A la cour de justice de Khenchela, a eu lieu mercredi dernier le procès en appel de cinq cadres de la commune de Babar, dont un élu, accusés d'«abus de pouvoir» pour avoir facilité illégalement l'acquisition, au profit du sénateur Tallous, d'une assiette foncière non constructible, située à proximité immédiate de l'école primaire Amor Boussekine, au centre-ville de la commune de Babar (30 km au sud de Khenchela). Les mis en cause avaient été condamnés en avril 2016 en première instance par le tribunal de Chechar à un an de prison ferme et à une amende de 100 000 DA. Cette fois-ci lors du procès en appel, changement de décor : les accusés sont défendus par une armada d'avocats, mais en l'absence du sénateur, sous prétexte de son emploi du temps parlementaire, et en l'absence aussi du chef de la daïra de Babar, pourtant cité à plusieurs reprises dans cette affaire, car ayant favorisé le détournement de ce terrain considéré comme la placette d'accès à cette école. Dans leurs plaidoiries, les nombreux avocats de la défense ont déclaré que le délit d'abus de pouvoir n'était pas matérialisé, du fait que leurs clients travaillaient dans différents services et qu'ils n'avaient donné qu'un avis technique concernant le caractère constructible de ce terrain, et n'étaient pas signataires de l'acte d'attribution au profit de ce sénateur. Pour les avocats de la défense, les accusés «n'ont fait qu'exécuter une instruction écrite émanant du chef de daïra de Babar à se constituer en commission technique chargée de se prononcer sur la nature de ce terrain foncier, mais ce chef de daïra a totalement nié avoir émis une quelconque décision écrite lors de l'enquête de la police judiciaire (la gendarmerie, ndlr), alors que ce document figure dans le dossier de la justice». Pour rappel, les faits remontent à l'été 2014 où l'un des membres de l'Association des parents d'élèves de l'école primaire Amor Boussekine – association à l'origine de l'alerte citoyenne, nous avait expliqué que «le sénateur a attendu l'arrivée de l'été, au moment où l'école était fermée et les gens en vacances, pour commettre ce dépassement et s'approprier le terrain». Il a entamé les travaux de construction après avoir bénéficié de documents et de facilités administratives «suspectes» afin d'obtenir la propriété du terrain, étant certain qu'il n'aurait à subir aucune poursuite judiciaire et même pas administrative, et persuadé peut-être que sa fonction de sénateur le protégerait contre toute poursuite ou sanction. Le vice-président de l'APC de Babar, principal accusé dans cette affaire, a été destinataire de la plupart des questions du magistrat présidant ce procès en appel, d'autant plus que c'est lui qui a décidé d'attribuer ce terrain au sénateur Tallous. Cet élu n'a pas su quoi répondre lorsque le magistrat lui a demandé «pourquoi cette attribution du terrain foncier n'a pas été consignée dans les registres de l'APC ?» La décision de la chambre pénale près la cour de Khenchela a été mise en délibéré pour le 26 octobre prochain. Les observateurs présents lors du procès et au fait des tenants et aboutissants de ce scandale de détournement du foncier au détriment d'une école, sont restés sur leur faim. Beaucoup de questions sont restées sans réponse, notamment celles relatives à l'absence du sénateur Tallous, alors qu'il est à l'origine du délit, et aussi l'absence du chef de daïra aggravée par le revirement inexpliqué de ce dernier.