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«Une puissance financière au service d'un agenda politique»
Nabil Ennasri. Diplômé de sciences politiques
Publié dans El Watan le 14 - 01 - 2013

Nabil Ennasri est doctorant à l'Université de Strasbourg et chercheur à l'IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), spécialiste du Qatar. Parmi ses ouvrages, l'énigme du Qatar aux éditions de l'IRIS qui doit paraître en mars prochain.
-L'Algérie vient de signer 8 accords de coopération et partenariat avec le Qatar. Ce dernier n'étant pas une puissance économique ou industrielle mondiale en-dehors du secteur gazier, quel est l'intérêt pour l'Algérie, qui elle dispose d'une importante manne financière ?
Le Qatar comme l'Algérie est à la recherche d'une diversification de son économie à travers des investissements à l'étranger dans des pays qui offrent suffisamment d'opportunités et de stabilité dans ce contexte de crise économique et de remous politiques dans les pays arabes. Or, si vous prenez la carte des pays arabes aujourd'hui, il est difficile de trouver un pays qui conjugue stabilité politique relative et perspectives économiques prometteuses. L'Algérie est dans cette situation. Par ailleurs, le Qatar possède d'importantes réserves gazières et l'Algérie de son côté est un important acteur sur le marché gazier et pétrolier et face à la concurrence mondiale dans ce domaine, notamment de la Russie ou de l'Iran, il est stratégique de faire des alliances. C'est donc un intérêt commun.
-Le Qatar joue un rôle de plus en plus important sur la scène économique et diplomatique mondiale. Qu'est-ce qui lui confère aujourd'hui cette importance ?
Le Qatar s'est engagé depuis la prise du pouvoir du Cheikh Hamed en 1995 sur une politique d'influence stratégique, du Soft Power, celle de l'utilisation de l'image à des fins d'agenda politique. Il est certainement aujourd'hui l'Etat qui fait le meilleur usage de cette diplomatie du rayonnement, du prestige et de l'implication tous azimuts. On est dans une stratégie élaborée qui a été mise en place et qui a été vulgarisée dans le Qatar national vision 2030 et qui doit faire du pays l'un des moteurs à la fois du monde arabe, voire de la scène internationale à cet horizon.
Le Qatar est assis sur une réserve de gaz quasiment inépuisable (3e réserve mondiale), il exporte quasiment un million de barils/jour et il a donc des perspectives de croissance absolument ahurissantes. Il a un réservoir financier qui lui donne les moyens de ses ambitions, lesquelles consistent à rayonner le plus possible. Cette politique correspond également à des aspirations de sécurité. Le Qatar est au milieu de la région du Golfe qui est une région trouble et volatile, et il a une conscience aiguë de son impuissance relative. Le pays est coincé entre l'Arabie saoudite et l'Iran, et pour pouvoir exister, il n'a pas d'autre choix que de faire du bruit d'une certaine manière. Il a compris qu'à l'heure de la mondialisation, les nouveaux rapports de force internationaux ne se jouent plus tellement dans le hard power, mais davantage dans le soft power. Le Qatar, c'est en somme une puissance financière au service d'un agenda politique.
-Sur le plan économique, le Qatar se déploie à l'international à travers des investissements dans des entreprises et l'acquisition d'actifs partout dans le monde. Qu'est-ce qui favorise ce déploiement ?
Cela répond aussi à un impératif stratégique. C'est-à-dire que le Qatar souhaite maximiser le plus possible les relations communes avec un certain nombre de pays qui comptent. Parce que pour pouvoir garantir sa sécurité, il avait besoin de deux choses : il s'est assuré du parapluie américain, ainsi que d'une certaine présence médiatique avec Al Jazeera, mais dans un troisième volet il va s'assurer des intérêts communs avec un certain nombre de pays qui vont être liés à son avenir.
C'est pour cela qu'il cible la France et d'autres pays du monde arabe, parmi lesquels l'Egypte et certainement l'Algérie. Autant les investissements récents en Algérie interviennent dans une perspective économique de mutualisation, d'un partenariat économique ambitieux, mais en même temps avoir des liens de plus en plus solides avec l'Algérie comme avec la France, les Etats-Unis ou l'Egypte, c'est presque lier l'avenir du Qatar à ces pays importants. On est à la fois dans une espèce de stratégie d'intérêts politiques liés à des investissements économiques de sorte à avoir des intérêts communs et partagés.
-Si le monde et l'Europe en particulier ne traversaient pas une période de crise économique, le Qatar aurait-il les mêmes possibilités et opportunités ?
En tout cas, il aurait les ambitions et l'argent est le bienvenu d'où qu'il vienne. Maintenant, c'est certain que la crise économique que traverse l'Europe, et qui à l'air de s'installer, donne aux investissements qataris une dimension supplémentaire d'intérêt. C'est sûr que quand vous investissez dans un pays qui a 5% de croissance, vous êtes un investisseur parmi d'autres et vous avez un poids relatif inférieur que si vous êtes dans un pays comme la France où la croissance tâtonne et où on va titiller l'ensemble des investissements de la planète. Le Qatar profite donc d'une conjoncture économique dans la zone euro extrêmement faible, qui fait que ses intérêts sont courtisés, ce qui donne à ses investissements économiques une portée stratégique et politique très importante.
