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Mohamed Aïssa : «Le danger des imams autoproclamés»
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Publié dans El Watan le 24 - 06 - 2015

Costume-cravate, visage avenant, à l'aise dans son verbe et maîtrisant parfaitement son sujet, Mohamed Aïssa s'est montré à son avantage lors de son passage lundi soir, à l'heure des tarawih, au forum de Liberté.
L'occasion pour le ministre des Affaires religieuses de défendre bec et ongles son projet. Un projet que nous pourrions résumer en trois points : promotion d'un «référent religieux national» inspiré de ce qu'il appelle «le vécu de Cordoue», «déradicalisation» du religieux et «sécurisation de la vie intellectuelle» dans et hors les murs de la mosquée en boutant les «chouyoukh autoproclamés» et les charlatans de tout poil qui officient sur les chaînes populistes, et enfin, formation d'une nouvelle élite religieuse pour encadrer les mosquées.
Des imams ouverts, cultivés, et armés d'un background solide imprégné d'un islam «déwahhabisé», plus en phase avec notre algérianité. Tout un programme, oui. Pédagogue au possible, s'exprimant pratiquement de bout en bout en français, le ministre a défendu avec entrain ses idées, faisant preuve d'une «alacrité» (ou «Allah-Crité» pour reprendre le mot d'un facebooker bien inspiré) qu'on aurait tort de réduire à une simple opération de com'. Florilège.
Le défi de la «déradicalisation»
D'abord, une déclaration de principe. Le ministre expose rapidement sa démarche. «Je suis en conformité avec ce qui se passe ou qui devrait se passer dans les autres secteurs en matière de promotion du référent religieux national, en matière de déradicalisation, en matière d'interpellation de la communauté musulmane en général mais surtout du peuple algérien», se lance-t-il. Il explique que «cette «pratique référentielle de la religion (…) jaillit de l'expérience vécue dans ce pays et dans le Maghreb arabe en général, et qui prend en référence le vécu de l'Andalousie et surtout le vécu de Cordoue.
Nous nous inscrivons toujours dans cette démarche et nous entretenons un dialogue avec d'autres pays qui s'intéressent de très près à notre programme de déradicalisation». Mohamed Aïssa (dont le nom à lui seul est une onomastique de la tolérance) défend l'idée de la «wassatiya» en soulignant que cette pratique référentielle «s'inscrit dans le juste-milieu, la modération, l'ouverture sur l'autre et la diversité».
Disséquant le paysage religieux national, il relève : «Des extrémismes sont nés en Algérie. Ils se sont manifestés suite à une déclaration ou une autre. Pour moi, c'est bénéfique à partir du moment où il y a toujours le débat, le dialogue, le feedback, à la suite de toute idée diffusée dans les mass-media ou à travers les mosquées. Je pense que le plus intéressant, c'est que nous sommes arrivés depuis une année à tracer un programme d'action réel et fonctionnel.»
Il annonce, dans la foulée, les nouveaux instruments institutionnels qui seront créés incessamment pour accompagner ce plan de «déradicalisation» : une «académie de la fatwa» pour «immuniser la vie religieuse dans l'enceinte de la mosquée», et un observatoire contre les dérives sectaires et l'extrémisme religieux pour «la sécurisation de la vie intellectuelle, de la vie religieuse, en dehors de la mosquée». Les deux institutions n'attendent plus que le quitus du gouvernement. «Durant le mois de juin, nous allons soumettre le projet de l'Observatoire (au gouvernement, ndlr). Ultérieurement, nous allons soumettre le projet de l'Académie de la fatwa», précise M. Aïssa.
«On croit que l'islam tolérant est un islam instrumentalisé par le Système»
Ahmed Lahri, le modérateur des débats, s'est livré ensuite à un jeu de questions-réponses avec son invité du jour. «Quels sont les dossiers qui vous ont semblé assez compliqués à gérer ?» interroge notre confrère. «Ce qui m'a le plus marqué, Si Ahmed, c'est surtout les mentalités qui ont besoin de beaucoup d'efforts, de beaucoup de temps et de beaucoup de polémiques quelquefois pour réagir», rétorque le ministre. «Nous avons, en Algérie, des idées reçues. Nous avons quelque part cette conviction que la rigidité de la vie religieuse, c'est ça la religion.» Citant Soufiane Athaouri, un savant des premiers temps de l'islam, Mohamed Aïssa fera remarquer que «la vraie jurisprudence, ce n'est pas de dire ce qui est illicite mais de dire ce qui est licite».
Allusion à tous ces prédicateurs ombrageux qui n'ont que le mot «haram» à la bouche. Pour lui, le challenge, c'est de «trouver des solutions à la vie de tous les jours. A une population musulmane qui veut vivre son époque tout en étant ancrée dans la tradition de l'islam. C'est ce qui est difficile et nous avons ces idées reçues qui nous poussent quelquefois à croire que l'islam tolérant est un islam instrumentalisé par le système politique.
