a été démontrée avec éclat dans Intervention divine (Yadoun ilaheyya), sorti en 2002 et qui a obtenu le prix du jury et de la critique internationale au Festival de Cannes. Elia Suleïman ne fait pas dans le compliqué philosophico-mathématique. « Je cherche à recréer des petits moments de vie. Je prends des quantités de notes sur les choses simples de la réalité quotidienne, comme le souffle du vent sur un arbre, et cela forme un terreau d'images et de sons où mon film pourra prendre racine », a-t-il confié dans l'une de ses interviews. Pour lui, chaque vie est un territoire poétique...


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