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France : optimisation, évasion et fraude fiscales : rétrécissement des frontières
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Publié dans El Watan le 16 - 12 - 2013

Même si le Conseil constitutionnel en France vient de censurer une partie de la loi sur la fraude fiscale, la délimitation entre l'évasion fiscale et la fraude fiscale se rétrécit et inquiète les parties prenantes concernées directement ou indirectement par ces pratiques.
Les définitions sont souvent nuancées selon les sources
Très souvent, les contribuables considèrent le contournement de l'impôt fondé car justifié par le recours à des dispositifs de lois ou à des montages élaborés, convaincus que l'évasion fiscale est légale car elle permet d'éviter ou de réduire l'impôt souvent par une expatriation, ou encore par une utilisation de brèches des lois fiscales qui se différencie de l'optimisation fiscale, laquelle s'obtient par l'usage de montages adossés à des dispositifs de loi.
Du côté de l'administration, les définitions sont moins nuancées par rapport au fait inéluctable que le contribuable aura payé moins d'impôts que ce dont il est légalement tenu, en dissimulant des revenus ou des informations aux autorités fiscales. C'est ainsi que l'exercice perpétuel des amendements de lois fiscales vise à corriger les failles desdites lois et à faire obstruction à toutes les voies de contournement de l'impôt.
A l'opposé, la définition de la fraude est moins ambiguë puisque dans ce cas le contournement de l'impôt est délibéré. Souvent punie pénalement, la fraude est caractérisée par un détournement illégal d'un système fiscal. Le contournement délibéré consacre l'élément intentionnel constitutif de l'infraction, d'autant que dans les cas avérés de fraude, la loi contournée est formulée sans ambiguïté et sans possibilité de contournement. Les nuances diversifiées des définitions découlent en fait des spécificités de lois fiscales différentes d'un pays à un autre.
Les récents débats parlementaires en France sur le projet de loi contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière ont démontré la pertinence du renfort de l'efficacité de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale. Par ironie du sort, alors que le Conseil constitutionnel français vient de censurer une partie de la loi, alors qu'elle prévoit justement pour les associations de lutte contre la corruption la faculté d'exercer les droits de la partie civile auprès des juridictions, voici que l'ONG Tax Justice Network(1) classe la France au 43e rang du palmarès des pays sur l'opacité financière sur une liste de 82 pays dans leur capacité à lutter contre les paradis fiscaux.
Si le Luxembourg et la Suisse sont encore aux premières places, d'autres pays européens ont encore beaucoup d'efforts à faire dans un contexte de crise où tous les moyens sont étudiés pour réduire les déficits budgétaires, car autant la fraude fiscale que l'évasion fiscale réduisent les recettes des pouvoirs publics. Ces comportements se compliquent lorsqu'ils sont pratiqués de façon transnationale avec des pays qui présentent des lacunes dans leur législation fiscale, contribuant de la sorte à l'opacité financière.
Effervescence au parlement
L'effervescence au Parlement français a d'autant plus été accentuée par un amendement déposé par les députés socialistes sur le projet de loi de finances pour 2014 pour que les concepteurs de montages d'optimisation fiscale soient dans l'obligation, comme pour les contribuables utilisateurs, de les communiquer avant application à l'administration fiscale. Le dispositif prévoit que les contribuables défaillants à cette nouvelle règle s'exposent à une amende de 5% de l'avantage fiscal procuré. L'innovation de la dissuasion va même jusqu'à exposer les cabinets de conseil qui ne font pas cette divulgation à une amende égale à 5% de leurs honoraires.
Les juristes s'offusquent de cette mesure qui trouvera sans doute des limites d'application du secret professionnel ; certains y voient même une forme de délation, mais les supporters de cette disposition invoquent son efficacité en référence à celle déjà en place au Royaume-Uni depuis 2004. Dans le même sillage de la réduction de l'incitation à la pratique de l'optimisation fiscale, la proposition de revue de la définition de l'abus de droit(2) vise également à dissuader la créativité dans les montages licites. La subtilité dans la révision de la définition consiste à ne plus considérer les actes soumis à sanction ceux qui ont un but «exclusivement» fiscal mais désormais ceux qui ont un motif «essentiellement» fiscal.
Cette subtilité adossée à une substitution de terminologie inquiète les chefs d'entreprise qui y voient, pour leur part, une forme d'incertitude juridique et une exposition à l'arbitraire à l'occasion des contrôles fiscaux, car il sera difficile d'apprécier à partir de quel niveau de complexité un montage d'optimisation sera considéré comme un abus de droit.
La nouvelle loi s'intègre dans la lutte contre la criminalité financière
Pour rester les bons élèves de la «classe Europe», les parlementaires français ont adopté cette loi qui renforce le régime répressif de la fraude fiscale au niveau régional, mais également au niveau international. La loi en question apporte des amendements au Code Général des Impôts ainsi qu'au Code de Procédure Pénale et au Livre des Procédures Fiscales.
Les principales dispositions de la loi resserrent l'étau en donnant plus de pouvoirs aux autorités compétentes comme :
- l'élargissement de la compétence de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale — une sorte de police fiscale — au blanchiment de la fraude fiscale complexe, élément constitutif de fraude fiscale aggravée.
