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La nouvelle régulation économique en Algérie : Un compromis institutionnel ambigu
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Dans le débat sur la réforme économique en Algérie, il est constamment question de la caractérisation du mode de régulation de l'économie.
Par-delà les diagnostics en termes de configurations polaires (Etat vs marché), le nouveau mode de régulation se présente avant tout comme un compromis institutionnel spécifique dont il serait intéressant d'évoquer les traits principaux au regard des nécessités du développement et de l'accumulation dans un régime rentier. Qu'est-ce qui caractérise, en termes de codification des rapports sociaux fondamentaux, le nouveau mode de régulation de l'économie en Algérie ? Pour répondre à cette question, il y a lieu d'examiner l'évolution de la configuration de chacune des régulations partielles qui le composent.
On pourrait ainsi observer les changements multiples, prenant souvent la forme de ruptures, qui se sont produits dans les domaines respectifs de la formation des prix, de la mise au travail, de la monnaie, du budget de l'Etat… Un tel examen ne rendrait cependant pas compte des complémentarités et des hiérarchies qui relient les différentes régulations partielles. Or, très souvent, la pertinence d'un mode de régulation dépend moins du contenu des configurations concrètes que prennent chacune des régulations partielles que de leur aptitude à former système.
Les régulations partielles sont en effet les éléments complémentaires d'une combinaison dont l'efficacité se mesure par rapport au degré de réalisation des objectifs, formels ou informels, assignés par la collectivité (l'Etat) à la régulation économique dans son ensemble. Il y a donc nécessité de considérer le mode de régulation en tant qu'ensemble de règles constitutives d'un système qui a sa propre finalité. De ce point de vue, la nouvelle régulation en Algérie se présente comme une tentative d'instrumentalisation du marché pour assurer la pérennité du régime rentier.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la libéralisation en Algérie, telle qu'elle s'est réellement déroulée, n'a fait que consolider le fondement rentier de l'économie nationale. Cette consolidation prend diverses formes : maintien du poids écrasant du secteur des hydrocarbures dans la structure des exportations, du PIB, du budget de l'Etat, etc. ; une désindustrialisation accélérée du pays que rien ne semble pour le moment pouvoir arrêter ; une explosion des importations, et conséquence ultime, une aggravation du chômage et des inégalités sociales, phénomènes qui prennent présentement des proportions qui risquent de menacer sérieusement la cohésion nationale.
Tel est, brièvement dressé, le bilan d'une libéralisation dont on commence à peine à se rendre compte du caractère pour le moins puéril au regard des nécessités objectives du développement économique du pays. Aussi négatif puisse-t-il être, le bilan de la libéralisation menée dans les années 1990 et 2000 ne constitue pas un argument crédible pour plaider un retour à l'étatisme stérile, dont le pays continue encore de porter quelques séquelles. Le changement social n'étant ni linéaire ni irréversible, la question est plutôt de savoir si l'orientation donnée à celui-ci est, sur la période longue, conforme à l'intérêt économique du pays.
Dans cette perspective, la nouvelle régulation économique semble exprimer un compromis institutionnel ambigu dans la mesure où, comme par le passé, le décalage entre intentions politiques et résultats économiques est toujours aussi grand. La rhétorique sur «l'après-pétrole» peine à se traduire en résultats, au point où parfois il peut sembler que, chez nous, la fréquence d'usage d'un mot d'ordre est inversement proportionnelle au degré de sa concrétisation. L'ambiguïté du compromis institutionnel qu'exprime le mode de régulation se lit dans des figures spécifiques.
Pour n'en retenir que les plus importantes, il y a lieu de citer le statut mineur et auxiliaire du rapport salarial dans la reproduction économique de l'ensemble de la société, celle-ci reposant davantage sur la rente externe que sur le travail ; la persistance des incompatibilités entre régulations partielles, privant la politique économique du pays de la cohérence qui lui aurait donné les contours de projet de développement ; et enfin, l'inaptitude avérée de l'arrangement institutionnel en place à susciter une dynamique d'accumulation productive, conséquence de l'incompatibilité des régulations partielles.