Que l'islam ‘officiel', c'est l'islam du Président, c'est l'islam du ministre. Et qu'il faut avoir un ‘islam d'opposition', un islam qui ne serait pas instrumentalisé, et qui serait l'islam ‘réel'. Cette dualité est très dangereuse», explique le ministre. Et de poursuivre : «Nous avons remarqué que le peuple algérien a été «embrigadé» par des cheikhs «autoproclamés» qui ont jalonné la vie cultuelle auprès des mosquées, et surtout dans les mass-media». Selon lui, «ces cheikhs autoproclamés, en vérité, sont détachés de la réalité des Algériens».
Il estime néanmoins qu'ils exploitent «la superstition» qui gagne un secteur de la société. Il ne fait aucun doute sur le fait, insiste-t-il, que «seul un imam bien formé est capable d'orienter le croyant…» «Un imam bien formé est un imam qui se ressource dans la tradition du Prophète (alayhi assaltou wa salam) et dans la Révélation, le Saint Coran, mais qui prend aussi en considération la donne temps et la donne espace, à savoir que nous vivons au XXIe siècle et que nous sommes en Algérie», plaide le conférencier.
«Aucun d'entre eux n'est imam»
«L'approche fournie par les imams des 17 000 mosquées algériennes est l'islam authentique», assure-t-il. «C'est l'islam qui a été pratiqué par nos aïeux, c'est l'islam qui a fait l'Andalousie, qui a fait Cordoue, c'est l'islam qui a été un catalyseur de cette population diverse dans sa langue, diverse dans ses idéologies et diverse dans ses régions.» Le ministre le reconnaît sans ambages : la mission est loin d'être facile. «Cela est difficile parce que ça demande un contact direct, et le contact direct est parasité actuellement par ce qui est diffusé sur les mass-media.»
Interrogé sur les profils de ces «chouyoukhs autoproclamés», le ministre note d'abord que ce qui anime les chaînes qui les accueillent sur leurs plateaux, c'est la recherche du sensationnel. Dressant un portrait-robot de ces «télécoranistes» qui ne sont pas sans rappeler les télévangélistes américains, il note : «Ces gens, nous remarquons premièrement qu'ils ne sont pas formés.
Aucun d'entre eux n'est imam. Aucun d'eux n'a été formé dans les instituts spécialisés. Nous en avons 13. Ils ne sont pas titulaires d'un diplôme universitaire en sciences islamiques. Ils se sont autoproclamés cheikhs en profitant de la confusion qui régnait durant les années de terrorisme et ils se sont implantés dans notre champ. Ils ont embrigadé les jeunes de leur quartier. Et, subitement, avec l'ouverture du champ médiatique, ils ont été invités par des chaînes qui cherchent la sensation, et ils ont eu un pupitre très dangereux.»
«Nous réinterpellons Miloud Chorfi pour qu'il intervienne»
A la question de savoir si des actions concrètes ont été entreprises de concert avec le ministère de la Communication et l'Autorité de régulation de l'audiovisuel pour mettre un peu d'ordre dans ce bazar des fatwas, Mohamed Aïssa a affirmé que des discussions étaient engagées dans ce sens : «Je me suis entretenu avec le président de l'Autorité de régulation et j'ai même proposé à ce que son collectif soit conforté par des cadres de mon ministère, des inspecteurs centraux. (…) Je crois que l'Autorité de régulation est preneuse, nous attendons un geste de leur part. Je dois dire qu'à chaque fois, nous réinterpellons Miloud Chorfi pour qu'il intervienne.
Je crois qu'il a déjà commencé un travail. Nous attendrons ses résultats. Mais nous demandons une diligence et une prise en charge immédiate parce que le danger vient de ces cheikhs autoproclamés. Nous ne connaissons pas leur affiliation, nous ne savons pas qui les paie, nous ne savons pas qui les a formés, et leur prêche est irrationnel en général et relève du virtuel d'autres fois. Ils se réfèrent à internet, aux réseaux sociaux, pour piocher leurs réponses. Or, les réseaux sociaux sont piégés, nous le savons tous.
Les réseaux sociaux sont actuellement le fief du daéchisme.» Faisant sienne une réflexion de Ben Badis en parlant du wahhabisme, il professe : «Le wahhabisme est peut-être bénéfique pour les pays dans lesquels il est né, il ne l'est pas pour l'Algérie.» Mohamed Aïssa se désole, au cours du débat, du sort réservé à l'immense Mohamed Arkoun. «Arkoun, c'est la référence mal comprise», concède-t-il. Mohamed Aïssa plaide ardemment pour la réappropriation de notre corpus théologique en citant l'œuvre des Abdelhak El Ichbili, Mohamed Ben Abdelkrim El Meghili, Abou El Abass El Ouencharissi, l'imam El Mazouni, ou encore le cheikh Ben Alioua, fondateur de la zaouïa El Alawiya de Mostaganem.
Et de conclure : «Nous ne connaissons pas ces érudits savants qui sont notre référent. Pourtant, ce sont eux qui ont légiféré pour les Algériens. Ce sont leurs orientations qui ont fait de nous la vraie nation du juste milieu. La preuve est que nous sommes immunisés contre le radicalisme et l'extrémisme violent. Et ceux d'entre nous qui y succombent, qui fléchissent, qu'on les interpelle par ce référent, par ce background. Il y va de notre salut.»


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