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«ArcelorMittal s'est débarrassé des déficits accumulés sur le dos de l'Etat algérien»
Nasreddine Lezzar. Avocat d'affaires et expert international en arbitrage économique
Publié dans El Watan le 11 - 10 - 2015

Le ministre de l'Industrie et des Mines, M. Bouchouareb, a annoncé mercredi dernier que le groupe ArcelorMittal et l'Etat algérien ont défini un schéma d'accord pour la restructuration de l'actionnariat des sociétés ArcelorMittal Algérie (AMA), ArcelorMittal Pipes & Tubes Algérie (Ampta) et ArcelorMittal Tébessa (AMT) sans contrepartie effective.
Cet accord permettra à la partie algérienne de prendre le contrôle total des trois sociétés ArcelorMittal, ce qui facilitera la prise de décision et la mobilisation des moyens, notamment financiers, pour assurer le succès de l'opération de revamping des installations industrielles et leur redémarrage dans de bonnes conditions. La décision semble avoir été prise dans l'opacité la plus totale et aussi, quelque part, dans la précipitation. Ou si elle a été préparée, elle l'a été dans le plus grand secret. Il s'agit de la récupération de la moitié de la sidérurgie publique nationale.
On ne sait pas à quel niveau cette décision stratégique a été prise ni quand, ni comment, ni depuis quand elle a été envisagée. On n'a jamais entendu parler de négociations en ce sens. On n'en a pas traité, du moins officiellement ou publiquement, au niveau d'un Conseil du gouvernement. Il est difficile d'admettre que cette question a été traitée au niveau des holdings. A ce propos, maître Nasreddine Lezzar, expert en arbitrage économique, tente de dissiper le flou qui entoure cet accord.
- La cession à titre gratuit n'est-elle pas intéressante pour le gouvernement algérien ?
On avance cette «gratuité» comme une grande libéralité du groupe mondial. Il faut rappeler que la prise de participations de 70% du complexe El hadjar par Mittal Steel a été faite en 2001 au dinar symbolique. Il est tout à fait naturel qu'il rende gratuitement ce qu'il a acquis gratuitement. L'opération est manifestement suspecte. Le groupe mondial ne fait sans doute pas dans le mécénat. J'entrevois deux explications possibles.
Après douze années, ArcelorMittal laisse le complexe El Hadjar et les autres entreprises en déficit. Si ses actions et sa participation lui procuraient des bénéfices, il ne les aurait jamais cédés et encore moins à titre gratuit. Lorsqu'on acquiert des parts sociales dans une entreprise déficitaire, on acquiert plus de pertes de charges et de dettes que de bénéfices. Toutes les créances impayées du complexe, charges fiscales et parafiscales, fournisseurs, prestataires, salaires… En fait, ArcelorMittal se débarrasse de charges et de déficits accumulés sur le dos de l'Etat algérien.
- On ne peut pas être d'accord avec ce que vous dites puisqu'ArcelorMittal reste lié par un contrat d'assistance technique…
Justement, voilà le pot aux roses ! L'explication de la «cession gratuite» est ici. En sa qualité d'actionnaire, le partenaire étranger est associé aux bénéfices mais pas aux pertes. Dans le cadre du futur contrat d'assistance technique, qu'on appelle aussi contrat de management, il aura nécessairement une rémunération fixe et aussi une part variable calculée sur la base des bénéfices réalisés. Dans le pire des cas, il aura sa part fixe qui sera puisée dans le Trésor public si le complexe est en déficit – comme c'est le cas depuis toujours – et sera gratifié comme s'il était actionnaire d'une part proportionnelle aux bénéfices réalisés. ArcelorMittal a maintenant la part belle. D'actionnaire ordinaire aux dividendes aléatoires, rétribué uniquement sur les bénéfices et associé aux pertes, il est promu au statut d'actionnaire privilégié, assuré d'une rémunération dans tous les résultats, exonéré de toute participation aux pertes et percevant des dividendes le cas échéant. Le statut est nettement plus confortable vu qu'ArcelorMittal Algérie est en déficit permanent.
- Comment pouvez-vous affirmer que l'entreprise est en déficit permanent ?
ArcelorMittal n'a jamais publié (à ma connaissance) les comptes sociaux de ses entreprises, comme le requiert le code de commerce, et c'est justement un indice d'opacité et un élément de suspicion. En 2012, le complexe de Annaba allait déposer le bilan, l'information a été démentie de façon non convaincante. Un indicateur fort est, aussi, le refus de sa banque (Société Générale) de le financer ; à cette époque, il a fallu que l'Etat algérien, via une banque publique la BEA) lui vienne en aide par un crédit revolving.
Il faut savoir aussi qu'un crédit revolving ou renouvelable est un crédit à la consommation renouvelé automatiquement au fur et à mesure que l'emprunteur rembourse. Nous ne sommes pas face à un crédit d'investissement accordé à une entreprise en quête d'expansion ou de développement mais devant un crédit de fonctionnement accordé à des entreprises qui peinent à couvrir les charges de leurs activités.
Ce genre de difficultés est annonciateur de cessations de payement et de proximité de faillites. Malgré cela, l'Algérie a décidé d'acquérir encore 21% des parts pour devenir majoritaire à 51%. Sider avait repris, en octobre 2013, la majorité du capital.
