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«Il y a une forme d'hypocrisie des gouvernements»
Fabrice Marchisio. Avocat d'affaires, spécialiste du recouvrement d'actifs frauduleusement acquis
Publié dans El Watan le 14 - 03 - 2011

-Le gel des avoirs, comment cela se passe concrètement ?
Prenons par exemple le premier cas qui est intervenu chronologiquement, celui de Ben Ali. Le 4 février s'est tenu le conseil de l'Union européenne qui a adopté un règlement d'applicabilité direct, cela veut dire applicable dans chacun des 27 pays membres de l'Union. Ce règlement stipule le gel des actifs qui appartenaient à la liste des 48 personnes appartenant au clan Ben Ali qui ont été identifiées. Il définit de façon très large les actifs détenus directement ou indirectement, car que ce soit pour Ben Ali, El Gueddafi ou Moubarak, ces actifs ne sont jamais détenus directement par eux. Il y a souvent des fondations, des trusts, un enchevêtrement, des sociétés écran…etc. Et donc, le règlement de la Commission de l'Union européenne définit cela d'une façon très large. Il dit, en gros : interdiction à tout le monde de faciliter le transfert de ces actifs.
Cela fait peser sur tous les intervenants une responsabilité civile délictuelle colossale. Car, en tant que gestionnaire de patrimoine ou en tant que banque, vous n'êtes pas forcément au courant du bénéficiaire économique ultime de tous les fonds que vous gérez. C'est beaucoup trop compliqué. Imaginez que vous gérez un patrimoine et que quelqu'un vous demande de transférer 30 millions d'euros qui en réalité appartiennent à l'une des 48 personnes citées sur la liste. Vous faites le transfert sans savoir que vous faites bénéficier une des 48 personnes du clan Trabelsi-Ben Ali. Le jour où on se sera rendu compte que vous avez fait bénéficier cette personne, le gouvernement tunisien vous tiendra en tant que banque pour responsable, à partir du moment où le règlement existe et c'est à vous qu'on demandera de rembourser cette somme. Du coup, la véritable force de ce règlement c'est qu'il fait peser une épée de Damoclès sur tous les intervenants qui, aujourd'hui, continuent dans les faits à transférer des actifs.
-Pourquoi n'a-t-on pas agi avant ?
C'est une décision politique. Bien évidemment, le blanchiment d'argent par le clan Ben Ali-Trabelsi ou Moubarak n'a pas commencé le jour où ils ont été déchus. Cela fait des années (42 ans pour El Gueddafi, 30 ans pour Moubarak et 23 ans pour Ben Ali). Il y a une forme d'hypocrisie des gouvernements occidentaux. On attend qu'ils tombent pour déclencher les procédures.
-Et une complicité des banques aussi…
Bien entendu, il aurait dû y avoir des enquêtes ouvertes pour blanchiment bien avant cela. Mais cela relève d'une décision politique et évidemment une complicité de la part des banques. Ce qui se passe, c'est qu'aujourd'hui on est en train de parler de plusieurs dizaines de milliards d'euros qui sont gérés par beaucoup de banques. A mon sens, elles doivent aujourd'hui sérieusement s'inquiéter, en se disant que leur responsabilité civile délictuelle va être engagée. Il va y avoir une série de batailles judiciaires qui vont s'ouvrir et c'est sûr que les banques seront au premier plan.
-Et que risquent-elles ?
Elles risquent qu'on leur réclame de l'argent. Tous les milliards d'euros qu'elles ont contribué à dissimuler, un jour au l'autre les gouvernements vont aller rechercher leur responsabilité.
-Est-ce que le gel des avoirs garantit pour autant la restitution des biens détournés ?
Malheureusement, non. Lorsque vous faite de l'asset tracing, c'est-à-dire vous essayez de recouvrer les biens frauduleusement acquis, il y a plusieurs phases. D'abord, il faut identifier ces biens, ensuite, les geler et enfin les recouvrer pour le compte de votre client, en l'occurrence ici les peuples, qui ont été spoliés par leurs gouvernements. Malheureusement, il y a une inertie judiciaire qui fait que le processus prend des dizaines d'années. Par exemple, Marcos aux Philippines a quitté le pouvoir en 1986 et sa fortune a été évaluée entre 5 et 10 milliards d'euros. Il a fallu 17 ans pour que la Suisse donne 650 millions d'euros au gouvernement philippin qui n'est qu'une petite partie de sa fortune colossale. Même chose pour Jean Claude Duvalier à Haïti. 24 ans après, les procédures sont toujours en cours. Alors, pour la Tunisie, la Libye et l'Egypte, on est parti pour des années de batailles judiciaires.
-A combien estime-t-on la partie qui devrait être restituée ?
Une grande partie, nous l'espérons. Mais ça va mettre des années. Ce qu'il faut néanmoins savoir, c'est que pour financier le développement de ces peuples, financièrement, c'est très important. Un exemple concret, les 650 millions d'euros récupérés par le gouvernement philippin servent aujourd'hui à financer les réformes agraires dans ce pays. C'est 4% de son budget. Aujourd'hui, on est en train de se dire que si jamais on récupère toutes les sommes dont les peuples ont été spoliés, pour les 5 prochaines années cela va être crucial pour leur développement. Si vous prenez le cas de la Libye, par exemple, les experts ont estimé que chaque année il y avait une différence de 30% entre la richesse produite par ce pays et le budget de l'Etat. Cela veut dire que la famille Gueddafi reversait dans sa poche cette différence. Comme la Libye est un des plus importants pays producteurs de pétrole, cela se chiffre en milliards de dollars qui tombent chaque année dans l'escarcelle de la famille, parce qu'elle est aux manettes de l'Etat. Globalement, on parle d'une fortune de 5 milliards de dollars pour Ben Ali, entre 40 et 70 milliards de dollar pour la famille Moubarak, et plus de 100 milliards d'euros pour El Gueddafi.
-Après ce qui vient de se produire, peut-on s'attendre dorénavant à une autre manière d'agir de la part des banques étrangères ?
Je pense que oui, car le monde est en train de changer. Quand vous regardez l'attitude de la Suisse, cela a été l'un des premiers pays à décider du gel des avoirs. Ils ont été très réactifs de façon à rattraper un peu les erreurs du passé. Je pense qu'à partir de maintenant, ça sera plus difficile pour les dirigeants qui sont encore en place. Mais le plus gros problème reste l'inertie judiciaire. On vit dans un monde globalisé économiquement et financièrement, mais pas judiciairement, malheureusement. Ce qui se traduit par un déphasage entre les deux. Lorsque vous avez une problématique transfrontalière, les procédures prennent des années. Quand vous êtes un dirigeant et que vous voulez dissimuler 100 millions de dollars par exemple à l'étranger, ce n'est pas très compliqué. Cela prend à peine quelques jours. Mais le jour où vous êtes déchu, cela prendra des années pour les récupérer.
-Comment atténuer cette inertie ?
Il faut améliorer la coopération judiciaire effective, accentuer la pression sur les banques et aussi donner plus de moyens aux magistrats parce qu'ils sont submergés de dossiers et tout entre en ligne de compte.


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