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Festival, rencontre cinématographique à Amman
Le film arabe à l'épreuve de la modernité
Publié dans El Watan le 14 - 07 - 2005

le centre culturel Al Hussein de Amman a récemment accueilli un festival du film franco-arabe. Certains des films présentés, parmi lesquels El Manara, n'étant même pas coproduits par un partenaire français, on peut supposer que le pourcentage de dialogue en langue française a été déterminant pour le choix des œuvres sélectionnées.
Peu importe, l'occasion était belle de faire le point sur ce qu'il reste de la production cinématographique dans le monde arabe aujourd'hui. Il est vrai aussi que la plupart des films marquants, qui se font de nos jours, sont financièrement soutenus par le système français des aides. Ce n'est pas uniquement le cas des pays maghrébins, puisque sur les 7 longs métrages présentés au public jordanien, deux sont coproduits avec l'Egypte et la Syrie et un troisième est israélien, bien qu'entièrement financé par la France. Le Prince du Tunisien Mohamed Zran a officiellement ouvert le festival qui a bénéficié du patronage de la princesse Rym, épouse du prince Ali et digne fille de notre grand Lakhdar Brahimi. Comment ne pas se sentir fier de voir la grâce et l'intelligence de la princesse Rym représenter en partie l'Algérie que nous aimons ? M. Zran avait débuté au cinéma en 1985 comme assistant metteur en scène de Cyril Colard dans un court métrage intitulé Alger la blanche. C'était l'histoire du suicide d'un adolescent franco-algérien et homosexuel. Il attendra 10 ans pour réaliser son premier long métrage Essaïda qui raconte, dans un ton toujours proche de l'équivoque, la rencontre à Tunis entre Nidal, jeune rebelle, et Amine, artiste-peintre. Avec Le Prince, M. Zran a réalisé en 2004 son deuxième long métrage. Son héros Adel est employé chez un fleuriste à Tunis. Un jour, il tombe amoureux d'une jolie femme directrice d'une agence bancaire, et donc apparemment inaccessible. Utilisant alors le langage des fleurs il lui livre chaque matin des bouquets, prétextant un expéditeur inconnu, jusqu'au jour où Dounia découvre la vérité... Le mérite de M. Zran est d'avoir réussi l'amalgame d'un fou d'amour et d'une observation intéressante sur les frustrations d'un pays miné par le matérialisme. Il paraissait cependant évident que le coup de cœur des organisateurs était allé au Grand Voyage, dont nous avons largement traité dans notre dernière chronique, et sur lequel il n'est pas besoin de revenir ici. Le succès mérité du film d'Ismaël Ferroukhi ne doit pas faire oublier la qualité, souvent très marquée, des six autres films présents au pubic de Amman.
Une histoire épique
Deux films égyptiens figuraient dans cette rétrospective, Klephty de Mohamed Khan et La Porte du soleil de Yousry Nasrallah. Klephty, tiré du grec klept, vol (ce qui a ensuite donné kleptomanie), est l'histoire d'un petit escroc qui traverse la ville du Caire, fier de ses petits larcins et escroqueries. La débrouille dans un système où la grosse corruption rend le larcin dérisoire et risible. Mohamed Khan a réussi par moment à tirer quelques instants de lyrisme de ce monde glauque. Quant à Yousry Nasrallah, l'auteur entre autres de Mercedes, ancien assistant et protégé de Youssef Chahine, a choisi d'adapter le grand roman d'Elias Khoury La Porte du soleil. C'est l'histoire épique d'un certain nombre de personnages, qui fuyant l'invasion sioniste à la fin des année 1940, se retrouvaient dans cette grotte de Bab el Chams, en Galilée. Ayant déjà traité dans cette chronique du roman de Khoury et au passage de l'adaptation qu'en a faite le cinéaste, nous ne nous attarderons pas sur le sujet. Sauf pour dire combien une adaptation cinématographique d'un tel type d'écriture cinématographique peut être semée d'embûches. Khoury est un écrivain aux multiples apparences et il n'est pas aisé de le traduire en images. De plus, son roman est un conte fleuve qui retrace en 50 ans d'histoire, l'errance du peuple palestinien chassé par un autre peuple errant avant lui et qui décide de se venger des Européens en opprimant les habitants légitimes de la Palestine. L'art de l'adaptation cinématographique d'œuvres littéraires réside dans la transposition et le choix. En l'occurrence, Nasrallah a choisi de ne pas choisir, et il nous propose un film somme de près de 5 heures. Le travail est colossal, mais l'exercice contient ses propres limites, et ceux qui ont eu le courage d'aller jusqu'au bout du conte restent largement sur leur faim. Autre film très controversé, Le Mur, film français réalisé par la Franco-Israélienne Simone Bitton. Cette dernière montre clairement dans le film qu'elle se réclame d'une double appartenance culturelle arabe et juive. Cette mixité s'exprime à travers les chants en arabe et en hébreu qui longent le mur. Elle dénonce avec vigueur la barrière de séparation entre les Palestiniens et les Israéliens et plaide pour une frontière ouverte entre les deux peuples. Ce qui n'a pas empêché une poignée de manifestants de clamer leur colère contre l'invitation faite à Simone Bitton de figurer dans ce festival. Ces tapages posent somme toute la question essentielle des appartenances et des convictions. Des aliénations, aussi, selon qu'on se trouve d'un côté ou de l'autre du mur dressé par les systèmes répressifs entre les gens qui pourraient ensemble faire avancer une vraie paix digne de l'attente du peuple Palestinien. Le Mur n'est certes pas un grand film, mais il a le mérite de dire ce que les cinéastes européens dans leur grande lâcheté n'ont pas osé, depuis Hannah K. de Costa Gavras, dire tout haut sur la situation scandaleuse faite aux Palestiniens.