- Mais il est normal que le gouvernement vienne en aide à cette société en difficulté en raison du caractère stratégique de la sidérurgie pour les projets d'infrastructures, les emplois qu'il procure et la stabilité sociale qu'il assure…
Ce n'est pas le soutien de la sidérurgie qui gêne, c'est le maintien d'un partenaire qui n'a pas réalisé le business plan pour lequel il s'est engagé depuis douze années et qui jouit de toutes les largesses du gouvernement algérien. En France, lors des crises connues par les différents sites du groupe Mittal, le gouvernement français l'a obligé à investir financièrement pour rester dans le pays. Dans son édition du 30 avril 2015, le site de la revue L'Usine nouvelle annonçait qu'ArcelorMittal comptabilise 93 millions d'euros d'investissements engagés et 168 millions d'euros de chantiers autorisés.
L'industriel dépassera nettement les 180 millions d'euros d'investissements promis sur la période 2014-2018. Le montant total pourrait atteindre 258 millions d'euros d'ici 2020, confirmant la pérennité d'un site qui paraissait gravement menacé voici deux ans. ArcelorMittal avait annoncé, le 9 octobre 2013, un investissement de 92 millions d'euros pour la réfection complète de l'un des trois hauts-fourneaux du site de Dunkerque (Nord), six mois après la fermeture de celui de Florange (Moselle). Quelque temps auparavant, en 2012, il avait failli déposer le bilan jusqu'à ce que la Banque extérieure d'Algérie lui accorde un crédit.
Le 30 novembre 2014, le complexe sidérurgique ArcelorMittal de Annaba, devenu majoritairement algérien une année auparavant, a conclu un accord avec une banque publique algérienne pour deux lignes de crédits de 600 millions de dollars pour financer le plan de modernisation du complexe El Hadjar et de 355 millions de dollars pour le financement de l'exploitation et l'assainissement de la situation de la société. Le message du président-directeur général, Lashkmi N. Mittal, publié sur le site du groupe, annonce que «la France est le lieu de production de plus d'un tiers de nos aciers plats en Europe.
Depuis 2006, nous avons investi plus de deux milliards d'euros dans le pays». Je serais curieux de savoir combien il a investi en Algérie si toutefois il a investi depuis 2001. En France, il finance et injecte des milliards ; en Algérie, il se fait soutenir par le Trésor public. Je ne comprends pas ce traitement différencié, surtout qu'un investissement en Algérie est plus rentable qu'en France et ce, pour une réduction de trois charges fondamentales : l'énergie, la main d'œuvre et le transport. Voila un bon argument pour une délocalisation bien négociée.
En 2012, lorsque le «géant mondial» arrivait difficilement à produire 580 000 tonnes d'acier, le Premier ministre de l'époque, Ahmed Ouyahia, avait promis que l'Etat empêcherait la fermeture du complexe, alors confronté à une crise de trésorerie. En France, on l'oblige à investir pour l'autoriser à rester. En Algérie, le Trésor injecte des fonds dans ses déficits pour lui permettre de rester !
- La lecture du pacte d'actionnaires révèle l'existence d'une clause qui engage ArcelorMittal à rester dans l'actionnariat de la filiale algérienne pendant une durée minimale de 7 ans. Ce retrait anticipé ouvre-t-il la voie à un contentieux et donne-t-il droit à réparation à la partie algérienne ?
Non, puisque il ne s'agit pas d'un retrait unilatéral d'ArcelorMittal mais d'un retrait consensuel, accepté par la partie algérienne. Il s'agit d'une clause stabilisatrice courante dans les pactes d'actionnaires, qui vise à prémunir les entreprises des effets pervers et déstabilisants des retraits intempestifs des actionnaires.
Naturellement, ArcelorMittal est bénéficiaire puisque dorénavant, elle sera prestataire de services rémunérée par une part fixe inconditionnelle et une part hypothétique variable. Elle s'est débarrassée d'une position gênante qui l'associait aux pertes dans une entreprise déficitaire. De plus, ArcelorMittal a échoué dans la réalisation de bénéfices en tant qu'actionnaire, il n'y a pas de raison qu'il réussisse en tant que prestataire…
- Comment évaluez-vous ce partenariat qui vient de prendre fin ?
Au terme de douze années, ArcelorMittal a failli dans l'exécution du business plan pour lequel il s'est engagé. Il n'a consenti aucun investissement financier et a bénéficié du soutien de l'Etat via les banques. Il n'a procédé à aucun transfert effectif de technologie et n'a fait preuve d'aucune performance managériale. Le complexe est dans le même état où il l'a trouvé, si ce n'est pire.
Aujourd'hui, ArcelorMittal se retire de l'actionnariat de façon anticipée, en violation du pacte d'actionnaires, et reprend une position contractuelle très confortable dans le cadre d'une assistance technique. Notons, avec tout cela, cette phrase irritante par sa condescendance et son paternalisme de Davinder Chugh, de la direction générale du groupe ArcelorMittal et directeur monde du segment A1CIS, qui a déclaré, au terme de cet accord : «Nous sommes heureux de pouvoir soutenir le gouvernement algérien à réaliser ce plan dans l'intérêt de la société du pays.»
- Est-ce que vous soutenez que l'Algérie défend mal ses intérêts ?
Dans cette affaire, la partie algérienne a fait preuve d'une incompétence au plan managérial et d'une mauvaise gouvernance au plan politique.


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