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Roman et histoire (II)
Yughourtha, des frères et des guerres
Publié dans El Watan le 22 - 09 - 2005

Quelles positions le romancier doit-il adopter face à un crime relaté par l'histoire ? Faire face aux fausses vérités en inventant d'autres ? Prendre le chapeau de l'historien et réécrire l'histoire à sa façon ? Ou aller tout simplement vers un imaginaire collectif non exploré et s'engouffrer dedans dans la perspective d'une refonte de la vérité ?
En finalité, l'écrivain est-il innocent dans sa pratique littéraire et dans sa manière de voir les choses ? Quelle est sa part de responsabilité devant de tels actes ? Il est très difficile de répondre à toutes ces questions sans amputer la vérité d'une part de son essence, mais, ce qui est sûr, c'est que l'histoire dans son esprit fondamental n'est jamais amnésique, ce sont les gens qui font d'elle ce qu'elle n'est pas par essence. La littérature exerce la même « agression » justifiée en travestissant l'histoire par d'autres histoires. Peut-être que c'est là essentiellement la définition de l'écriture, sinon elle devient pur écho et simples faits plats. L'écriture, sans reproduire les mêmes schémas et les mêmes mécanismes, crée son propre univers et sa propre histoire et même ses propres vérités qui n'ont de renvoi que le texte lui-même, c'est-à-dire le produit imaginé. Notre histoire gorge d'histoires à reconstituer littérairement où la question qui a tort et qui a raison revient à chaque fois. Prenons un seul exemple qui ne fait que prouver l'assèchement et l'amnésie avec lesquels est frappée notre mémoire collective ? Yughourtha (Jugurtha). Que reste-t-il aujourd'hui de Yughourtha, l'une des grandes figures emblématiques de la résistance numide contre l'ordre romain ? Un ordre qui pour s'imposer n'a pas lésiné sur les moyens les plus funestes contre les autochtones qu'il voulait asservir. C'est dans un contexte de guerre, pas loin de celui d'aujourd'hui, que grandit Yughourtha. La présence romaine a provoqué de vastes insurrections populaires et révoltes qui exprimaient le profond attachement des Numides à leur liberté. Il faut signaler que Yughourtha est descendant d'une grande lignée de héros numides. Il naquit en 154 av. J.-C., issu d'une dynastie aurasienne (Aurès), (les Aurès) a qui appartenaient aussi les monarques de la Numidie orientale ou Masissyle. Les racines du trône de Yughourtha vont jusqu'à Massinissa, qui, sentant sa mort prochaine, partagea le pouvoir entre ses trois fils héritiers : à Micipsa, il attribua le poste des affaires administratives ; à Gulussa est revenu l'armée et enfin à Manastabal, il confia la justice. Après la mort de ses deux frères, Micipsa s'octroya tous les pouvoirs de 148 à 118 av. J.-C. Avant sa mort, Micipsa légua le pouvoir à ses deux fils : Astrubal et Hiempsal ainsi qu'à son neveu Yughourtha. Après l'assassinat de Hiempsal, le différend éclata entre Astrubal et Yughourtha, engendrant une scission politique au sein de la population numide qui se scinda en deux, l'une hostile à Rome, soutenant Yughourtha, l'autre, s'appuyant sur Astrubal, qui après sa défaite, se réfugia dans les territoires romains et demanda la médiation du sénat romain. Après les bons offices et le partage, la Numidie orientale revint à Yughourtha. Mais le conflit était tellement fort qu'il était impossible de prévoir une paix en présence des deux belligérants. Une tentative d'assassinat manigancée par Astrubal, balança les deux dans une guerre qui se termina de nouveau par la défaite de ce dernier, qui trouva refuge à Cirta où stationnait une colonie romaine. Yughourtha assiégea Cirta pour avoir la tête de son ennemi. Les deux émissaires dépêchés par le sénat romain n'eurent aucun effet sur Yughourtha qui insista sur sa requête. Rome déclara alors la guerre à Yughourtha en 111 av.J.