Le statut mineur du rapport salarial
Le rapport salarial est une institution centrale, pivot, dans les économies de marché. En Algérie, ce rapport n'occupe qu'une place secondaire, mineure, il n'est pas au centre de la configuration institutionnelle. Celle-ci semble dominée par le mode d'insertion internationale et l'Etat, formes institutionnelles dont les configurations respectives consacrent le poids écrasant de la rente pétrolière. L'Etat, à travers son budget, financé par la rente, joue un rôle central dans cette configuration d'ensemble. En fait, la rente pèse sur l'ensemble des rapports sociaux. En matière de mobilisation de la main-d'œuvre, elle interfère de façon très nette dans la formation de la productivité, des salaires et les modalités de la protection sociale. La répartition du surplus, dont l'essentiel provient de la rente externe, fait davantage appel aux rapports clientélistes qu'à l'activité productrice des personnes. Cependant, d'un certain point de vue, la place du rapport salarial dans la transition institutionnelle demeure centrale.
Dans cette perspective, il nous semble permis de penser que la disponibilité d'une rente externe est de nature à permettre, lorsque la configuration du rapport salarial correspond à celle que le complexe de machines requiert, une atténuation de l'intensité du taux d'exploitation du travail, ne serait-ce qu'à travers la prise en charge d'une partie du salaire indirect.
A l'évidence, la présence de la rente externe n'est en principe pas antinomique avec l'instauration d'un rapport salarial de type «taylorien», elle peut même la favoriser sachant que dans le contexte de la configuration actuelle de la DIT, il semble de plus en plus exclu pour un pays pauvre et attardé de déclencher le processus d'augmentation de la productivité autrement que par un sursaut du taux d'exploitation du travail. L'instauration d'une configuration «taylorienne» des rapports de travail relève pour le moment d'une possibilité purement théorique.
Dans les faits, nombreux sont les indices qui montrent le caractère invraisemblable d'une telle évolution. Pour ne retenir que le principal d'entre eux, on note le maintien de la productivité du travail à des niveaux anormalement bas(1) . Par ailleurs, la privatisation, opération qui n'a d'intérêt que parce qu'elle est une modalité efficace d'introduction d'un rapport salarial efficient, semble buter sur de sérieux obstacles, politiques pour l'essentiel, qui en empêchent la concrétisation, ce qui témoigne du caractère hypothétique de la perspective de la réhabilitation du rapport salarial dans son statut de forme institutionnelle centrale, comme cela est le cas dans les économies de marché(2) .
Incompatibilités entre régulations partielles
L'une des caractéristiques majeures de la nouvelle régulation économique est l'existence d'incompatibilités manifestes entre ses différentes composantes (régulations partielles) ; celles-ci traduisent l'absence de projet de développement à même de donner un sens aux décisions de politique économique. Une confrontation entre les logiques véhiculées par chacune des régulations partielles est à même de permettre d'identifier, de manière plus ou moins exhaustive, un ensemble d'incompatibilités dont l'effet handicapant sur l'activité économique est plus ou moins important. Pour n'en retenir que les plus importantes, il semble que c'est surtout l'ouverture commerciale qui, dans les circonstances actuelles, pose l'obstacle le plus difficile à surmonter.
En effet, une des principales incompatibilités entre les régulations partielles se situe entre le désarmement douanier et l'impératif de promouvoir les activités et les exportations industrielles dans la mesure où la suppression complète de la protection extérieure affecte considérablement les conditions de rentabilité d'une vaste gamme d'industries, dont notamment les industries potentiellement exportatrices. Cette incompatibilité peut être reformulée plus généralement en considérant le rapport salarial comme second terme : l'incompatibilité serait alors entre l'ouverture tous azimuts et la nécessité d'instaurer un rapport salarial efficient.