-En France, l'annonce d'un fonds d'investissement pour les banlieues, l'acquisition du club de foot parisien, le PSG, ou encore des investissements dans des fleurons de l'industrie française suscitent beaucoup de controverses. Pourquoi ?
Le premier élément, selon moi, c'est qu'en France, il y a une partie de la classe politique et médiatique qui restera mal à l'aise vis-à-vis d'une relation avec le monde arabe. On est toujours dans une espèce de logiciel d'arrière-garde, un logiciel presque néo-colonial vis-à-vis de ce qui se rattache à l'Islam, au monde arabe. On conçoit les relations avec le monde musulman d'une manière générale et particulièrement avec les pétro-monarchies sous l'œil de la méfiance et de la suspicion, parce que la France a un problème avec l'Islam, avec le monde arabe et qu'elle n'a pas encore digéré la guerre d'Algérie.
Tout cela se télescope et crée une espèce d'ambiance de méfiance qui porte préjudice aux intérêts qataris aujourd'hui. Le deuxième aspect est que les élites françaises et occidentales voient l'intrusion d'un nouveau pays qui, hier encore n'existait pas et qui, aujourd'hui, est devenu quasiment la capitale de la planète. Ce basculement du centre de la planète qui se déplace vers l'Est et qui rend mal à l'aise des élites qui ont toujours été habituées à être le centre du monde et qui aujourd'hui ont cette image de s'être retrouvés à quémander des intérêts de ce mini-Etat du Golfe (j'ai assisté à des débats où on les qualifiait de misérables bedouins) qui hier n'était que désert et aujourd'hui devient capitale du luxe, du sport, de la culture et des médias et qui en train de «racheter la France», selon les couvertures des magazines, mais là on est plus dans la caricature qu'autre chose.
-Qui sont les alliés du Qatar dans sa stratégie d'influence économique, politique et sportive ?
Il faut savoir que le Qatar essaye de s'acheter des alliés, et pendant un moment il avait beaucoup d'amis, il n'avait quasiment que des amis. Aujourd'hui, les choses ont changé depuis le déclenchement des «printemps arabes». Ce qu'il essaye de faire, c'est qu'en proposant ses services et notamment ses investissements, il joue sur la corde financière et économique pour pouvoir gagner des amis. On est dans un monde d'intérêts et le Qatar avec sa richesse financière peut être le courtisan des grands de ce monde. En France par exemple, vous n'avez quasiment aucune évolution entre l'ère Sarkozy et celle de Hollande. Et les autorités qui ont été le plus reçues aujourd'hui en France depuis l'accession de François Hollande ce sont les autorités qataries qui ont continué à investir autant en France qu'avec la précédente présidence. Quand vous avez une puissance financière qui vous permet d'investir un peu partout et que vous avez choisi un pays comme la France pour en faire un laboratoire de votre entrée dans le paysage européen, alors vous mettez les moyens qui vont avec. Quand vous engrangez 50 milliards de dollars de surplus à l'année, vous avez les moyens de votre politique.
-Cette influence est-elle construite sur des voies formelles, ou alors y a-t-il du lobbying qui est fait, de la corruption comme cela a été évoqué pour l'organisation de la coupe du monde ?
Je pense que le Qatar, c'est comme tous les autres pays. Vous avez pris l'exemple de la Coupe du monde ; si on fait le procès du Qatar et qu'on lui reproche de l'avoir achetée, on doit le faire aussi pour les autres pays. Tout le monde connaît le fonctionnement quasiment semi-mafieux de la FIFA. Si le Qatar a obtenu l'organisation en l'achetant, c'est pareil d'une certaine manière pour le Russie (2018) et c'était aussi pareil pour la France (1998). Là, on est dans des enjeux colossaux et faire le procès uniquement du Qatar c'est aller un peu vite en besogne. Le Qatar est comme les autres pays, il a des intérêts, il veut les défendre.
-Cette influence va-t-elle durer et à quelles conditions ?
Cela dépendra de certains paramètres aussi bien internes qu'externes. Sur le plan externe, certains pays commencent à en avoir assez de cette influence grandissante du Qatar ; j'entends par là la Syrie dont le régime s'est juré de se venger contre ce qu'il considère être des tentatives de déstabilisation du Qatar, mais aussi l'Iran, la Russie. Au niveau interne, il est à se demander si l'émir, malade, pourra résister à la pression de son premier ministre. Par ailleurs, on commence à ressentir à l'intérieur du pays une sorte de ras-le-bol par rapport à la démarche des dirigeants et sa conception d'un Islam moderne. Les activités de Sheikha Mozah, épouse de l'émir, sont considérées comme un peu trop expansionnistes. On considère finalement que les choses étaient mieux avant. Par ailleurs, la perspective de la coupe du monde 2022 avec le déferlement de milliers d'étrangers attendus et avec ce que cela va engendrer consommation d'alcool et de relations débridées risque également de poser problème.


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