- L'élargissement du champ de la procédure judiciaire d'enquête fiscale aux fraudes fiscales résultant de l'utilisation de comptes bancaires ouverts ou de contrats souscrits à l'étranger ou de l'interposition d'entités établies à l'étranger, de falsification ou d'interposition d'entités fictives — autres éléments constitutifs de fraude fiscale aggravée.
- L'octroi aux enquêteurs, pour les cas de fraude fiscale aggravée, du bénéfice de techniques spéciales d'enquête comme la surveillance, l'infiltration, les interceptions de correspondances téléphoniques au stade de l'enquête, les sonorisations et fixations d'images de certains lieux et véhicules, les captations des données informatiques et les saisies conservatoires.
- La possibilité d'effectuer des saisies et des confiscations en valeur également sur les biens dont le condamné a la libre disposition, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi.
- Le recours à tout mode de preuves, y compris illicites, sous réserve que ces preuves aient été régulièrement portées à la connaissance des services fiscaux par une autorité judiciaire ou dans le cadre d'une assistance administrative internationale.
La disposition marquante, eu égard à la peine prévue, (sept années d'emprisonnement et deux millions d'euros d'amende) est évidemment celle des circonstances aggravantes de fraude fiscale du fait de la commettre en bande organisée, ou en ayant recours à des comptes bancaires ou des entités détenus à l'étranger ou au moyen de certaines manœuvres (falsification, interposition d'entité fictive ou artificielle...) eu égard aux circonstances qui la rendent plus difficilement détectable. La loi renforce également le dispositif de recouvrement des sommes illégalement détenues, qui pourra notamment porter sur les contrats d'assurance-vie ou tout bien dont le condamné a la libre disposition. Tout ce dispositif a été adopté définitivement par le Parlement avec cependant un recours constitutionnel renvoyant à une décision finalement rendue le 4 décembre 2013. Un parquet à compétence nationale chargé de la corruption et de la fraude fiscale
Le projet de loi prévoit pour le traitement des affaires complexes un parquet à compétence nationale, chargé de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale. Ce dispositif renforce la portée pénale de la fraude fiscale en l'alignant dans les prérogatives d'un Procureur financier qui traitera autant des affaires de fraude fiscale que des affaires de corruption.
En inscrivant la lutte contre la fraude fiscale au même rang de celle des infractions dites d'atteinte à la probité comme la corruption, le trafic d'influence et les détournements de fonds publics, les parlementaires ont mis la barre à très haut niveau. La juridicisation de la fraude fiscale va atteindre ainsi son paroxysme et un grand nombre d'interrogations se posent déjà sur la manière dont les différents types d'atteinte à la probité seront traités par le futur procureur de la République financier.
Le parquet spécialisé est présenté comme une nécessité en raison d'une spécialisation nécessaire tant des moyens que des compétences des magistrats. C'est dire l'effort envisagé à doter les instances d'un nombre de magistrats spécialisés, autant pour les magistrats instructeurs que ceux des instances de jugement. Il convient toutefois de s'interroger sur les limites de ces dispositifs, car pour les contribuables, il existera toujours un seuil psychologique d'acceptabilité de l'impôt. De son côté, l'administration applique des moyens de dissuasion et d'investigation qui freinent quelque peu les fraudes.
Les avocats et les conseils des contribuables pourraient être eux-mêmes inquiétés si les limites du secret professionnel et celle de l'assimilation à la complicité ne sont pas définies. La complicité pourrait même s'étendre aux fiscalistes internes d'entreprises pour peu qu'ils aient eux-mêmes contribué aux montages d'évasion fiscale.Voici une situation bien délicate pour déterminer envers qui la faute professionnelle est commise : le client ou l'employeur selon le cas, ou l'administration.
Au final, le Conseil constitutionnel aura censuré les dispositions relatives à :
• la garde à vue de 96 heures avec report de la présence de l'avocat à la 48e heure ;
• la possibilité pour l'administration fiscale de demander au juge des libertés de lui permettre de procéder à des visites domiciliaires ;
• l'amende calculée sur le chiffre d'affaires à titre de critère alternatif de détermination de la peine criminelle ou correctionnelle ;
• l'élargissement de la liste des paradis fiscaux aux territoires qui n'ont pas signé une convention d'assistance fiscale avec la France.
Mais il aura laissé une disposition qui peut choquer a priori : celle du repenti fiscal.
En empruntant les mêmes principes de remise de peine aux auteurs de délits de blanchiment ou de corruption active ou passive, le repenti fiscal devrait permettre aux auteurs de fraude fiscale une réduction de peine en contrepartie de l'aide à identifier les autres auteurs, mesure qui présente des risques de débordement pouvant conduire à la délation.
Voici à présent une situation de supériorité du droit pénal sur le droit administratif.
Cependant et toute proportion gardée, il ne faut pas perdre de vue que la qualification de la fraude intervient souvent au cours d'un processus contradictoire généralement long avec des moyens de défense du contribuable, notamment dans les voies de recours.
Il faudra attendre de voir ce que la pratique française engendrera comme cas de fraude complexe, pour constater si la subjectivité sera mise de côté et si le décryptage des bordures entre l'optimisation fiscale, l'évasion fiscale et la fraude fiscale sera maîtrisé.

Notes :
(1)Association américaine de chercheurs et d'activistes sur les sujets de l'évasion fiscale, de la fraude fiscale et de la transparence financière.
(2)Optimisation abusive d'une règle fiscale.


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