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L'école est le lieu où doivent se mouvoir toutes les réconciliations
Mohamed Bahloul. Economiste, directeur de l'Institut de développement des Ressources humaines, Oran
Publié dans El Watan le 19 - 09 - 2014

-Plusieurs enfants mozabites n'ont pas fait leur rentrée. Les parents d'élèves exigent qu'ils aient des enseignants mozabites ou qu'ils soient recrutés à l'extérieur de la wilaya de Ghardaïa. Ils réclament «plus de justice sociale». Comment en est-on arrivé là ?
Ces attitudes et réactions, si elles sont endossées par des segments entiers de la population, expriment et confirment la crise de sociabilité profonde et durable qui semble affecter le pays depuis quelques années. Lorsque le désir de travailler, de commercer, d'étudier… et même de faire la prière ensemble, comme c'est le cas dans certains quartiers ou villages, s'affaiblit ou disparaît, il faut vraiment s'en inquiéter. La dynamique est forcément porteuse de grandes menaces sur les grands équilibres sociopolitiques laborieusement et coûteusement bâtis au cours du siècle dernier.
Les temps sont difficiles. Sans être alarmiste et considérant le contexte géopolitique régional et mondial, elle peut déboucher, si les traitements appropriés ne sont pas mobilisés, sur un effondrement du désir de vivre ensemble. De la crise d'identification à l'Etat central, qui est une réalité depuis l'indépendance, on passera à la crise d'identification à la nation. Cette situation est, me semble-t-il, le résultat de l'échec des grandes modernisations (politique, économique et sociale) menées sous le sceau du nationalisme, du socialisme ou du libéralisme.
Pour faire court, on peut dire que ces réformes ont largement contribué à casser les anciens formes et espaces de socialisation, qui avaient leurs propres performances, sans pour autant les remplacer. Mal réformées ou non réformées à temps, les cinq espaces de socialisation – c'est-à-dire de production des capacités des individus à interagir efficacement et en harmonie dans la société, à savoir la famille, la religion, l'école, l'entreprise et l'Etat – sont en crise. Ce qui a contribué à générer des malformations irrémédiables dans l'ensemble du système social.
-Pour autant, les habitants de Ghardaïa, dans leur majorité, refusent d'être stigmatisés à travers cette opposition entre Mozabites et Chaâmba, qui n'est, à leurs yeux, que le résultat d'une administration trop centrale...
Les modes d'organisation et de gestion, et donc de penser le territoire national et sa projection dans le développement politique et économique de la nation, sont pour beaucoup dans l'émergence et l'aggravation des tensions et des conflits que nous observons. Que ce soit à Ghardaïa ou dans d'autres régions du pays. Les élites politiques indépendantistes algériennes formées dans le moule du nationalisme latin, celui de l'Etat national unitaire, ont été largement influencées au lendemain de l'indépendance, et à nos jours, par la conception napoléonienne de l'aménagement du territoire. C'est une conception centralisatrice, bureaucratique et sécuritaire centrée sur le «surveiller et punir pour se faire obéir».
Le territoire est une entité physique, une géographie et non un écosystème avec sa culture, son histoire et sa trajectoire identitaire. Elle favorise peu ou pas la mobilité et le brassage des populations, la subsidiarité et le règlement contextualisé des problèmes avec l'appui et la participation des citoyens. Le plus grave est que cette conception ne laisse aucune place au développement et à l'épanouissement des subcultures entendues comme l'ensemble des valeurs, croyances et habitudes de pensée et d'action d'un groupe de population. Souvent, elle les traite comme une menace pour l'unité et la culture nationales au lieu d'en faire un avantage cognitif mobilisable dans l'affirmation de la puissance et de la richesse de la nation.
