Les chercheurs permanents du Commissariat à l'énergie atomique (Comena) ne décolèrent pas. Une semaine après leur sit-in à l'entrée du commissariat, ces chercheurs, essentiellement du Centre de recherche nucléaire d'Alger (CRNA, un des quatre centres relevant du Comena), réinvestissent la place avec les mêmes slogans et pour les mêmes revendications. «La recherche dans les laboratoires et non pas dans les administrations», «Chercheurs du Comena sont des chercheurs permanents» ou encore «Chercheurs en colère» sont quelques slogans accrochés à l'entrée du Comena. Toujours déterminés et armés d'un gisement inépuisable d'énergie, les protestataires, une centaine, dénoncent le silence de leur tutelle quant à leurs revendications qui, pour certaines, datent de plusieurs années. Le choix de la date n'a pas été fortuit. Les chercheurs protestataires, mobilisés depuis le début du mois de février, ont voulu jouer sur la symbolique. «Il était prévu que le conseil d'administration soit installé aujourd'hui (hier, ndlr). Mais la séance de l'installation a été reportée pour deux raisons : le quorum n'a pas été atteint et le ministre n'est pas venu», nous a expliqué un des manifestants contrarié. Par leur action de protestation, les chercheurs permanents du CRNA ont voulu informer les «nouveaux» membres du conseil d'administration de leur situation critique. Ils leur ont d'ailleurs adressé une lettre dans laquelle ils ont résumé l'essentiel de leurs doléances. A leur tête, l'application du nouveau régime indemnitaire tel que prévu par le décret exécutif n°10-250 du 20 octobre 2010. ASAL : cas de jurisprudence «Contrairement à tous nos collègues chercheurs permanents exerçant dans les établissements publics de recherche, quels que soient leurs secteurs d'activité, leur statut juridique ou encore leurs ministres de tutelle, nous n'avons pas bénéficié du nouveau régime indemnitaire», ont souligné dans la lettre les chercheurs permanents du CNRA, constitués en un collectif indépendant. Ils citent comme exemple le cas des chercheurs de l'Agence spatiale qui ont bénéficié du nouveau régime indemnitaire en dépit de son statut spécifique. Les protestataires ont également regretté le fait que l'installation du conseil d'administration du Comena n'a pas encore été effectuée. L'installation officielle devait avoir lieu il y a 5 mois, comme le spécifie l'arrêté de nomination qui date du 12 octobre 2010. «Le report de l'installation du conseil d'administration est déjà pour nous un manque de considération pour le secteur», peste un des chercheurs. «Nous tenons à informer les membres du conseil d'administration que notre situation perdure depuis plus de trois mois. En dépit de tous les éléments apportés dans des dossiers dûment étayés, nous tenons à dénoncer le mutisme et le mépris affichés par la hiérarchie et la tutelle face à nos différentes requêtes entamées le 25 novembre 2010 et qui sont restées sans suite à ce jour», ont-il écrit dans la même lettre dont nous détenons une copie. Outre l'application du décret 10-250 portant régime indemnitaire, les chercheurs permanents du CRNA exigent d'être associés à l'élaboration de leur statut spécifique qui définira leur avenir professionnel. «Ils nous disent que le statut particulier est en train d'être élaboré. Mais personne parmi les chercheurs n'a été mis au parfum. Il est de notre droit d'exiger d'être au moins informé des détails de ce projet qui va fixer notre devenir», dénonce un autre chercheur. Vers la radicalisation du mouvement
«Nos doléances actuelles dépassent largement le cadre strictement salarial et sont plutôt liées à l'environnement offert au chercheur permanent pour son épanouissement complet et sans contrainte aucune», précise le collectif, qui exprime dans un communiqué rendu public dans la journée d'hier toute sa préoccupation quant au devenir du secteur de la recherche nucléaire, un secteur aussi sensible et important pour l'avenir de l'Algérie. «Conscients des enjeux stratégiques et connaissant l'aspect attractif voulu par les plus hautes autorités du pays afin de rendre le secteur de la recherche nucléaire un pôle d'excellence sur tous les plans, nous tenons en tant que partie prenante de ces objectifs à être associés aux débats sur le choix des grandes orientations du secteur», est encore souligné dans le même communiqué. Les chercheurs du CRNA ne cachent pas leur inquiétude quant à leur avenir. «Nous ne comprenons plus ce qu'on veut faire de ce secteur. A nos requêtes, on n'a que du mépris. Nous demandons ainsi clairement aux responsables, au ministre de l'Energie que s'ils ne veulent pas ou ils ne peuvent pas gérer ce secteur de le confier à une autre institution plus habilitée à le faire», soutient un des chercheurs. Les protestataires ne comptent pas baisser les bras. Déterminés à aller jusqu'au bout de leurs revendications, ils affirment qu'ils mèneront d'autres actions. Un sit-in devant le ministère de l'Energie et des Mines ou devant la présidence de la République dans les prochains jours n'est pas à écarter.