Cette contradiction est d'autant plus grande que même les économistes libéraux qui plaident habituellement pour le libre échange admettent l'argument de «l'industrie naissante» en ce qu'ils reconnaissent la nécessité de protéger de la concurrence extérieure des activités nouvelles tant que celles-ci n'auraient pas effectué avec succès leur apprentissage et atteint leur maturité. Dans l'état actuel des choses, force est d'observer que le démantèlement des barrières douanières et la circulation libre des marchandises n'ont fait émerger aucune capacité productrice ou exportatrice nouvelle. Au contraire, cette ouverture, menée au pas de charge, fait subir à la fragile industrie nationale (publique et privée) une concurrence brutale qui risque, si ce n'est déjà fait, de l'anéantir.
Dans la mesure où il vise à accroître le degré d'efficience de l'industrie locale, le désarmement douanier doit en principe être sélectif plutôt que systématique. Or, comme le notait déjà F. Yachir(3), la sélection de «créneaux» renvoie à la nécessité d'une véritable politique industrielle qui puisse assurer le développement prioritaire d'activités qui soient à la fois dynamiques sur le plan extérieur et conformes à la configuration actuelle et prévisible des ressources du pays.
La politique industrielle est incompatible avec une ouverture indiscriminée de l'économie à la concurrence étrangère. Pour dire les choses autrement, on peut affirmer cette fois-ci qu'il y a compatibilité parfaite entre l'ouverture tous azimuts et l'absence d'une politique industrielle. Il est, à cet égard, symptomatique de noter que l'un des traits significatifs de la période d'ouverture entamée depuis le début des années 1990 est l'absence presque totale de documents sur les objectifs et les moyens de cette politique. Quant au projet élaboré en 2007 et pompeusement dénommé «stratégie industrielle», son manque de crédibilité fut tel qu'il ne fera pas long feu, rejeté par ceux-là même dont il attendait la bénédiction politique(4).
Par ailleurs, il y a lieu de mentionner l'incompatibilité, manifeste mais dont on parle moins, entre l'ouverture extérieure et le maintien d'un rapport salarial de type clientéliste, notamment dans le secteur public industriel. Ce dernier s'apparente toujours davantage à un marché politique, non seulement parce que ses gestionnaires sont souvent nommés sur des bases clientélistes, mais aussi parce que ses recrutements, son fonctionnement et ses activités obéissent moins aux impératifs de rentabilité qu'aux interférences et interventions directes d'une multitude de centres de pouvoir(5) .
Sur la longue période, une telle situation n'est tenable que si des ressources extérieures considérables sont mobilisées pour le financement des déficits structurels qui en découlent.Ce qui vient d'être dit des incompatibilités liées à l'ouverture commerciale peut être étendu à l'autre composante constitutive de l'insertion internationale : le taux de change. La détermination du taux de change est, contrairement à ce que l'on entend ici et là, une décision éminemment politique. Cela est d'autant plus vrai que nous sommes dans un contexte où l'essentiel des ressources en devises provient de l'exportation d'une matière première et que, en outre, c'est l'Etat qui en est le détenteur exclusif.
Au même titre que l'ouverture commerciale et le démantèlement douanier, la surévaluation de la monnaie nationale, puisque c'est de cela essentiellement qu'il s'agit dans le cas d'une économie rentière, est une configuration porteuse des mêmes incompatibilités que celles qu'on vient d'évoquer, de sorte que c'est la promotion d'un régime de croissance indépendant de la rente qui s'en trouve compromise. En somme, le mode d'insertion internationale de l'économie revêt, au travers des configurations de ses principales composantes, un statut particulier dans la question de la cohérence du mode de régulation. Les expériences de certains pays qui ont réussi à sortir de la trappe du sous-développement (Corée du Sud, Indonésie, Brésil, Malaisie, Mexique…) montrent toutes que l'un des enjeux de tout processus de développement est la capacité du pays considéré à articuler ses mécanismes internes de régulation économique et sociale avec les contraintes et opportunités qui naissent de son insertion internationale.
