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La Nation et ses ennemis
Publié dans El Watan le 29 - 05 - 2016

J'ai quelque peu hésité sur le titre à donner à ma présente contribution. Fallait-il parler d'Etat ou de nation ? Au final, dans ce monde qui est le nôtre, où tout se confond, où tout s'entremêle, Etat-nation, pouvoir-régime, parti-clan, pouvoir-opposition, leader-parrain, opposant-ennemi, laudateur-nationaliste, convient-il de s'interroger sur l'usage du scalpel lorsque la hache est de mise ?
Lorsque les hommes se mettent à se confondre avec l'Histoire qui les a faits, lorsque les lois qui régissent la chose publique et la vie en société sont bafouées, lorsque les individus se substituent aux institutions qu'ils sont censés servir, lorsque le vulgum pecus s'érige en tribun et s'arroge le droit de haranguer l'élite, la politique perd de son essence et est échue au rang de «travail», avait postulé H. Arendt dans sa hiérarchisation des activités humaines, considérant que, si le travail permet à l'homme de vivre, c'est dans l'action que s'exerce pleinement sa liberté et que, par son biais, il entre dans le monde politique.
Et, c'est parce qu'agir signifie, au sens large du terme, prendre une initiative, entreprendre, mettre en mouvement, que la politique a ses règles et que sa pratique ne saurait se passer des valeurs censées la caractériser. A défaut, le grain de sable serait en droit de s'ériger en erg, voire d'en revendiquer l'immensité.
C'est dire que, quelles que soient les conditions, les confusions énoncées ne sauraient trouver une quelconque légitimation, car ne s'inscrivant dans aucune logique de gouvernance saine. Néanmoins, en ces temps d'agitation extrême, les raccourcis semblent emporter la mise dans la dynamique sociale et les confusions font désormais office de certitude. Ce faisant, croit-on, sincèrement, que ce peuple est naïf au point de gober tout ce qu'on lui sert ?
Interrogeons l'histoire pour nous rendre compte que ce peuple ne saurait être, en aucune manière, dupe. Si 132 ans de colonisation ne lui ont pas fait oublier ses origines, c'est que son socle identitaire est ferme et solide. Si les hordes fondamentalistes, encouragées et soutenues autant par l'Occident que par l'Orient, n'ont pas pu avoir raison de lui, c'est qu'il sait discerner entre bonnes et mauvaises causes. Si les «printemps arabes» ne l'ont pas entraîné dans leur sillage, ce n'est pas tant par lassitude, comme on s'est précipité pour expliquer sa posture, c'est, fondamentalement, parce qu'il a suffisamment muri.
Que l'on se détrompe, s'il n'est plus sensible aux chants des sirènes — d'où qu'ils viennent —, c'est parce qu'il cultive toujours l'espoir de voir la raison l'emporter sur les passions des acteurs politiques, le souci du devenir de la nation, l'emporter sur les ambitions individuelles. Il s'arme de sagesse et cultive l'espoir, pour que ses jours à venir ne soient pas une éternelle reproduction de son amer passé lointain et récent. Sa vigilance est d'autant plus grande, qu'échaudé par ce qu'il a vécu, par ce qu'il a enduré, il craint que les abus dont il est spectateur — faussement passif, car conscient qu'il y va de son sort et de celui de sa descendance — ne soient exploités par des aventuriers qui usent et abusent de la conjoncture pour étouffer son aspiration au mieux-être et à la démocratie, ignorant, peut-être, que l'adversité rend aux hommes toute la vertu que la prospérité leur enlève.
Pourtant, il suffirait de réexaminer les différentes échéances électorales pour apprécier le degré de maturité politique de ce peuple. Conscient que sa voix importe peu et que les jeux sont faits avec ou sans lui, il a toujours réagi à sa manière, faisant de l'abstention une manière propre à lui d'envoyer ses messages «politiques» aux décideurs. Et, s'il ne maîtrise pas la brasse ou le crawl, il excelle dans la «planche». Lorsqu'il lui arrive, de temps en temps, de s'agiter, c'est juste pour s'éviter la noyade. Telle est sa façon de lutter — avec intelligence — en attendant de voir venir les choses. Il se démène comme il peut pour rester à flot ! Quel grand peuple !
A ce peuple, on devrait s'abstenir de lui montrer ses ennemis. Ses ennemis sont ceux de la nation. Les ennemis de la nation, il les connaît. Il suffit de le lui demander et de daigner l'écouter. Il en est autant de ses héros d'hier comme d'aujourd'hui. Observateur attentif, il se distingue par une avidité, sans limite, de gloire et de victoire. Qu'on scrute ses réactions à chaque fois que l'Armée nationale populaire assène ses coups mortels aux hordes terroristes. Il en tire fierté et exaltation. C'est vrai, dans la grisaille ambiante, la joie et l'allégresse ne peuvent provenir que de cette digne héritière de la glorieuse ALN.
