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Une discipline en quête de crédibilité La science économique en Algérie
Publié dans El Watan le 18 - 11 - 2010


Le présent papier est une modeste réflexion sur ce qu'inspire l'état de la science économique en Algérie. La réflexion ne prétend pas dresser un tableau exhaustif de la situation qui prévaut présentement dans les espaces publics abritant le débat économique, mais simplement de relever certains faits qui, pour incomplets et fragmentaires qu'ils peuvent paraître, n'en sont pas moins révélateurs du retard pris par une discipline qui, en d'autres circonstances, aurait mérité le titre de «reine des sciences sociales». Par Samir Bellal (*) Instrumentalisée par le pouvoir politique, ridiculisée par les courtisans du prince, malmenée dans l'opinion, méprisée et/ou vouée aux gémonies par les idéologues de tous bords, déconnectée des réalités dans les milieux académiques, tel est, brièvement décrit, la science économique en Algérie. Il faut dire que, d'un certain point de vue, le sort réservé à la science économique dans les pays à régime politique totalitaire n'est pas étranger à son statut de science sociale. Ce dernier autorise, de par l'objet même de la discipline, l'intrusion des considérations politiques, idéologiques et religieuses dans le débat que suscite l'analyse économique. Mais si cette situation peut être observée quel que soit le contexte historique considéré, il en va différemment dans les régimes totalitaires où cette intrusion se trouve encore renforcée par le déséquilibre dans les relations entre la société civile et le pouvoir politique. Il n'est dès lors pas étonnant de remarquer que dans ce type de régimes, ce n'est pas seulement la science économique qui est investie par ces contraintes, mais toutes les disciplines qui s'intéressent à la vie en société. A l'instar des autres disciplines sociales, la science économique n'échappe donc pas à l'instrumentalisation politique. On peut considérer qu'il est dans l'ordre «naturel» des choses que des forces politiques en lutte pour le pouvoir aient fréquemment recours à l'enseignement de la science économique pour donner une assise « scientifique » à leurs programmes respectifs, mais, de toute évidence, on ne peut en dire de même lorsque ce recours prend l'allure d'une exploitation éhontée au bénéfice exclusif du prince du moment. Tel semble pourtant être le cas dans notre pays. Ce type de spectacle, dans lequel notre pays semble, à l'instar des pays du tiers monde, exceller, nous est aujourd'hui tellement familier que tout débat contradictoire passe pour être un acte subversif. Expression d'une pathologie politique caractéristique des régimes totalitaires, la négation du débat économique contradictoire finit par porter le coup de grâce à une discipline qui, dans les sociétés démocratiques, est aux avant-gardes du changement social et politique. L'esprit courtisan des économistes L'autre visage que nous offre à voir la science économique en Algérie est celui de ces économistes qui, aussitôt qu'une décision politique majeure est prise ou annoncée en matière économique, se pressent, par le biais des médias, à en souligner la portée et les vertus pour l'avenir économique du pays. Les plateaux de télévision se transforment, à cette occasion, en une arène où les docteurs ès sciences économiques rivalisent de formules pour louer le caractère ingénieux des décisions prises par les maîtres du moment. Il convient de noter que cet esprit courtisan n'est pas l'apanage des économistes : on le retrouve aussi chez les juristes (pour justifier les changements de constitutions), les historiens (pour valider la version officielle de l'histoire), les sociologues (pour souligner le rôle éminemment efficace de l'Etat dans la prise en charge et la prévention des maux sociaux, phénomènes censés être étrangers à notre société), les politologues (pour louer les vertus du régime politique en place) …. bref, l'esprit de courtisanerie, qui frise souvent la caricature, traverse l'ensemble des communautés des sciences sociales et humaines, mais il faut reconnaître que la communauté des économistes est plus sollicitée que d'autres en raison de l'impact direct et immédiat que les décisions économiques produisent sur la vie des gens. L'esprit courtisan, quand il ne s'exprime pas ostensiblement à l'occasion d'une conjoncture politique particulière, peut s'inscrire dans le temps long. Ainsi, périodiquement, certaines associations prétendument scientifiques éprouvent un pressant besoin de battre le rappel de leurs troupes et des médias pour signaler à qui vous savez leur existence et faire montre de leur ardeur de servir. Au point où, avec le temps, on finit par prendre habitude de l'existence d'une multitude d'associations, aussi «dynamiques» les unes que les autres. Dans cette arène associative où l'opportunisme se le dispute au désir ardent de plaire, on peut relever la présence d'une «Association des économistes algériens», d'une «Association pour le développement de l'économie de marché»(1), … et, pour réunir toutes les disciplines sociales, d'une «Académie de la société civile», une sorte de confédération «scientifique» regroupant l'ensemble des intellectuels organiques du pays. Les intellectuels organiques ont pour vocation d'apporter, selon une posture «Khaldounienne» bien ancrée dans nos contrées(2), la caution «scientifique» aux