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«Le radicalisme musulman violent est ultra minoritaire»
Samir Amghar. Sociologue
Publié dans El Watan le 28 - 10 - 2012

Samir Amghar est docteur en sociologie, chercheur au Centre d'études et de recherches internationales de l'Université de Montréal et consultant au ministère suisse de la Défense. Il est l'auteur de Le salafisme d'aujourd'hui. Mouvements sectaires en Occident (Editions Michalon, 2011). Un ouvrage collectif, Les islamistes au défi du pouvoir. Evolutions d'une idéologie» (Editions Michalon, 2012) a été publié sous sa direction.
- Des islamistes radicaux, des terroristes ou présumés terroristes français, ce n'est pas un phénomène nouveau. Qu'est-ce qui fait la particularité des membres de la filière récemment démantelée ?

Vous partez d'un présupposé Algérien. C'est-à-dire qu'une personne française d'origine étrangère est assignée à une ascendance. Khelkal était Français, mais on le renvoyait à son origine algérienne. C'est aussi le cas de Mohamed Merah.

- Il y a aussi des convertis ?

Il faut partir du phénomène de conversion d'une manière générale. On observe deux types de conversion : une conversion qu'on pourrait qualifier d'instrumentale, dictée par des raisons particulières, en-dehors d'une recherche identitaire ou spirituelle, comme le mariage avec une musulmane, une conversion exigée par la famille de la jeune femme. La seconde forme de conversion relève d'une conviction personnelle. La conversion est un phénomène assez ancien en France. On trouve des cas de conversion dès la IIIe République, des conversions qui étaient dans leur très grande majorité élitistes, de la part d'intellectuels, d'hommes politiques, d'artistes.
La conversion évolue et se «popularise» à partir de l'implantation progressive de populations musulmanes en France, lorsque des non-musulmans issus de quartiers populaires qui ont fréquenté des jeunes de confession musulmane décident, pour différentes raisons, de se convertir à l'Islam. On estimerait le nombre de convertis à l'Islam en France entre 30 000 et 50 000.

- Mais ceux-là ne posent pas de problèmes à la collectivité ?

Bien évidemment. Dans les filières salafistes ou djihadistes, il y aurait entre 20 et 30% de convertis. Il y a une surreprésentation de convertis dans ces filières-là.

- Comment l'expliquez-vous ?

Ces convertis se dirigent vers ce type d'Islam extrême ou orthodoxe pour deux raisons essentielles. Tous les itinéraires de conversion sont des itinéraires de rupture, il y a toujours un avant et un après. Et quand on se convertit, on veut marquer ce passage, et une des manières de marquer ce passage c'est d'épouser l'Islam radical. La deuxième raison relève d'un déficit d'islamité chez les convertis. C'est-à-dire qu'ils ont le sentiment de ne pas être suffisamment musulmans parce qu'ils ne sont pas issus d'une famille de tradition musulmane. Ils n'ont pas d'étalon de pratique religieuse.

- Où se convertissent-ils ?

La particularité de la théologie islamique, c'est qu'il est facile de devenir musulman. Là où le judaïsme ou le catholicisme exigent des années de formation, l'Islam impose des conditions souples. Ces conversions se font soit à la mosquée soit auprès d'amis, soit auprès d'autorités religieuses.

- On a beaucoup dit que de nombreux jeunes se sont radicalisés dans les prisons. Qu'en pensez-vous ?

C'est vrai que la prison est un vecteur de radicalisation, mais on peut dire aussi le contraire, dans le sens où la prison peut être un vecteur de déradicalisation.

- Vous avez parlé tout à l'heure de salafistes et de djihadistes. Le djihadisme ne dérive-t-il pas du salafisme ?

Tout salafiste n'est pas un djihadiste, et tout djihadiste n'est pas forcément un salafiste. Un exemple, le Hezbollah libanais, organisation chiite, se réclame de l'idéologie djihadiste. Le Hamas palestinien, de la filière des Frères musulmans, a une branche militaire qui s'est lancée dans le djihad. L'AIS algérienne était à la fois un bricolage de salafisme et d'éléments des Frères musulmans. Il y a trois grandes catégories de salafistes : les piétistes qui considèrent que leur activité principale doit se concentrer sur la prédication religieuse et la purification, d'autres considèrent que le salafisme doit être politique, c'est le cas par exemple de Hezbennour en Egypte, et enfin le salafisme djihadiste qui prône l'action armée.

- Comment se présente la situation en France ?