Inaptitude à susciter et «piloter» une dynamique productive
Cette incapacité découle du fait que la hiérarchie institutionnelle demeure déterminée par l'Etat et l'insertion internationale. La nouvelle régulation semble obéir davantage à une volonté de mettre l'économie nationale (ou, plus précisément, le régime rentier d'accumulation) à l'abri des effets de la volatilité des cours du pétrole sur le marché mondial ; l'objectif explicite étant de contrer les effets induits par les fluctuations du prix du pétrole sur la balance des paiements, les recettes budgétaires et la masse monétaire, effets qui sont autant de sources de fragilité pour l'économie dans son ensemble.
Les changements opérés présentent, dans les faits, toutes les caractéristiques d'une gestion distributive, bien qu'un peu plus «prudente», de la rente. On retrouve là les termes du diagnostic classique selon lequel les incohérences qui caractérisent les changements institutionnels, c'est-à-dire la réforme, découlent précisément du fait que ceux-ci sont, dès le départ, pensés dans le cadre d'une problématique de la circulation, problématique qui évacue totalement les déterminations sociales de la production et de l'échange. En réhabilitant le marché à partir de la circulation, la nouvelle régulation ne fait que modifier le mode d'appropriation de la rente externe. Elle ne lève pas les blocages auxquels se trouve confronté le système productif interne (si tant est qu'on puisse parler de système productif), et par suite l'accumulation interne.
Dans un régime rentier, la rente de base véhicule la capacité d'«intoxiquer», au travers les formes institutionnelles, le comportement des agents et des acteurs de telle façon que ces derniers se retrouvent incités à chercher à transformer les opportunités qui se présentent en lieux et formes de captation d'une rente. Le comportement rentier est une résultante de l'environnement institutionnel. Il s'agit là d'une idée largement admise aujourd'hui.
Usant d'une image, D. North(6) écrit que si l'activité la plus rentable dans une économie est le piratage, on peut s'attendre à ce que les agents et acteurs investissent dans les compétences et les connaissances qui feront d'eux de meilleurs pirates.
Telle semble être la difficulté première de l'activité productive dans un pays rentier comme l'Algérie : comment faire pour que les hauts rendements soient le fait de la production ? Autrement dit, comment faire pour que les acteurs s'orientent vers les activités de production aux lieu et place des activités spéculatives ou de services ?
La réponse à la question n'est pas aisée, mais il semble, à la lumière de l'expérience accumulée, que certaines configurations institutionnelles sont incompatibles avec la nécessité, constamment prônée dans le discours économique officiel, d'enclencher une dynamique de production. Il en est ainsi par exemple de la gestion du taux de change du dinar (surévaluation, en termes réels, de la monnaie nationale), du démantèlement douanier, du maintien d'un secteur public dont le fonctionnement demeure dominé par la logique clientéliste, etc.
Dans ces conditions, l'on ne peut ne pas évoquer l'idée simpliste selon laquelle les dépenses budgétaires consacrées à l'extension et la modernisation des infrastructures de base, principale caractéristique de l'action économique de l'Etat durant la décennie 2000, sont de nature à stimuler l'investissement productif privé. S'il est vrai que de tels équipements socio-économiques permettent de réunir les conditions matérielles nécessaires à l'investissement et à améliorer la compétitivité économique du pays, il n'en demeure pas moins vrai que l'investissement productif privé est tributaire d'autres facteurs institutionnels. Pour H. Benissad, ces conditions sont loin d'être réunies dans l'Algérie des années 2000.(7)
La question de l'efficacité productive ne se réduit pas à celle de l'émergence des relations concurrentielles, au développement du marché. En termes institutionnels, l'économie ne se réduit pas au marché qui, au demeurant, est lui-même une construction sociale.
