Rome De notre correspondante De mémoire de catholique, on n'avait vu une fumée aussi blanche. Même dans un ciel aussi brumeux que celui de cette journée pluvieuse, les volutes émanant de la cheminée du toit de la chapelle Sixtine étaient très visibles et blanches comme neige. Pour lever toute équivoque, les officiants de la basilique Saint-Pierre ont ajouté de généreuses quantités d'agents fumigènes au feu des bulletins de vote des cardinaux électeurs. Le 266e souverain pontife et évêque de Rome a été élu par 77 voix, comme le veut la tradition. Le conclave secret, qui s'est ouvert mardi soir, aura duré un peu plus de 24 heures, temps record dans l'histoire de la papauté. Il aura donc fallu cinq scrutins pour choisir le cardinal qui régnera sur l'Eglise catholique après la démission surprise de Benoît XVI. Depuis le 11 février, lorsque l'Allemand Joseph Ratzinger avait renoncé à poursuivre sa mission, sous la pression des scandales et jeux d'influence qui agitent le Vatican, toute l'Italie se demandait qui allait lui succéder. L'attente a paralysé toute la péninsule et des milliers de fidèles et de touristes, environ 70 000 avaient afflué, dès hier, vers la capitale italienne pour assister à l'événement historique. Depuis l'ouverture du conclave, mardi après-midi, et pour ne rien perdre de l'événement, les journaux télévisés avaient été constamment diffusés avec pour fond, derrière la présentatrice, un grand plan sur la cheminée de la chapelle Sixtine, attendant d'y apercevoir la fumée à tout moment. Et c'est à 19h06 que la fumée tant attendue a été aperçue, provoquant des scènes de liesse parmi les présents amassés sous la pluie, place Saint-Pierre. Après 2000, le cardinal protodiacre (doyen), le Français Jean-Louis Tauran, a prononcé la solennelle phrase : «Habemus Papam» (nous avons un pape). C'est l'archevêque de Buenos Aires, Jorge Mario Bergoglio, un jésuite, qui sera le nouveau pape. A 76 ans, ce prélat, connu pour sa simplicité, est le premier pape sud-américain de l'histoire de l'Eglise catholique, ce qui représente une rupture avec le passé de la papauté européenne. Connu pour sa grande humilité et son austérité, il utilise les moyens de transport public pour ses déplacements en Argentine, et ne porte pas la calotte rouge des cardinaux, Bergoglio est très apprécié dans son pays et ailleurs. Ses premiers mots ont été : «Prions pour la fraternité.» Le nouveau souverain pontife, d'origine italienne (Piémont), qui a choisi de s'appeler, François I, devra relever des défis lourds et mener une Eglise éclaboussée par les scandales vers des lendemains meilleurs. L'Allemand Ratzinger avait abdiqué sous le poids de cette pénible mission.