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L'armée, t'bezniss ou le chômage
Arris, dans le massif des Aurès, est presque le bout du monde
Publié dans El Watan le 18 - 01 - 2006

On ne passe pas par Arris pour aller ailleurs. Si on prend la RN 31 qui mène jusqu'à Biskra, c'est à coup sûr pour aller à Arris ou dans sa région. A peine a-t-on pris cette route, dès le carrefour de Tazoult, où le relief change du tout au tout, où commencent les hauteurs, on a l'impression d'aller au bout du monde.
A 60 km au sud-est de Batna, le village où la petite ville d'Arris semble se lover ou se faire perdre dans le massif des Aurès. le jour de notre visite, le sommet des montagnes était blanc de neige, de loin nous pouvons dire que ces dernières n'ont rien à envier aux Alpes allemandes. bizarre, ce n'est plus comme avant, il fut une époque où la neige restait jusqu'au mois de mai », dira un vieil homme, qui nous citera Djebel Ouled Aïcha, Djebel Ben Bouslimane et plus loin Djebel Chelia, etc. Quand on dépasse T'zouket, le relief devient carrément lunaire, des pics rocheux, imposants, semblent avoir déchiré difficilement la terre meuble pour sortir et vouloir se lancer vers le ciel. Puis, quand on regarde, on ne voit que des maquis et des forêts de chênes et de pins. A partir du hameau Tibhirine, on quitte la commune d'Arris pour entrer dans celle d'Ichemoul (littéralement, la corne du cœur). Le long de l'oued Afra, au-dessous de la RN 31, des maisonnettes s'accrochent dans le petit espace entre la berge de l'oued et la route comme pour défier les crues ; elles sont entourées de vergers de pommiers, arbres squelettiques ces temps-ci, attendant le printemps pour feuiller et fleurir. D'autres maisonnettes au-dessus de la route sont collées ou creusées à même des pentes rocheuses. On revient de nouveau dans la commune d'Arris dès le hameau (mechta) de Tifartissine. On sort de la route qui longe l'oued, et nous voilà face à la vallée d'Ighzer Amellal (El Oued El Abiod). Au sommet du versant que nous empruntons, seul l'ancien village Arris est visible, qu'on reconnaît aux constructions de pierre, collées les unes aux autres parmi les ruelles, et qui s'égrènent en direction de la vallée, puis s'arrêtent, et ce sont des constructions coloniales qui continuent le chemin de part et d'autre de rues un peu larges. La petite ville d'Arris jette ses quartiers comme autant de tentacules, qu'on appelle « dechras », dechra d'Arris, In Arkeb, Hamellal (El Beyda), Radjou, Boussedah, etc. On voit au loin des Zhun, de grands ensembles, qui ne semblent pas à leur place, qui, il faut le dire, déparent la beauté naturelle, sauvage, des environs. L'aménagement de la ville laisse à désirer, ce qui a été fait, on le doit à la visite du président de la République effectuée en octobre 2003. Alors, « vivement les visites de ce genre », s'exclament certains jeunes. La ville manque d'espaces verts, quoique certaines artères soient égayées d'arbres. Sur le parvis de l'APC, il y a, comme l'a remarqué un citoyen, non pas des carrés de massifs et de fleurs, mais du béton peint en vert ! A côté, le buste de Mostefa Ben Boulaïd mérite toutes les fleurs épanouies du monde !
rien à l'horizon
Au niveau d'un rond-point en pente, plein de monde, qui se veut centre-ville, nous entrons dans un café. Derrière le comptoir, l'homme avec qui nous entamons une discussion s'y prête spontanément. Le chômage... Il quitte le comptoir, puis, nous tournant le dos et regardant dehors, il allume une cigarette. Après en avoir tiré une bonne bouffée, il fait volte-face, et hésitant un moment, vient s'attabler en face de nous. Il en a plein le cœur. Le chômage, tel est le maître mot qui revient dans la discussion. Agé de 64 ans, retraité de la SNLB, cet homme touche une pension mensuelle de 9000 DA. Il doit travailler dans un café pour arriver à s'assurer au moins le sac de semoule, nous dit-il. Cela fait six ans qu'il a déposé une demande de logement social, on la lui refuse parce qu'il en a un. « J'ai un logement de 3 pièces, que j'ai construit pour une famille qui est composée aujourd'hui de 14 personnes », ajoutera-t-il. Il nous parle de sa fille qui a une licence en droit, et qui postule pour un stage d'avocate. On lui met les bâtons dans les roues, puisque, d'après lui, on exige de l'avocat qui l'accepte d'avoir un cabinet spacieux, genre F4. A Batna, un avocat, lui a demandé la somme de 50 000 DA pour l'engager. Comment vivent les Arrisois du moment que c'est une région enclavée, isolée et qui est loin de se targuer d'être agricole et encore moins pastorale ? Selon le cafetier, « dans le passé, ce hameau, (situé sur une altitude de 1100 m), où le climat est plus clément comparativement aux autres régions sur les cimes du massif aurésien, constituait un refuge pendant les rigueurs des frimas, un ensemble de résidences (le mot est fort) hivernales pour les habitants des alentours ». Aujourd'hui, Abdelhamid Bouhdid, P/APC de Arris, ne cache pas son inquiétude quant aux ravages du chômage dans les milieux des jeunes. D'autant plus que les entreprises publiques, qui lors de la période du dirigisme absorbaient une bonne partie de la main-d'œuvre, tournent actuellement au ralenti, SNLB, Enaqs, une minoterie et enfin Sidba, une entreprise de wilaya de bonneterie, qui est fermée. Comptant quelques centaines de travailleurs, celles qui fonctionnent encore « marchent avec des béquilles », selon l'expression du P/APC. En dehors de ces unités, la zone industrielle, créée par arrêté ministériel en 1984, s'étalant sur une superficie de 75 ha, reste depuis en l'état, un parfait terrain vague. Selon Aïssa Fayçal, chef de service à la commune, chargé de l'urbanisme : « On veut relancer la zone industrielle, mais on bute contre un problème de foncier. » La zone comporte deux parties, une domaniale et l'autre privée, mais intégrée dans les réserves foncières communales. Beaucoup la réclament. Aussi, les investisseurs potentiels achoppent à la situation litigieuse du foncier. L'APC a ficelé un dossier en 2002 dans le but de régulariser la situation du foncier et l'a transmis aux services compétents de la wilaya. A ce jour, il n'y a eu rien. D'ailleurs, d'une façon générale, le foncier de la commune d'Arris n'est pas régularisé. Ce qui explique la rareté des projets, le problème du logement et celui de l'investissement. Donc, le statut juridique des terres pose problème. Comment vivent les 30 000 habitants que compte la commune d'Arris ? Selon certains, on y distingue trois catégories de gens. Il y a ceux qui sont engagés, ou qui s'engagent encore dans les rangs de l'armée, chaque famille, nous dit-on, a un ou deux militaires. Cela va du caporal au colonel. Mais pourquoi l'armée ? « Nous avons le BTS, enfin nous sommes du BTS (Batna, Tébessa et Souk Ahras) », dira en rigolant sans complexe un citoyen. Une autre catégorie englobe des fonctionnaires, du cadre supérieur au manœuvre, travaillant dans la commune, d'autres à travers la wilaya et d'autres encore en dehors de la wilaya. La troisième catégorie concerne ceux qui pratiquent l'agriculture vivrière, celle de montagne, ceux qui cultivent des vergers d'abricotiers et de pommiers depuis une dizaine d'années le long d'Ighzer Amellal, la population rurale est réduite à seulement un millier d'habitants. On compte aussi dans cette catégorie les « beznassa » qui s'adonnent aux petites affaires, faisant la navette entre Arris et d'autres villes, comme Batna, El Eulma, Sétif, etc. Ces petits commerces ont trait à tout ou presque, l'habillement, l'électroménager... Et puis viennent les bataillons de chômeurs. Le taux de chômage avancé au niveau de l'APC s'élève à 30%. Peut-être ce chiffre n'est pas précis, aussi il y a lieu de savoir que le nombre de demandeurs d'emploi inscrits à l'APC durant l'année 2005 est de 2795. Les cadres chômeurs recensés entre 1999 et 2005 sont au nombre de 1200. Et si l'on a 615 jeunes inscrits au filet social, 30 demandeurs attendent leur tour.
Perturbations de l'AEP, pollution d'Ighzer Amellal
Malgré les efforts accomplis dans ce domaine, l'autre problème dont souffrent les habitants est le manque de logement social. De fait, le nombre de demandeurs de logement social est de 2775, mais, en face, 24 logements seulement sont sur le point d'être distribués. Le foncier constitue un tel problème que, selon les propos d'un Arrisois, un terrain de 100 m2 s'est vendu dernièrement à 1 MDA (soit le mètre carré à raison de 10 000 DA), et qu'un F3 fait dans les 1 MDA, et encore c'est le pas de porte seulement ! Cette ville enclavée, qui se trouve à l'étroit à cause d'un inextricable problème de foncier, et où même un embryon d'investissement n'existe pas, vit aussi sous l'épée de Damoclès à cause des perturbations dans l'alimentation en eau potable. La régularité de l'AEP est tributaire des précipitations. Oui, c'est presque une lapalissade, mais c'est ainsi, quand il y a sécheresse à Arris, il n'y a pas une goutte d'eau, les nappes phréatiques n'étant pas remplies. De 1999 à 2003, une sécheresse terrible a sévi dans la région. Selon un habitant, parfois l'eau coule du robinet chaque jour, parfois un jour sur trois. Selon un responsable, ces temps-ci, l'AEP est régulière et suffisante. D'habitude, chaque jour on reçoit de l'eau, mais à partir de mai à fin septembre, il y a toujours quelques problèmes. A ce propos, responsables et habitants parlent du barrage de Coudiat Lemdouar dans la commune de Timgad réalisé il y a quelques années. Le barrage de Beniharoun dans la wilaya de Mila est censé régler l'AEP de plusieurs wilayas, nous apprend-on. Pour la wilaya de Batna limitrophe à cette dernière, la barrage de Beniharoun doit