Les élections législatives, qui se sont déroulées jeudi, ont apporté avec elles d'intéressantes statistiques, malheureusement incomplètes. Encore une fois, la faute aux spécialistes réfractaires ou tenus à l'écart d'un monde aussi profond que riche de par les enseignements qu'il peut apporter à l'ensemble de la société. Ainsi en est-il du taux de participation, objet de tous les regards, mais aussi de tous les discours jusqu'à celui du chef de l'Etat qui appelait, à tout juste quarante-huit heures du scrutin, les Algériens à participer massivement au vote. Même les candidats tentaient de convaincre les opposants et les indécis. On ne peut pas dire que ces appels sont demeurés vains, la participation étant plus élevée que lors du scrutin de même nature d'il y a cinq années, avec 42,90% contre 36,51% en 2007. Il n'y a pas eu de grand écart, ou de grand bond, comme pouvait l'indiquer l'intérêt porté à la campagne électorale. Ceci en valeur relative, comme disent les spécialistes, car en termes réels, la différence se mesure en millions d'électeurs, et ceci relativement au corps électoral qui a connu lui aussi une nette augmentation. Tel que rapporté par les statistiques, l'écart ainsi enregistré est substantiel, et peut être interprété comme un sursaut. Il reste que l'un n'explique pas l'autre, ou encore ne lui est pas lié, car voter constitue toujours un acte personnel et volontaire, lié à un certain nombre de considérations. Entre autres, le contexte électoral, les forces en présence et l'enjeu des élections. Ou encore les promesses des uns et des autres, encore que sur ce point, les électeurs algériens ont pris leurs distances et depuis bien longtemps avec l'acte de voter. Différentes statistiques laissent comprendre que la baisse est tendancielle, ou encore à quelques très rares exceptions, que c'est un phénomène social qui n'a pas attendu l'émergence du multipartisme. Comme cela se dit, il y a des traditions de vote, jusque dans leur déroulement, des populations votant plus tôt que d'autres. Si sous d'autres latitudes, des élections ont été remportées avec une différence de quelques centaines de milliers de voix, autant dire d'elle qu'elle était infime, puisque cela valait tout juste quelques centièmes de points, celle de jeudi en Algérie a attiré tout de même quelques millions d'électeurs supplémentaires, par rapport, bien entendu, à 2007. Qui sont-ils et pour qui ont-ils voté ? A vrai dire, c'est un gisement de voix susceptible à lui tout seul de faire basculer une élection en lui donnant d'autres contours, et remodeler une carte électorale que l'on croyait déjà établie si, bien entendu, les craintes exprimées avant le vote s'avéraient fondées. Les études sur ce sujet n'existant pas, il est difficile sinon infondé de croire ou de conclure que ces millions de voix ont fait la différence, sauf en ce qui concerne la participation, la seule certitude étant qu'elles n'ont pas profité aux nouveaux partis. Dans un tel cas, l'opposition ou le refus de voter s'expliquent aussi et peut être surtout par des listes et des programmes qui n'ont pas convaincu, étant entendu qu'il y a eu aussi des expériences malheureuses, sinon décevantes. A ce titre, le FLN que l'on disait affaibli par des crises internes, en a-t-il alors profité ? A ce stade, aucune conclusion sérieuse ne peut être tirée, puisqu'à l'inverse, si l'ancien parti unique est sorti victorieux, d'autres formations ont été tout simplement laminées. Le vote étant personnel et secret, des études pourraient alors approfondir une telle question. Les Algériens attendront.