pratiques des tenants du pouvoir, en contre partie de laquelle ils reçoivent subsistance, reconnaissance et privilèges. Tout en accomplissant leur mission, les intellectuels organiques veillent à entretenir leur statut d'intellectuel en suscitant des confrontations avec leurs pairs de l'autre bord. Certaines des polémiques qu'ils lancent dans l'espace public n'ont d'autre objectif que celui d'arracher à la communauté scientifique dont ils se réclament et à laquelle ils s'identifient une reconnaissance de leur statut de membre, mais nullement de faire avancer la réflexion en suscitant un débat libre et contradictoire. Par ailleurs, le discours économique peine manifestement à gagner en crédibilité au sein de la société. L'une des raisons qui expliquent une telle situation réside dans le décalage, réel ou perçu, entre les représentations (ou les modèles construits) et la réalité vécue. Ce décalage concerne aussi bien l'état du présent que celui du futur, à travers les projections. L'exemple du chômage est significatif à cet égard : les statistiques et analyses de conjoncture, émanant aussi bien des institutions officielles que des organismes «indépendants», et qui indiquent toutes une baisse importante du niveau de chômage ces dernières années, donnent lieu à des interrogations sur la crédibilité des outils méthodologiques utilisés et des chiffres qui en découlent. Le manque de crédibilité du discours économique officiel est aggravé par l'absence de débat ouvert et libre. Le sort réservé au CNES (Conseil national économique et social) illustre cette situation : du temps où cette institution bénéficiait d'une relative autonomie, lui permettant d'abriter un débat libre, seul à même de permettre d'établir un diagnostic sans complaisance de la situation économique et sociale qui prévaut dans le pays, la publication de ses analyses et autres rapports de conjoncture constituait un véritable événement dans la vie économique et politique du pays. Pour tous ceux qui, pour une raison ou une autre, s'intéressent aux questions économiques et sociales (chercheurs, étudiants, opérateurs économiques nationaux ou étrangers, organisations socioprofessionnelles, …), les études du CNES constituaient une référence incontournable. Aujourd'hui caporalisée, l'institution brille davantage par sa cogitation protocolaire et institutionnelle que par sa contribution effective à l'enrichissement du débat économique national. L'autre obstacle sur lequel bute le développement du débat économique dans notre pays est celui de l'idéologie, champ dans lequel la discipline économique semble s'être résignée à jouer le rôle d' « argument » scientifique à des représentations dans lesquelles les désirs collectifs sont pris pour des réalités. Cela est d'autant plus vrai que l'idéologie en question est d'essence totalitaire. Les idéologies totalitaires ont ceci de commun qu'elles envisagent leurs projets respectifs à travers des schémas normatifs qui, souvent, ignorent les impuretés dont est porteuse la réalité sociale. Ces impuretés, outre qu'elles faussent la cohérence des discours idéologiques, rendent problématique la pertinence des actions que ces mêmes discours ont pour fonction de justifier. La quête de la pureté pousse le discours idéologique à rejeter toute démarche qui prône la reconnaissance des impuretés qui entachent la réalité économique et sociale, ce qui est le propre du discours scientifique. De l'autonomie de la communauté scientifique D'où l'aversion des idéologies totalitaires pour les sciences en général, et les sciences sociales en particulier. En Algérie, l'économie pose problème à deux discours idéologiques qui, présentement, se trouvent être en compétition : le populisme et l'islamisme. Les deux idéologies, en dépit de leurs différences, ont en partage une conception de l'économie qui exclut l'idée du conflit. La négation du conflit se justifie pour la première par l'obsession de préserver l'unité de la collectivité nationale, tandis que pour la seconde, le conflit est antinomique avec le principe de « fraternité » qui devrait régir les relations entre les citoyens-croyants. Il est à remarquer que chez beaucoup d'économistes parmi ceux précisément qui ont pris part à la conception et le cautionnement «scientifique» de l'échafaudage «socialiste», le débat sur l'intrusion de l'idéologique dans l'économique s'exprime en termes d'oppositions entre ingénieurs et économistes, acteurs clés dans la mise en œuvre du projet d'industrialisation initié dans les années 1970. Une telle opposition se serait achevée par la victoire des premiers sur les seconds, ce qui expliquerait pourquoi le recours à l'enseignement de l'économie dans la définition des politiques économiques a été réduit dans les faits à l'aspect technique et instrumental. Bien que vraisemblable, la thèse de l'opposition entre ingénieurs et économistes n'en constitue pas moins un argument échappatoire, en particulier pour ceux des économistes en vue dont la participation au projet « populiste » prend les allures d'une aliénation intellectuelle qui se révèle aujourd'hui fort préjudiciable. Si le populisme a mené à une impasse, l'islamisme, candidat à sa succession, ne propose rien de véritablement différent. La négation du conflit conduit en effet à préconiser des mesures de politique économique dont la principale caractéristique est qu'elles conduisent à des conséquences exactement