Le nouveau secrétaire général de l'ONU a dit, lundi dernier, ce qu'il pensait de cette organisation. Bloquée et inefficace, a-t-il fait comprendre sans faire dans la demi-mesure. Il fallait le faire, en ces temps de crise de fonctionnement de la plus haute institution internationale qui a pour mission de faire la paix et la préserver. Antonio Guterres a ainsi dit ce que la plupart des membres – autant dire l'écrasante majorité – voulaient entendre et que les spécialistes doivent enseigner à leurs étudiants comme un cas vraiment à part. Soit une organisation sans réel pouvoir, comme le prouvent les tout nouveaux conflits qui ont fait dire à ces spécialistes que l'on ne peut parler d'échec de la diplomatie internationale pour la simple raison que rien n'a pu être entrepris. Il ne s'agit pas d'une simple nuance, mais d'un constat accablant. Ou encore, a-t-on fini par le constater, la classification – jamais avouée bien entendu – des conflits, certains étant déclarés plus urgents que d'autres. Ou encore l'analyse de certains phénomènes comme le terrorisme où parfois, a-t-on constaté depuis au moins un quart de siècle, l'approche n'est pas univoque. Très souvent, un amalgame est fait entre ce phénomène et les luttes de libération, et les pays qui en sont affectés souffrent dans la solitude. Mais de manière générale, la réforme de l'ONU a été revendiquée depuis bien longtemps par les pays de l'hémisphère sud demandant notamment l'élargissement du Conseil de sécurité, l'instance exécutive, la seule à pouvoir imposer la Charte de l'ONU, y compris en recourant à la force, comme l'autorise le fameux chapitre 7 de la charte en question. Le reste, quand il y en a, n'étant que de simples recommandations. Donc sans le moindre effet. L'on a même vu des Etats et des organisations régionales contourner le blocage de l'ONU et faire la guerre à d'autres. Ou encore l'ONU tenue à l'écart de certains sujets, comme le conflit du Proche-Orient, alors même que c'est une question de justice et qu'il s'agit – comme pour la question du Sahara occidental – d'appliquer les résolutions de l'ONU et rien d'autre. Ce qui veut dire qu'il y a absence de consensus et que parfois l'on n'est pas loin au moins d'erreurs de jugement. En ce sens, les délégués des pays membres de l'ONU très présents ce lundi – un fait rare – à la prestation de serment de M. Guterres, ont eu droit à un véritable programme, fait tout aussi rare. Il a ainsi souligné que l'ONU devait se réformer en profondeur pour faire face aux crises. L'ancien Premier ministre socialiste portugais a d'emblée affiché sa volonté de changement, voire de rupture avec Ban Ki-moon qu'il remplacera le 1er janvier 2017, encore que le secrétaire général sortant était lui-même lié par des règles de fonctionnement qui restreignaient sa marge de manœuvre. Une évidence qu'il a tenu à rappeler en soulignant que «le secrétaire général n'est pas le maître du monde, tout au plus une valeur ajoutée» et que ce sont les Etats membres qui mènent le jeu, en premier lieu les cinq grandes puissances membres du Conseil de sécurité. L'ONU «a contribué à des décennies de paix relative, mais les défis surpassent désormais nos capacités à réagir», a ainsi déclaré son successeur, en recommandant des réformes dans trois domaines : maintien de la paix, aide au développement durable et gestion. «Il nous faut davantage de médiation, d'arbitrage et de diplomatie préventive», a-t-il affirmé. Un discours plutôt rare. L'on a maintes fois constaté la solitude du secrétaire général, mais lui a tenu à en parler pour pointer du doigt le véritable centre de décision qu'est le Conseil de sécurité et le fameux droit de veto jusque et y compris dans la réforme de l'ONU. Quel avenir donc pour l'ONU, une organisation créée au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale ? Et encore, devrait-on se demander, quel avenir pour cette véritable feuille de route ?