Dans les années 90, le djihadisme français était très fortement marqué par la réalité algérienne. Il y avait chez les djihadistes algériens (GIA ou GSPC) l'idée d'exporter la lutte armée en France, considérée comme l'alliée de l'Etat algérien. Des Français issus de l'immigration algérienne, mais aussi marocaine et tunisienne étaient actifs en France, ainsi que des convertis. Le djihadisme algérien décline progressivement, après les attentats de 1995 à Paris, d'autant qu'en Algérie il connaît de sérieux revers. La Concorde civile a permis d'achever le déclin des djihastistes en Algérie. On voit émerger en France une sorte de djihadisme franco-français. Mohamed Merah en est un.

- Ce djihadisme est-il lié à la situation internationale ou alors ses causes sont strictement françaises ?

Je ne pense pas que les facteurs internationaux constituent des facteurs centraux d'explication de la montée de ce djihadisme franco-français. On a souvent mis en avant le caractère antisémite de ces réseaux, ils sont effectivement antisionistes, mais je ne pense pas que le conflit israélo-palestinien soit un facteur déterminant, c'est sûrement un facteur aggravant. Dans une certaine littérature musulmane, le juif est présenté comme celui qui a trahi le prophète de l'Islam. Or, chez les djihadistes français le juif est perçu comme celui qui est partout, qui est à la tête de la finance mondiale, qui est dans le monde politique français, dans le monde médiatique, scientifique… C'est un antisémitisme emprunté à l'extrême droite française, à la classe politique française des années 1930.

- Quelle est l'ampleur de l'Islam radical en France ?

La radicalité, c'est d'aller à la fois à la racine et de s'éloigner du centre. La radicalité s'exprime à trois niveaux : un niveau sectaire, celui de ne pas reconnaître les valeurs de la société et de fonctionner en vase clos ; ne pas être d'accord avec la société et faire entendre sa voix par des moyens légaux ; la seule manière d'exprimer son désaccord, c'est par la violence et l'utilisation des armes. Je pense que la radicalité de type sectaire est la plus importante.

- Et la radicalité violente ?

Elle est ultra minoritaire au sein des musulmans et au sein de ces trois formes de radicalisme. Je l'estimerai de quelques dizaines à quelques centaines d'individus.

- Est-ce qu'on peut parler d'Islam de France ? Ou diriez-vous Islam en France, voire Islam au pluriel ?

Oui, je mettrai un pluriel à Islam en France. Les institutions qui représentent le culte musulman représentent en réalité un Islam en France, dans la mesure où elles sont liées aux pays d'origine (Algérie et Maroc, principalement). On est loin d'un Islam institutionnel de France. Par contre, au niveau de la base, on assiste à l'avènement d'un Islam de France porté par des personnes qui sont issues de l'immigration musulmane, qui se sentent certes musulmanes, pratiquantes, mais profondément françaises.

- N'y-a-il pas de heurt entre cette islamité affichée et revendiquée et l'intégration à la société dominante ?

A mon sens, il n'y a pas d'antagonisme entre le fait d'être musulman et citoyen. Des responsables musulmans développent l'idée d'un Islam intégrationniste, la possibilité de se sentir français tout en pratiquant l'Islam de type orthodoxe. La particularité de ces mouvements est de dire qu'il est possible d'exprimer sa religiosité dans l'espace social et dans l'espace public, sans que cela pose problème. Et même de défendre au nom de la démocratie son identité religieuse, la possibilité d'ester en justice devant des tribunaux administratifs lorsque telle femme est expulsée d'un lycée ou d'un poste de travail.

- N'est-ce pas une contravention à la loi sur l'interdiction de signes religieux ostentatoires dans des lieux publics déterminés ?

C'est là où il y a une tension. Dans quelle mesure la laïcité à la française peut-elle s'accommoder de la liberté de conscience chez les musulmans, la possibilité d'exprimer pleinement leur appartenance religieuse ? Le phénomène musulman en France est récent, sa visibilité est récente, il faut laisser le temps au temps, et laisser à la société française le temps de réaliser et d'accepter que le phénomène islamique en France s'est sécularisé.

- Comment observez-vous les bouleversements produits par les printemps arabes ?

A partir du moment où on s'ancre dans des logiques révolutionnaires, il faut accepter que le pays qui épouse ces logiques révolutionnaires entre dans une période d'instabilité à la fois politique, économique et sociale qui peut durer quelques décennies, voire un ou deux siècles. Ce fut le cas en France qui, après la Révolution de 1789, a connu une succession de régimes.

- La Tunisie peut-elle basculer dans un régime islamiste ?

Avec l'exercice du pouvoir, on s'aperçoit que les islamistes tunisiens tendent de plus en plus à se durcir. L'islamisme en Tunisie entre en écho avec le conservatisme social et moral d'une partie de la Tunisie. La société tunisienne, comme les autres sociétés maghrébines, a un mode de fonctionnement ultra conservateur.


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