C'est grâce à ces nouveaux venus d'Andalousie qu'Alger a connu à partir du XVIIe siècle un épanouissement architectural et artisanal. En effet, les Morisques, ces musulmans devenus par la force des choses chrétiens puis expulsés d'Espagne en 1502, ont regagné la rive sud de la Méditerranée pour venir s'installer en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Au nombre de 250 000 âmes venus s'installer en Algérie, selon les données de l'époque, ces exilés ont contribué à l'enrichissement artisanal et dans les beaux arts ainsi qu'à l'éclosion de nouveaux métiers et activités. C'est également grâce à leur présence que les cités algériennes, à l'image de Blida, Constantine, Tlemcen, Cherchell, Ténès, Koléa, ont subi un renouveau en ce qui concerne les métiers de la soie, du textile, de la cordonnerie, de la poterie et de la parfumerie. Ces corporations de tisserands, « harrarine », des parfumeurs « attarine », des couturiers « khayatine », de par l'expansion de leurs charges professionnelles, ont pourvu le Beylik et el khazina, le trésor public, des plus fortes recettes fiscales. Ce qui leur vaut une certaine déférence auprès des gouvernants. Outre cela, le dynamisme artisanal dans la ville de Bologhine Ibn Ziri se conjuguait également avec les métiers de la production des chwachis, ces calottes rouges à franges si algériennes qu'elle ont été baptisées « chachyate stamboul » ou « nass rass ». En ces XVIIe et XVIIIe siècles, la diaspora andalouse détenait également les techniques de la construction et de l'architecture. Les maîtres artisans en toutes filières du bâtiment ont donné par leurs apports un nouveau cachet à la ville d'Alger et ont contribué aux grands chantiers s'investissant dans les bâtiments civils, les édifices religieux et les structures militaires. Ainsi, les ordres de métiers d'origine andalouse ont codifié leurs activités en se regroupant autour de maîtres « maâlmine », lesquels sont à la tête entre autres de « banaïne », « harrarine », « attarine » et « fekharine ». La communauté d'Ahl el Andalous avec son caractère distinctif, en s'intégrant dans la population algérienne, était devenue une référence. Leurs descendants ont pris la relève pour ériger des noyaux urbains et citadins donnant ainsi aux cités qu'ils ont investies, une référence artistique et littéraire. La musique classique algérienne n'est-elle pas la digne descendante du lyrisme andalou ?