-C. et désigna Calpurnius Bastia à la tête de son armée. Le souci des Romains était surtout de punir Yughourtha qui, par son entêtement, porta atteinte à la force et à la dignité de Rome. L'armée romaine atteignit d'abord Carthage devenue province romaine depuis sa chute. Après plusieurs batailles, Yughourtha arrêta la guerre en donnant l'occasion à ses partisans à Rome de mener à terme leur mission de rapprochement. Les Romains demandèrent alors à Yughourtha de verser des pots -de-vin en échange d'un retrait de ces derniers. Chose dite, chose faite. Mais le pouvoir central romain jugea l'accord comme une trahison et accusa Bastia de corruption. Afin de clore cet épisode, Yughourtha fut convié à se déplacer à Rome et qu'il reconnaisse publiquement que les chefs romains ont reçu des pots-de-vin de sa part. Le roi numide prononça sa parole célèbre : Rome est exposée à la vente. Elle s'effondrera bientôt et ne trouvera personne pour l'acheter. La corruption était tellement profonde qu'il était devenu quasiment impossible de voir une autre issue pour Rome en pleine déperdition, victime de son propre système. Mais dès son retour triomphal, la guerre reprit à cause d'une manigance d'assassinat. L'armée très organisée de Yughourtha et très décidée remporta toutes les grandes batailles, surtout celle de Calama (Guelma) et humilia les grands guerriers romains en les obligeant à défiler avec leurs troupes sous ses yeux pour reconnaître publiquement la défaite. La bataille de Oued Mithoul avait les mêmes conséquences graves pour Rome : la reconnaissance de la force de Yughourtha comme chef incontournable. Connaissant toutes les intrigues romaines, il refusa de tomber dans les pièges qu'on lui avait tendus : opter pour une guerre de rangées ouverte. Il n'aimait pas l'affrontement direct et préférait se rapprocher promptement de l'ennemi, puis se retirer en provocant une panique dans leurs rangs. Il savait très bien qu'il n'avait pas les moyens militaires des Romains, mais il avait l'avantage de la région qu'il connaissait mieux que ses ennemis. Ce qui poussa Mettelus, commandant de l'armée romaine de l'Afrique du Nord, à recourir à la guerre sauvage en brûlant et en pillant tout ce qui se trouvait sur son chemin. La population fut contrainte à s'allier à son protecteur : Yughourtha. Vers l'été de l'année 109 av. J.-C., Metellus tenta une nouvelle offensive, afin de mater les troupes ennemies. Il cerna la ville de Zama qui était considérée comme un bastion numide stratégique et essaya d'attirer Yughourtha dans un guet-apens. Le piège sera vite dévoilé par certains déserteurs romains. Le plan fut déjoué. Yughourtha utilisa toutes les astuces guerrières pour préserver la ville et la population qui s'était défendue avec acharnement en jetant du goudron brûlant mélangé au souffre sur les Romains qui tentaient de détruire l'enceinte de la ville. Pour ce faire, Yughourtha intervint en pleine bataille, à la tête d'une armée bien équipée, avant d'envahir le camp romain et le détruire en usant de la méthode guerrière numide décrite par l'historien Sallustre et qui consistait à attaquer en bloc afin de disloquer les rangs de l'ennemi et en y provoquant des brèches de façon à permettre aux troupes cavalières de se replier, donnant ainsi plus d'action aux fantassins qui se chargeaient alors d'attaquer. L'armée romaine connut un dur hiver l'année 108 av.J.-C. Les Romains arrivèrent très difficilement à conquérir la ville de Zama et celle de Cirta. Deux ans après le déclenchement de la guerre en 107, le roi Yughourtha fut livré à Sylla, grâce à un complot bien préparé par son beau-frère Boccus, roi de Mauritanie (le Maroc actuel), et qui consistait en la préparation d'une rencontre de réconciliation entre les Romains et Yughourtha. Boccus s'en est même porté garant. Le jour « J », Yughourtha se présenta démuni de ses armes et vint à la rencontre de Sylla et Boccus. Il tomba dans le piège et fut envoyé à Rome. Au terme du cérémonial de la victoire, il fut conduit à la prison de Thulianum, non sans reconnaître son courage, où on lui infligea le supplice de la faim jusqu'à la mort le 7 janvier de l'année 104 av.J.-C., laissant derrière lui une Numidie déchirée, mais qui n'a jamais cessé de se battre pour l'idéal de la liberté la plus parfaite. Comment faire devant un amas de faits pour l'écrivain ? Qui a tort et qui a raison ? Comment travailler sur les blancs que l'histoire des vainqueurs a omis de citer ? Peut-on faire confiance à des tueurs qui ont vendu leur âme ? Le problème reste entier. Le roman est-il arrivé à faire de son écriture un domaine d'investigation et de relecture sans imposition politique ou idéologique ? Pourquoi notre littérature a t-elle peur de s'approcher de son âme, c'est-à-dire son histoire ancestrale ? L'histoire fait-elle aussi peur à la littérature ? Tant de questions qui resteront pendant longtemps sans réponse aucune. Le besoin d'une génération d'écrivains qui fait de l'histoire, non un atout sacré de vérité mais plutôt un espace véritable qui permet de mettre à l'épreuve non seulement l'histoire mais aussi la littérature, s'impose de fait. Mais cela est une autre histoire.

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