La mise en relation des variables relatives à l'étendue physique et démographique du territoire national, au mode de distribution d'une population en croissance constante (sur le long terme) et la montée des besoins sociaux donnent une équation difficile à résoudre à moyen et long termes, si l'on reste dans cette pensée. D'autant plus difficile à résoudre que l'Etat demeure hyper centralisé et structuré en tant qu'acteur unique de la croissance économique et seul foyer des doléances sociales. Il est temps d'organiser le passage d'une approche en terme d'aménagement du territoire (au singulier) à une approche en terme de management des territoires (au pluriel). La décentralisation est un des maîtres mots de la réforme globale tant attendue dans cette perspective dans notre pays-continent. Les sociétés décentralisées sont des sociétés de confiance avec un haut niveau de «sociabilité spontanée».
La coopération l'emporte sur le conflit, la négociation sur l'affrontement, la diversité sur l'uniformité. Ce qui est source de réduction des hiérarchies et des dépendances administratives et donc des coûts de transaction. Ces sociétés jouissent d'un niveau de performances économiques exceptionnelles qui s'expliquent, selon plusieurs études, en grande partie par cette dimension. A contrario, les sociétés centralisées sont des sociétés de méfiance, voire de défiance permanente de l'Etat central et entre les individus.
-Qu'est-ce que cela dit des réponses apportées par l'Etat aux tensions dans le M'zab ?
Les réponses de l'Etat central sont, dans ce domaine comme dans d'autres d'ailleurs, des réponses qui relèvent d'une gouvernance de l'urgence centrée sur la mise à disposition de ressources pour financer l'élimination des foyers de tension et éponger les conflits entre l'administration et la population. Elle consiste à parer au plus pressé. On peut le comprendre, surtout lorsque les enjeux d'unité et de sécurité nationales sont immenses, comme c'est le cas dans la conjoncture actuelle et dans l'aire géopolitique à laquelle nous appartenons. Mais il faut le dire en toute objectivité, ce ne sont pas des réponses, à mon avis, adaptées à ce type de conflictualité, qui vient altérer à la fois l'édifice des hiérarchies verticales (entre gouvernants et gouvernés) et celui des hiérarchies horizontales (entre les tissus de la société) et remettre en cause radicalement toutes les formes et figures de l'autorité, celles héritées de la tradition comme celles issues des modernisations.
Le tout dans un contexte de généralisation des rapports d'argent, à la faveur des libéralisations prédatrices, vécu par de larges franges de la population comme un processus de généralisation des rapports de violences, de corruption et d'inégalités sociales. Il est impératif de mettre le cap sur des solutions durables et porteuses d'une nouvelle sociabilité qui renforce la cohésion des populations dans l'appartenance à leur région et à leurs trajectoires identitaires, le tout dans l'orbite de la nation. Est-ce que finalement l'Etat ne se retrouve pas pris au piège d'un double jeu qui consiste à affaiblir et folkloriser les particularismes régionaux, obsession héritée de la lutte nationale contre le colonialisme qui jouait justement de ces particularismes, et à les entretenir de manière utilitaire (en cas de crise, il n'a pas recours à ses institutions mais aux chefs de tribus, de zaouïas, etc.) ? Il faut faire la part des choses.
La tentation de mobiliser et d'instrumentaliser les codes, les signes et les symboles, les leaderships et les institutions propres aux espaces d'une subculture existe chez tous les pouvoirs centraux mais aussi chez certains mouvements et groupes politiques. Les premiers, pour élargir leurs bases sociales et/ou résoudre dans une perspective utilitariste les conflits qui surgissent dans une région. Les seconds, pour en faire les ressources politiques d'une contre-culture qui peut évoluer jusqu'aux tentations séparatistes. Ce sont deux travers à éviter.
-Pour éviter les affrontements, certains responsables de la société civile préconisent que Mozabites et Châamba soient scolarisés chacun de leur côté. L'école est pourtant un lieu d'apprentissage du vivre-ensemble : comment le système républicain peut-il résoudre cette équation ?
C'est une solution hasardeuse et lourde de conséquences pour les missions de l'école déjà fragilisée par tant d'agressions et de perversions. Aucune concession ne doit être faite à ce sujet. La fonction d'identification et de creuset des brassages de l'école ne doit pas être négociable. C'est au contraire le lieu où peuvent et doivent se mouvoir toutes les réconciliations. La société civile à côté de l'Etat doit se mobiliser. Les élèves comme leurs parents doivent être aux avant-postes.


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