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Entre désespérance et mobilisation
Publié dans El Watan le 04 - 11 - 2004

Pour cette commémoration nationale, que tous mes compatriotes de Kabylie sachent qu'il est une voix, une seule mais déterminée, qui refuse que l'on qualifie de nationale une collectivité dans laquelle on renie les droits à une partie de ses enfants.
Je me dois de participer à ce 1er Novembre à leur côté comme il se doit de l'être avec les enfants d'une famille qui ont été mis à l'écart. Je viens donc, comme à chaque fois, leur dire les mots simples d'un enfant d'Oran qui ne comprend ni ne tolère qu'une fête nationale se conçoive dans la souffrance et le mépris opposé à une partie de la nation. Qui plus est lorsque cette fête est la commémoration de la naissance de cette nation. « Commémorer le sursaut d'une nation libre et unie ? » N'est-ce pas ce que j'entends dire à propos du quarantième anniversaire du 1er novembre. Reprenons en « copier-coller », puisqu'il faut le répéter à chaque fois, des propos déjà tenus presque mot pour mot à de nombreuses reprises et dont seule la date est déclinée tant les choses sont immuables et transposables dans cette brisure nationale. Le naturel ne se négocie pas, est inaliénable et imprescriptible. Peu importe les cultures dont il s'agit, peu importe l'antériorité des unes par rapport aux autres, peu importe le poids relatif de chacune dans la population. Le contrat moral qui consiste à fonder une communauté nationale est à l'inverse de la pathétique situation algérienne. Raison pour laquelle nos frères berbérophones n'ont à se justifier de rien, à se convertir à rien sinon à être eux-mêmes, ainsi rempliront-ils le contrat national mieux que par tout autre discours ou contorsion inutile qui les éloignent de la sérénité et les divisent. Ces mots sont ceux d'un Oranais qui prend ses responsabilités devant un océan d'intolérance. Les seules langues et cultures nationales qui vaillent sont celles de l'intelligence et de la paix civile. Les langues, les cultures et les opinions n'ont jamais eu pour vocation d'être discutées dans un pacte national autant qu'elles peuvent apporter cette intelligence à la nation. Des mots d'une personne isolée qui ne pourrait, à elle seule, porter la responsabilité d'un désastre national ni ne peut y remédier. Les droits de mes compatriotes sont des droits indépendants de toute négociation, de toute reconnaissance forcée et institutionnelle et il est inutile, sinon par la force brutale, de s'écarter de ce bon sens. Je réitère ce discours dans la presse nationale depuis des années comme dans un puits sans fond et sans écho, mais je ne peux pourtant me résigner à les taire. Mes compatriotes berbérophones font l'objet d'un ostracisme qui est de plus en plus insupportable et que la collectivité nationale ne pourra, sans risque majeur, le perpétuer. Je ne compte sur le soutien de quiconque ni ne suis intimidé par les réponses insultantes de certains Algériens, y compris parmi les réponses des berbérophones que j'ai eu, à regret, à déplorer. Je souhaite leur dire, à tous, aux uns comme aux autres, que l'Algérie est mienne y compris dans les montagnes de Kabylie et ce n'est ni le silence, ni l'insulte, ni l'indifférence qui y changeront quelque chose. La Kabylie est mienne comme cette belle région oranaise où je suis né, un point c'est tout. Par conséquent, je ne pourrais tolérer qu'on y attentât à ses droits sous quelque forme que ce soit de même que si on y attentait à la dignité de n'importe quelle autre région, culture ou opinion. Je n'ai pour cela besoin ni de l'appui des berbérophones ni de la permission des autres. Aucun droit n'est attribué, aux uns comme aux autres, pour me dicter mes convictions. Mais cela n'est qu'égratignure et état d'âme sans importance car pour le moment, l'essentiel est dans la souffrance de mes compatriotes berbérophones qui font l'objet d'une persécution et d'un reniement inqualifiables. Les articles, les interventions et les participations s'enchaînent, l'indignation toujours pugnace et les années passent. Qu'il est dur le combat d'un militant inconnu, non berbérophone, s'engageant pour la dignité et la liberté de ses frères berbérophones. Le combat d'un non-berbérophone semble être condamné à un double isolement. Isolement de par la position dissonante dont il fait état envers ses compatriotes non berbérophones, isolement ensuite par l'anonymat au sein de structures et d'un mouvement dans lesquels il ne peut être entendu suffisamment. Enferré qu'il est entre la position autiste des uns, sûrs de leur vérité arabo-musulmane dont il ne faut s'écarter d'un pouce au risque d'un parjure, et celle des autres qui ne cessent de se chamailler en Kabylie (et surtout de se contredire) au nom