opposées à l'objectif poursuivi. La trajectoire économique du pays est une triste illustration de l'incapacité de l'idéologie populiste à aménager délibérément, selon un schéma préétabli, l'activité économique et sociale du pays. De tous les espaces publics abritant le débat économique, l'université est, dans tous les pays, celui qui est censé offrir le plus d'autonomie et le plus de liberté pour une confrontation féconde des idées. Qu'en est-il du débat économique au sein de notre université ? Un examen sommaire des thèmes développés au sein de cette institution, aussi bien à l'occasion des soutenances de thèses que lors des multiples rencontres scientifiques (colloques, symposium, séminaires, journées d'étude,…) organisées ici et là, indique une situation surréaliste : les thématiques abordées pèchent par leur caractère mimétique dans la mesure où, très souvent, il s'agit de problématiques « importées », au point où la récurrence de certains thèmes est inversement proportionnelle à leur degré d'opportunité. L'économie du savoir, le développement durable, l'intelligence économique, etc., en sont quelques-uns des sujets abordés et qui feraient croire que nous sommes, non pas en Algérie, mais dans un pays à économie avancée. Dans un pays sous-développé comme le nôtre, il est évident que ce genre de problématiques pèche par son caractère inadapté aux exigences immédiates du développement économique : peut-on raisonnablement traiter prioritairement des questions de l'environnement dans un contexte caractérisé par une désindustrialisation accélérée que rien ne semble pour le moment pouvoir arrêter ? Peut-on opportunément aborder le problème de l'intelligence économique et de la veille technologique dans un pays où l'essentiel des entreprises industrielles continue encore de fonctionner avec des méthodes de gestion archaïques et un équipement des plus obsolètes, frappé qu'il est par l'usure physique et morale(3) ? Est-il crédible d'évoquer l'économie du savoir dans un pays où, en amont, l'éducation et la formation se trouvent, en dépit de l'importance des ressources qui leur sont consacrées, instrumentalisées politiquement et idéologiquement, instrumentalisation qui s'exprime en particulier par l'ostracisme dont sont victimes les langues étrangères, tandis qu'en aval, tout semble être mis en œuvre pour que la structure incitative institutionnelle ait une configuration qui détourne les vocations et les talents des métiers scientifiques et technologiques au profit des carrières bureaucratiques, bien rémunérées et de loin mieux considérées. Et quand les problématiques ne sont pas «importées», elles sont suggérées (et parfois imposées !) par l'ordre politique en vigueur. Aujourd'hui, comme par le passé, l'autonomie de la communauté scientifique dans la définition des thèmes à étudier demeure sujette à de légitimes interrogations, en particulier dans le domaine des sciences sociales. Cela est d'autant plus vrai que les interférences, de différents ordres, ne prennent plus la forme d'injonctions directes et formelles, mais relèvent souvent d'une autocensure, consciente ou inconsciente. Au risque de paraître vouloir faire du thème de la rente … une rente , il nous semble que la mission première de la communauté des économistes est présentement moins de construire des modèles formalisant des équilibres hypothétiques et virtuels que d'indiquer au décideur les voies à suivre pour sortir du régime rentier. L'économiste doit élaborer un antidote à l'intoxication pétrolière dont l'économie nationale continue de subir les effets. Tout débat économique qui ne s'inscrirait pas dans une telle perspective est, dans le contexte qui est le notre, un débat pour le moins stérile. La sortie du régime rentier n'est pas l'affaire des seuls économistes. S'il appartient à ces derniers de s'impliquer de manière à faire parvenir au Prince des suggestions et des recommandations (ne dit-on pas que l'économiste est le conseiller du Prince ?), il appartient aux autres communautés scientifiques d'apporter le regard complémentaire qui permet de prendre la mesure du caractère multidimensionnel des problèmes posés. Sans cette action collective pluridisciplinaire, point de conscience de la nécessité et de l'inéluctabilité du changement. - (*) Maître de conférences, université de Guelma Notes : -(1)Association dont on n'entend plus parler depuis que l'orientation économique officielle du pays est pour davantage d'Etat. -(2)Nous nous référons là à un aspect méconnu d'Ibn Khaldoun, à savoir sa propension à flatter et servir les princes. Voir à ce propos son récit autobiographique « Le voyage d'occident et d'Orient ». Il est par ailleurs frappant de constater que, dans leur immense majorité, les auteurs qui s'intéressent aujourd'hui à Ibn Khaldoun reproduisent la même posture dans leurs rapports avec le pouvoir politique. Au point qu'un ministre de la République s'est cru obligé de qualifier le tissu industriel national de quincaillerie! -(3)Pour en finir avec la rente (dixit F. Talahite), il faudrait que les indicateurs économiques du pays se réconcilient avec la «normalité» et cessent d'afficher des valeurs extrêmes : l'Algérie enregistre en effet 02 % de recettes d'exportations hors hydrocarbures, 60% de fiscalité pétrolière dans les recettes budgétaires et 40% de contribution du secteur des hydrocarbures au PIB.

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