Sur le plan historique, s'il s'identifie volontiers et avec fierté aux «Vingt-deux» et aux «Six», tout en se revendiquant de ses héros numides, c'est qu'il est d'extraction digne. Malgré le temps d'incertitude et de vaches maigres qui caractérise — dans la durée — son quotidien, conscient de son potentiel réel, il demeure à l'affût de tout vent pouvant chatouiller son ego national à défaut de faire claquer son emblème. Qu'on se rappelle Omdurman et, surtout, qu'on médite sur l'intérêt accordé par notre jeunesse au sacre de Leicester à la tête de la Premier League, au seul motif qu'un certain Ryad Mahrez ait contribué à son succès. A défaut de grives, on mange des merles, dit le dicton.
Vraisemblablement, ce peuple reste incompris par ceux auxquels son destin est dévolu. Il fait malheureusement figure d'immature à leurs yeux. C'est ainsi qu'on assiste à des professions de nationalisme à l'emporte-pièce, où la menace est agitée à tout bout de champ et l'ennemi interne montré du doigt. Il en est ainsi de ceux qui voient en les officiers à la retraite son incarnation !
Qu'ils se rassurent. Le sens de l'honneur est chez ces gens-là tel que, dans leur imaginaire, la représentation qu'ils se font de l'ennemi est qu'il soit toujours debout, armé, prêt à leur ravir leur propre vie. La verticalité est de mise dans leur subconscient. A en juger par la temporalité de l'«attaque» de ceux qui ont décidé de les désigner en tant qu'ennemis de la nation, on est enclin à affirmer que ceux-là, par contre, attendent que leurs sujets soient à terre pour leur crier «haro sur le baudet», que le céphalopode dont ils ont usé des tentacules dans leur ascension politique et sociale, soit hors de l'eau, pour lui cracher à la figure leur venin.
Quel mérite et quelle ingratitude ! Quand bien même l'antagonisme politique soit la forme la plus forte de tout antagonisme, il ne saurait autoriser la haine, celle-ci relève de la sphère individuelle. Si on la ressent en tant que politique, c'est qu'on est primitif. Un homme d'Etat suppose, entre autres, une certaine conscience de l'entité qu'on est censé servir, à savoir une unité qui englobe tous les contraires. Sont-ils conscients qu'ils sont en train de préparer le terreau à l'hostilité au sein-même de la nation ? Ignorent-ils qu'elle est la matrice de la guerre, qui n'est rien d'autre que la négation existentielle de l'autre ? Nous voyons bien qu'il s'agit de deux représentations diamétralement opposées de l'ennemi. A ces officiers, on a toujours appris à ne pas tirer sur les ambulances, encore moins achever les blessés.
On leur a par ailleurs appris qu'endosser la tenue et commander les hommes et agir en lâches relève de l'antinomie. Voyez-vous, le métier des armes est un véritable creuset de valeurs. Ceux qui ont opté pour cette voie ont, dans leur for intérieur, déjà répondu à la question fondamentale de savoir s'il faille servir la nation ou servir ceux qui s'en servent pour se servir ? Car telle est la véritable problématique et telle est la différence entre les serviteurs de la République et les obligés de ceux qui s'en servent.
Lorsqu'on a pour toute idéologie la flatterie et qu'on s'investit éperdument dans la coterie, on devrait, en toute logique, s'interdire de se prévaloir d'une quelconque fidélité, notamment aux principes de novembre, lesquels ont été portés par une élite qui a fait du don de soi un sacerdoce. Les quelques survivants de cette génération racée, qui se démènent encore comme ils le peuvent pour préserver et perpétuer ce qui reste de ces valeurs, devraient être pris en exemple.
Par l'acte. Le discours apologique à leur adresse, ils n'en ont cure. Ils sauront refuser, le moment venu, de servir de promontoire aux invertébrés et à ceux qui se sont inscrits dans la servitude, se complaisant dans le rôle de petites mains que leurs maîtres du moment leur ont assigné. Si tous les gens avaient compris le sens de l'honneur, ils seraient tous devenus honorables, avait dit, si justement, Hafed Ibrahim.
Dieu reconnaîtra les siens, dit-on. Qu'on ne se méprenne pas sur le silence du peuple. Il saura, lorsque l'amplitude du tumulte dépassera celle du verbe flatteur, reconnaître les siens, car il a, de tout temps, dans les moments difficiles, su faire la différence entre le bon grain et l'ivraie.

Par Ghediri Ali
Général-major à la retraite


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