d'une lutte dont ils ne semblent pas s'apercevoir qu'ils finissent par l'éloigner chaque jour davantage de son objectif. Ce n'est pas un pur jeu de l'esprit que de s'alarmer à propos du désastre national. Il est des signes constants et visibles qui démontrent l'acuité de la fracture. Certains sont violents et repérables par l'actualité mais d'autres s'infiltrent insidieusement dans les consciences pour en devenir des réflexes. Ces signes sont la preuve irréfutable d'une profonde présence des peurs, des préjugés et des malentendus. Le dernier m'est apparu récemment lorsque, dans un débat qui a eu lieu dans ces mêmes colonnes, le rédacteur d'un article, auquel j'ai répondu, a de nouveau pris sa plume. Une phrase, quelques mots dans un article portant sur un autre sujet que la Kabylie l'ont bizarrement fait réagir comme ces images subniminales qui pénètrent les esprits sans en avoir conscience. Cette phrase est la suivante : « A 1'heure où les journalistes sont en prison, où nos compatriotes berbérophones plongent dans 1'amertume la plus dangereuse et où nos citoyens sont spoliés et maltraités, le simple fait de nous demander de soutenir Bouteflika est une insulte à notre intelligence. » Perdue dans un océan de mots et d'arguments, cette petite allusion a fait l'objet de la réponse suivante : « Qu'on me cite une seule personne détenue pour ses idées ou pour ses écrits. Etant bien entendu que la liberté d'expression ne signifie pas liberté de diffamation. Le mouvement citoyen en Kabylie a été entendu après bien des sacrifices ; la plateforme d'El Kseur a été reconnue comme base de dialogue, et seules - là aussi - les querelles de leadership empêchent celui-ci d'aboutir ». Nous nous apercevons combien la fracture est grande entre tous les intellectuels de ce pays, car à l'évidence nous ne parlons pas du même pays. Notre regard sur les faits (et non sur des fantasmes) est si différent que nous avons vu ce qu'ils ne voient pas, c'est-à-dire l'assassinat de centaines de gamins, l'emprisonnement de dizaines d'innocents et tant d'autres crimes abominables et sans retenue. Mais à ce regard différencié sur le réel, s'ajoute la divergence de nos points de vue quant à la définition du crime et de l'intolérance. Je ne peux, pour ma part, y soustraire l'oppression insupportable que subit une population qui ne demande qu'à vivre la culture et la langue qui sont siennes (et donc la nôtre même si nous ne les avons pas héritées directement). Cette attitude des intellectuels algériens (qui se sont exprimés de cette manière, ils sont nombreux) est aux antipodes de la mienne. Quant aux querelles en Kabylie (et même quant aux graves compromissions de certains que je dénonce), j'ai tendance à ne pas en tirer une conclusion globale, car les compromissions sont les mêmes que toutes celles qui touchent tous les autres opportunistes de ce pays. En cela, le débat sur la Kabylie est en soi peu significatif sinon qu'il confirme l'état général de notre pauvre pays. J'ai par contre tendance à m'apercevoir, qu'à l'inverse, ils ne disposent pas collectivement du même droit que les autres, c'est-à-dire à vivre leur algérianité dans les formes culturelles et linguistiques héritées. Dès lors, personne n'est en droit de porter un jugement et surtout de douter du sens patriotique de nos compatriotes pour la simple raison qu'ils revendiquent une citoyenneté forte de tous ses attributs et de ses droits. Qui sommes-nous d'ailleurs pour juger du sens patriotique de chacun ? C'est une présomption que certains brailleurs devraient taire pour avoir été les pires traîtres de cette république naissante, ses criminels les plus zélés et ses fossoyeurs les plus avides. Chanter un hymne et brandir un drapeau à la gloire d'une civilisation arabo-musulmane dans ces conditions ne sont pas seulement la certitude d'exclure arbitrairement les autres richesses légitimes du pays, mais aussi de vider de son sens tout le contenu positif qu'on serait encore en droit d'attendre d'une civilisation arabo-musulmane. En revanche, à être défendue par des imbéciles, il y a certitude que rien ne subsistera de cette culture arabo-musulmane si ce ne sont le chaos et l'avilissement, déjà largement entamés, à des nouvelles idéologies et religions de ce monde comme le libéralisme sauvage et la sous-culture de masse. Entre désespérance et mobilisation, au milieu des déchirements que connaît le mouvement des démocrates, voilà présenté le quotidien militant d'un inconnu oranais qui salue encore une fois ses frères de Kabylie dans cette pathétique commémoration du 1er Novembre. Au fond, n'est-ce pas cette désespérance récurrente qui alimente sans fin la mobilisation ? Mais trouvera-t-elle, un jour, un écho ?
(*) Enseignant


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