L'effet Belkacem Hadjadj
Une des découvertes de ce festival restera celle de Belkacem Hadjadj que les spectateurs algériens ont déjà vu. A l'issue de la projection, les spectateurs jordaniens ont montré qu'ils avaient du mal à comprendre cette confrontation entre Islam traditionnel et Islam intégriste, telle qu'elle est décrite dans son évolution historique entre les émeutes d'octobre 1988, les élections de 1991 et la période de sinistre mémoire qui a mené à des massacres d'Algériens au nom d'une religion qu'ils partagent pourtant tous et toutes. Il n'est pas aisé de raconter 10 ans d'histoire à travers l'histoire de trois amis que le conflit va peu à peu déchirer. Malgré la difficulté de l'exercice, Belkacem Hadjadj nous fournit des clés et un itinéraire pour voyager au cœur de notre mémoire ensanglantée. Quoique dur le désir de dire, il nous faut, malgré tout, dépasser les silences coupables et raconter l'horreur. Pourquoi en sommes-nous arrivés à ces degrés inégalés de violence et de cruauté ? La force du cinéma américain c'est sans doute de pouvoir parler de la guerre du Vietnam comme l'a fait Cimino dans Voyage au bout de l'enfer, ou Ridley Scott de la Somalie avec La Chute du Faucon noir. On parle et on montre les limites obscures de la bestialité humaine pour mieux redevenir humains et tenter d'échapper ainsi à la folie collective. Après la guerre de libération, nous nous sommes tus sur les crimes coloniaux, et notre cinéma s'est contenté de la glorifier. Nous avons tous trop pardonné et démantelé les lieux ou les objets qui pouvaient retisser la toile de notre mémoire : les camps de concentration, ceux de la mort et de la torture, les barbelés et les miradors de l'encerclement. L'Allemagne libérée du nazisme a tout fait pour garder des signes d'un passé lourd de sens. Qu'avons-nous conservé pour démontrer et dénoncer cette tentative inacceptable de promouvoir l'aspect positif du colonialisme ? El Manara montre que si nous avons cultivé ainsi l'oubli, il nous faut aujourd'hui faire un travail de mémoire sans lequel les fondements d'une nation resteront fragiles. Ceux qui ont commis des atrocités contre leur propre peuple doivent savoir et ne pas se réfugier dans l'insouciance de l'oubli. Pardonner peut se faire, mais après que la mémoire se soit ravivée pour pousser au repentir sincère. Le film de Belkacem Hadjadj a l'immense mérite d'aller au bout des motivations des uns et des autres, de leur vision et de leurs tragiques erreurs. L'histoire reste humaine, en dépit de l'horreur des scènes. Les acteurs sont bons, même si on peut regretter que l'interprétation de la talentueuse Samia Meziane soit embuée par un peu de maniérisme. Last but not least, le dernier film a être montré fut également le plus fort de tous : il s'agit de Passion du grand cinéaste syrien Mohamed Malas. Passion est un film sur le crime d'honneur. Officiellement du moins. Car en réalité, Malas parle de liberté individuelle, de démocratie et décrit des êtres pris dans une répression dans laquelle ils sont tour à tour des victimes et des bourreaux. Délibérément, le film démarre comme un conte oriental, avec sa lenteur et ses descriptions tout en arabesques. Imane, l'héroïne malheureuse, vit à Alep, aime son mari, ses enfants et Oum Kelthoum. Son frère est en prison pour avoir été pris dans une manifestation... contre les Américains, et son beau-frère est dans les moukhabarate. Imane, la foi, c'est le visage de la Syrie opprimée, c'est celle qu'on veut déshonorer parce qu'elle aspire à la culture et à une liberté élémentaire de pensée. Imane sera assassinée par sa famille, et le film de Malas s'emballe soudain, rompant avec sa fausse lenteur du début. Il met en place, avec une ingéniosité prodigieuse, la stratégie de l'araignée lorsqu'elle tisse sa toile qui étouffe tout ce qui émerge. Mohamed Malas donne une leçon de cinéaste à ceux qui ont envie de s'exprimer vraiment sur les questions graves de leur pays, tout en étant de l'intérieur. Il possède pour cela une arme absolue devenue bien rare de nos jours : le talent.


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