Trajectoires de l'immigration clandestine en France : « Le phénomène des harraga entre les deux rives de la Méditerranée – le cas des Algériens ». C'est le thème qui, en Algérie ou ailleurs, fera pour la première fois l'objet d'une recherche dans le cadre d'une thèse de doctorat. L'auteur de cette recherche est la jeune Rim Otmani, étudiante en sociologie à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) de Paris – rattachée au centre Maurice Halbwachs (CMH/EHESS/CNRS/ENS) – et membre de l'Equipe de recherche sur les inégalités sociales (ERIS). Pour elle, qui est originaire de Annaba, capitale où est né et a grandi le phénomène des harraga, le choix de ce thème est très personnel. C'est une continuité de sa recherche entamée en mastère II intitulée La France face à l'immigration irrégulière : les sans-papiers algériens entre l'imaginaire et le réel. « Après plusieurs mois passés auprès des sans-papiers algériens et des migrants algériens en situation régulière (1re, 2e et 3e générations), des associations et organismes militant pour la cause des sans-papiers, le contact avec la réalité a suscité en moi le désir de poursuivre des recherches approfondies, dans le cadre d'une thèse de doctorat, afin d'apporter une petite contribution pour l'avancement des connaissances dans le domaine de la sociologie de migrations, notamment en ce qui concerne la recherche scientifique de notre pays », nous a-t-elle dit lors de sa visite à notre rédaction à Annaba. En étudiant les champs de la sociologie des migrations, elle affirme avoir constaté qu'il fallait aller plus loin dans les recherches en rapport avec les nouvelles politiques d'immigration qui sont instaurées par l'Europe, particulièrement par le gouvernement français. Pour cela, elle estime intéressant d'explorer, à partir de l'histoire, de la sociologie, de l'anthropologie et des sciences politiques, le problème de l'immigration clandestine en France en restituant les trajectoires de cette immigration à partir du cas des Algériens. La migration a toujours été le centre d'intérêt de plusieurs chercheurs et politiques ces dernières années. Phénomène social dont l'importance a varié dans le temps et l'espace, la migration en général et celle des jeunes en particulier est devenue omniprésente dans les sociétés contemporaines. L'Algérie ne fait pas exception à cette observation, considère la doctorante qui ajoute que le cas de son voisin de quartier Ikram Hamza, le jeune harrag ayant péri dans le drame vécu par les 24 harraga en août dernier sera particulièrement traité dans son étude. Après avoir fait l'état des lieux des travaux, elle a choisi d'étudier le phénomène autrement que sous l'angle essentiellement politique sous lequel il a été traité jusqu'alors par bon nombre de chercheurs. Les résultats de ses lectures et de ses réflexions s'étendent à partir de l'histoire des migrations algériennes en France, jusqu'à l'exposé des théories sociologiques qui expliquent l'attrait de la France et l'obsession du rêve européen. Pour Rim, l'émigration algérienne est une émigration exemplaire en ce qu'elle est la première en date des grandes migrations coloniales. Toutefois, étudier l'émigration-immigration des Algériens en France suppose, par ailleurs, un incessant travail de terrain des deux côtés de la Méditerranée. Le phénomène d'« el harga » est désormais un problème délicat auquel se trouvent confrontés les Etats de cette région, conclut Rim.