C'est l'absence de projet de «cité industrielle» qui est le point faible des réformes, et non pas l'omniprésence de l'Etat ou son absence. L'expérience récente montre que la libération des comportements marchands, qui, par ailleurs, s'accommodent bien des relations clientélistes, ne suffit pas à engendrer une industrie compétitive apte à se placer dans le marché international. Et il serait naïf de croire à cet égard que l'IDE a vocation à moderniser les structures productives, tâche que seul un projet industriel national est à même de concrétiser.
Un autre exemple illustre l'inaptitude du nouveau mode régulation à «susciter» et piloter une dynamique d'accumulation en rupture avec la rente : il s'agit de l'usage qui est fait du crédit. On peut admettre qu'une gestion centralisée du crédit, gestion qui en l'occurrence peut reposer sur le caractère directement étatique d'une large majorité d'institutions bancaires et financières ainsi que sur le contrôle que l'Etat exerce sur l'accès au crédit externe, crée un canal de transmission entre la volonté politique de l'Etat, quand celle-ci est porteuse d'un projet industriel national, et l'action économique des agents privés.
L'arme du crédit demeure un puissant outil dans la soumission du monde des affaires à la volonté économique de l'Etat. Le contrôle étatique du système bancaire ouvre la possibilité que des objectifs économiques définis par l'Etat soient réalisés par les entreprises, quand bien même ces dernières sont pour l'essentiel privées. Mais à voir la configuration institutionnelle du système bancaire en Algérie, l'on ne peut que s'étonner du fait qu'en deux décennies de réformes, cet instrument n'ait jamais été mobilisé, d'une façon ou d'une autre, par l'Etat.
Il va sans dire qu'une gestion centralisée du crédit n'aurait eu pour but que l'encouragement de certains secteurs et activités en particulier, mais en l'absence d'un projet industriel, une telle gestion n'a pu être mise en œuvre. D'où le «spectacle» d'un système bancaire étatique livré à lui-même, fonctionnant à vue et croulant sous le poids de surliquidités oisives. A voir le contenu des changements dont est porteur le processus de libéralisation en Algérie, l'on se dit que le régime rentier a encore de beaux jours devant lui. Bien plus, le caractère rentier du régime semble s'être davantage renforcé, du fait notamment des nouveaux arrangements institutionnels que véhicule le nouveau mode de régulation.
Ce dernier se caractérise essentiellement par des incompatibilités avérées entre les régulations partielles qui le composent ainsi que par une inaptitude manifeste à piloter une dynamique d'accumulation qui soit autonome du secteur des hydrocarbures.

Notes de renvoi :
1) D'après le document «Arab Human Development Report 2002» du PNUD, l'Algérie est le pays arabe qui enregistre le plus bas niveau de productivité du capital physique, ce qui vient s'ajouter à une très faible productivité de la main- d'œuvre.
2) La privatisation n'est pas nécessairement synonyme d'efficacité, mais elle en est un préalable. En l'absence d'un environnement concurrentiel, pour ne prendre que cet aspect, le secteur privé ou le capital privé peut se révéler aussi inefficace que le secteur public.
Mais à la différence du secteur public, le secteur privé parvient toujours à s'assurer une rentabilité financière.
3) Yachir F. 1990. L'ajustement structurel dans le tiers-monde. Les Cahiers du CREAD, n° 21, Alger.
4) Schématiquement, le projet en question se propose de miser sur les avantages comparatifs «physiques» du pays en privilégiant le développement des activités industrielles grosses utilisatrices d'énergie.
L'industrie y est conçue, conformément à une vision morphologique de l'activité économique, comme un ensemble de filières techniques.
5) Yachir, op. cit.
6) North D. (2005). Le processus du développement économique. Editions d'Organisation, Paris.
7) Benissad H. (2009). «Algérie : du modèle de développement». El Watan des 23 et 24 mars 2009.


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