La troupe Amsourag de Djanet a décroché le premier prix du concours des jeunes talents à Tamanrasset. Tamanrasset De notre envoyé spécial L'asouf, qui signifie nostalgie en tamachaq, est un style musical pratiqué par les Touareg de l'Ahaggar. Un style mélancolique qui se rapproche du blues à sa naissance aux Etats-Unis. Jeudi soir à Tamanrasset, à la clôture du 7e Festival national de la chanson et de la musique amazighes, le groupe Imarhane a montré sur scène que l'asouf est d'abord un chant qui s'écoute avec une oreille attentive. Les guitares et la basse sont accompagnées par des percussions plus proches du tindi authentique. C'est simple : la batterie n'a pas de place dans l'architecture musicale d'Imarhane, remplacée par le djembé et le calebasse. «Nous sommes attachés à la tradition, même si nous jouons de la guitare électrique. Il nous est difficile de mettre sur scène l'instrument utilisé par les femmes pour jouer du tindi. C'est un instrument qui prend de l'espace. Seulement, nous utilisons les rythmes du tindi dans notre musique. Nous pensons ajouter l'imzad dans nos futures compositions, car rien n'est impossible en musique. L'asouf nous permet d'évoquer la vie dure du désert, le manque de moyens, la sécheresse, les besoins des gens... La musique permet de transmettre le message au monde entier», a souligné Benabderrahmane Saddam, chanteur et leader du groupe Imarhane. Imarhane, qui existe depuis 2006 et qui marche sur les pas du groupe malien Tinariwen, prépare un nouvel album. «Notre prochain album portera le titre de Tahabort (La source). Il sortira en 2015. Nous avons enregistré quatre chansons live en Italie dans notre précédent album. Cela nous a fait connaître auprès du public», a précisé Benabderrahmane Saddam. Hamid Belbèche et sa troupe de danse ont, de leur côté, mis des couleurs à la soirée de clôture du festival. L'artiste chaoui a repris des chansons du compositeur Salim Souhali et de l'interprète Aïssa Djermouni. Il a également chanté son titre phare Alach taâdini en style abdaoui. «Nous avons l'impression d'avoir assisté à une grande fête ce soir à Tamanrasset. Je chante en chaoui et en arabe. Je veux que tout le monde comprenne mes chansons. Je reprends parfois des chants du patrimoine populaire, mais à ma façon. Le public de la chanson chaouie s'élargit de plus en plus», a déclaré Hamid Belbèche, parlant d'un festival à Marseille (France). Il s'apprête à faire sortir au début 2015 un nouvel album, Djazaïri Aanane (La haute et la belle Algérie). Yacine Zouaoui, qui a précédé Hamid Belbèche sur scène, vient de sortir un nouvel album, Laman, aidé par, entre autres, les arrangeurs Bélaïd Athmane, Bouzid Ouhamou et Bazou . Yacine Zouaoui, qui a appris la musique au sein de l'Association des amis de cheikh Saddek Lebdjaoui à Béjaïa, est d'abord un chanteur chaâbi. «J'entends créer un style propre à moi, un mélange entre le kabyle et le chaâbi, le tout baignant dans une musique moderne. Je ne cesse de faire des recherches pour alimenter mes compositions. Le travail se fait en équipe. Mon apprentissage de l'andalou m'a beaucoup aidé», a soutenu Yacine Zouaoui. Dans l'après-midi, le résultat du concours des jeunes talents organisé à la faveur du Festival de la chanson amazighe a été annoncé au théâtre municipal en présence de l'attaché culturel de Chine à Alger. Le diplomate a suivi toutes les activités du festival depuis le début. Le premier prix est revenu à la troupe Amsourag de Djanet. Le groupe Tritonide de Béjaïa a décroché le second prix, la chanteuse Nesrine de Bouira le troisième. Le prix de la meilleure voix a été attribué à Guerroudji Lounis d'Aokas, alors que le prix des meilleures paroles a été décroché par le groupe Yuba de Batna. «Nous avons veillé à ce que tout soit au point, la composition, les paroles, l'interprétation, la distribution, les habits. Notre souhait est de lancer la chanson targuie sur la scène internationale», a déclaré Amar Driss, leader de la troupe Amsourag. «Je ne suis pas satisfaite par ce résultat. Mais c'est une expérience pour moi. Je vais construire ma carrière. J'ai chanté par le passé et je continuerai à le faire dans le futur. Je prépare déjà des albums», a soutenu pour sa part Nesrine, accompagnée de son manager Merouane Agueni. Ghilas, le chanteur du groupe Tritonide, n'a pas accepté son classement en seconde position. «J'estime que le jury a fait une erreur de jugement. Je pense qu'on est premiers. Nous avons fait un spectacle grandiose. J'espère que cela n'aura pas d'impact sur l'équipe», a affirmé Ghilas. Nadjib Chichouane, président du jury, a regretté le fait que les jeunes concurrents soient parfois mal orientés avant de participer au concours . «Certains sont venus ici par audace et par ambition, ont travaillé seuls. Ils ont manqué de maîtrise. Il faut d'abord avoir une vision pour jouer collectivement de la musique d'une manière professionnelle. Ces jeunes doivent être pris en charge par des connaisseurs de la composition, de l'écriture des paroles et de l'arrangement pour s'améliorer. Ils doivent également être initiés au patrimoine amzigh», a-t-il suggéré. Les lauréats des Festivals nationaux des chansons chaouie, kabyle, mozabite et targuie ont participé au concours final de Tamanrasset. Karim Arib, commissaire du Festival national de la chanson amazighe, a estimé que le niveau des concurrents était presque équivalent. Selon lui, la musique targuie va dominer dans le futur la scène artistique algérienne. «Elle va même supplanter le raï. Le style targui émerge et gagne de plus en plus d'audience», a-t-il affirmé, citant le succès rencontré actuellement par Kader Tirhanine, Imarhane, Toumast et Tikoubawie. La création d'une nouvelle scène à In Guezzam, au sud de Tamanrasset, a été, d'après Karim Arib, un succès. «Nous envisageons pour la prochaine édition du festival d'élargir cette scène et d'aller vers d'autres localités de la wilaya malgré le défi d'assurer une bonne logistique», a-t-il indiqué. Kader Arib, qui est également directeur de la culture à Tamanrasset, a annoncé le début de restauration de la salle Tahat, seule salle de cinéma dans la capitale de l'Ahaggar.