alimenter, nous dit-on, celui de Koudiat Lemdouar, lequel approvisionnera entre autres régions celle d'Arris. Actuellement, les travaux d'adduction du barrage Coudiat Lemdouar vers la ville de Barika sont en cours. Alors, à quand le tour d'Arris ? Aussi, selon certains cadres de la commune, convaincus de leurs propos, le raccordement avec Coudiat Lemdouar et le curage des puits existants régleront le problème de l'AEP à Arris. Par ailleurs, si la beauté de la vallée d'Ighzer Amellal a été relevée, il faut dire aussi que l'oued ne mérite plus le qualificatif de blanc qu'il porte depuis des millénaires, mais plutôt celui d'« aberkane » (noir), car les eaux usées de plusieurs communes, en le polluant, le rendent ainsi. On peut en citer Arris bien sûr, Inoughissène, Ichemoul, Tighanimine et Ghassira. L'on parle d'un projet d'assainissement et d'épuration de cette vallée. L'étude a été réalisée, ayant coûté 4,09 millions de dinars. Reste la réalisation du projet qui est en phase du choix de terrain. Avant cela, un projet de Step de cette vallée conclu avec la société française Degremont (France), avait été résilié pour une raison ou une autre. Soucieux de l'essor de leur région, certains habitants insistent sur le développement rural, l'habitat rural, la consolidation des pistes avec du tout-venant, car les pistes classiques s'en vont dès les premiers jours de l'hiver. Il ne faut pas omettre l'électrification rurale. Selon un cadre de la commune, la couverture n'en est qu'à 50%. A écouter certains, pour désenclaver cette région du massif aurésien, et partant lui assurer un essor certain, il n'y a qu'une solution : ériger Arris au statut de wilaya. Cela a même été réclamé auprès du président de la République lors de sa visite. A défaut de cela, pour rendre cette région viable, trépidante de vie, l'on demande d'y installer au moins une annexe universitaire, une caserne ou une école militaire...
Avant tout, les routes...
Au fond, les potentialités touristiques de cette région ne sont pas à relever, puisqu'on les connaît et même mondialement. Il y a les cités typiquement berbères, telle que Balloul, avec ses maisons de pierre à plusieurs étages, les gorges ou le canyon, dans la commune de Tighanimine, faisant partie de la daïra d'Arris, les gorges du Rhouffi dans la commune de Ghassira, à environ 33 km d'Arris, le site pittoresque des Aurès, etc. Cette région attirait dans le passé les touristes, et il y avait même un hôtel à Arris dans les années 1980, qui malheureusement avait été transformé en bureaux par les responsables de la commune. Mais avant de parler de tout cela, le désenclavement veut dire les voies de communication, il s'agit de réaménager les routes, dont la plupart sont creusées à flanc de montagnes, et qui sont donc forcément étroites. Si la RN 31, allant de Batna à Biskra et passant par Arris, est concernée par un projet de réaménagement, la route de Khenchela-Arris, chemin de wilaya n°54, s'étendant sur une centaine de kilomètres, nécessite une réfection, surtout le tronçon Arris-Bouhmama, soit une quarantaine de kilomètres, où la route est presque impraticable. Avec ces voies d'accès à Arris, les voyageurs khenchelis ou tébessis pour Biskra par exemple, au lieu de prendre la RN 3, passant par Batna, gagneront du temps, et la ville en question gagnera en accroissement des activités commerciales. On quitte Arris ayant en tête plein d'anecdotes. En voici une : il y a quelques années, une vieille femme était en train de laver son linge dans l'oued, quand elle a vu une flopée de gens passer, elle s'est mise à lancer des youyous. On lui a dit qu'il s'agissait d'une marche de barbus. Interloquée, elle se reprend et se remet à cracher et à lancer des récriminations. Lors de la nébuleuse islamiste, Arris, la ville de Ben Boulaïd, était la cité interdite au Fis. En 1991, pendant la campagne électorale, en allant à Arris, Abassi Madani a dû faire demi-tour. On lui avait signifié par pancartes et graffitis interposés en substance cela : « Fi Arris yentahi El Fis » (A Arris finit le Fis). Arris était le bastion de la révolution contre les colonisateurs, bastion qui ne peut se permettre de gommer ce mérite pour se soulever contre ses propres citoyens. Si certains se qualifient de durs, disant que si on ne l'est pas on ne peut vivre dans cette nature qui ne l'est pas moins, les Arrisois sont réputés pour leur droiture et leur esprit d'équité. Ils parlent le chaoui pur et ainsi le sauvegardent parfaitement, si bien qu'ils parlent l'arabe avec un certain accent, beaucoup commencent à parler l'arabe en l'apprenant à l'école. Ce sont des gens qui voyagent, qui, faciles à vivre, s'adaptent bien, mais n'oublient jamais leurs pénates, car ils y retournent. Assurément, ce sont des gens tranquilles et accueillants.


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