On ne peut évidemment jamais développer une région avec l'esprit de clan ou tribal, donc tournons en rond. La wilaya de Souk Ahras est victime d'un raisonnement tribal qui ne trouvera fin qu'avec l'émergence de la génération facebook, et encore, faut-il espérer que le carcan génétique soit réellement oublié des esprits de ceux qui des décennies durant ont subi sentences et recommandations. Les partis politiques, le FLN à leur tête, sont responsables de la pérennité des idées rétrogrades dont cet esprit de corps pathologique entre enfants d'un même patelin. «On était à la kasma et, croyez-moi, aucune personne sans appartenance tribale ne pouvait prétendre à une candidature pour une quelconque assemblée», nous dit un militant de l'ex-parti unique, tout heureux d'avoir défendu des décennies durant ce principe réducteur pour une formation issue et hissée par tout un peuple. L'idée est encore de rigueur même si ses partisans la perpétuent à demi-mot. Mohamed Boumessaâd est natif de Souk Ahras tout comme son père. Il n'a jamais eu son logement et c'est lui-même qui explique la cause d'un niet que toutes les commissions d'attribution de logement ont affiché à son encontre depuis les années 1970. «Je n'ai pas de tribu installée à Souk Ahras et on me l'a déjà dit à maintes reprises», a-t-il déclaré. Il vit dans un hôtel du centre-ville et les cinq membres de sa famille, chez des proches. A en croire un livre édité récemment par la wilaya, Souk Ahras n'a connu de révolution que dans deux communes où est né l'unique rédacteur dudit livre. Toute la bande frontalière avec ses six communes, la région nord, les montagnes de Sedrata, de M'daourouch et toutes les autres régions martyres ont été sous classées à la faveur de la région du rédacteur-député. Le recrutement et les promotions à des postes supérieurs ne sont guère justifiés par la compétence ou le dévouement à ses responsables. C'est surtout le cousin d'Alger lui-même propulsé par ses aînés qui use et parfois abuse de son statut pour tirer gain de cause. «Sept cousins et, ce n'est pas encore fini, ont été imposés en même temps dans une seule institution publique», nous a confié un employé d'une structure de contrôle locale qui affirme avoir constaté des cas pires, notamment du coté du département de Harraoubia. Voici une histoire connue de tous les habitants de Souk Ahras: l'auteur d'un vol qualifié au sein d'une administration publique pris en flagrant délit n'a jamais connu de suite. La responsabilité pénale de cet homme connu pour une forte présence de sa famille au sein du circuit judiciaire, a été écartée par la présentation d'une vraie fausse carte d'hygiène mentale. Le même auteur du vol a été retrouvé sur une liste d'élus et la carte en question a disparu des archives. Une wilaya qui aspire à un statut meilleur ne saurait venir à bout d'un chômage latent, d'une crise endémique du logement, de la corruption, d'une justice aux ordres et d'un sous-classement programmé avec des idées surannées.