Selon les enquêtes des services de sécurité, le métal jaune importé illégalement provient essentiellement d'Italie et surtout de Turquie et de Dubaï, alors qu'auparavant il provenait de la Lybie via les frontières Est. Il s'agissait de l'or importé illégalement de l'Afrique de l'Ouest. Avant la chute du régime El Kadhafi, le marché national informel était alimenté à près de 60% par l'or libyen qui se déversait au niveau des wilayas de Tamanrasset, El Oued, Illizi, Adrar et Ghardaïa. Mais le renforcement du dispositif sécuritaire au niveau des frontières, suite aux événements qui ont secoué la Tunisie et la Lybie, a poussé les réseaux spécialisés dans ce trafic à s'orienter vers les voies maritime et aérienne. Pour preuve, des quantités dépassant les 120 kg d'or ont été saisies par les services des Douanes au port d'Alger et par les éléments de la police des frontières (PAF) à l'aéroport international d'Alger durant les trois dernières années. A la lumière des prises effectuées par les services de sécurité, il s'agit également de trafic de l'or à 24 carats, c'est à dire pur à 99,99% ce qui est, en principe, strictement interdit en Algérie. Or, il est affiché dans plusieurs bijouteries. « Le phénomène de trafic des métaux précieux connaît une hausse à l'approche de l'été vu la hausse de la demande par les familles algériennes », observe le responsable de la communication du commandement de la Gendarmerie nationale, le lieutenant-colonel Abdelhamid Kerroud. Pour y faire face, le commandement de la GN a programmé des descentes de contrôle dans les villes à forte concentration de bijouteries à l'instar de Constantine, Biskra, Khenchela, Annaba, El Taref, Aïn Témouchent et Oran. Parmi les mesures pratiques, le contrôle routier. « Plusieurs saisies ont été opérées sur les routes. Des lingots d'or de provenance inconnue sans facture ou registre ont été récupérés en possession de bijoutiers, d'artisans et de contrebandiers », signale l'officier supérieur. Après l'or suisse, les trafiquants s'intéressent de plus en plus à l'or italien (18 carats) également interdit d'importation et de commercialisation. Le marché de la joaillerie haut de gamme, à savoir le diamant et autres pierres précieuses, est également frauduleusement alimenté. Alger et M'sila : plaques tournantes En outre, les services de sécurité ont renforcé le contrôle routier et la fouille des voyageurs au niveau des ports et aéroports durant la saison estivale surtout que les trafiquants tentent de profiter de la grande affluence en cette période de l'année pour passer à l'acte. Selon les rapports des enquêtes policières, les trafiquants algériens entretiennent de bonnes relations avec de gros fournisseurs français et suisses. Toujours selon ces enquêtes, la contrebande de l'or représente l'un des principaux vecteurs du blanchiment d'argent. Alger et M'sila sont les plaques tournantes du trafic de l'or suivies de Tébessa, Batna, Constantine, Guelma et Oran. « La capitale et M'sila sont considérées comme les deux plus importants marchés informels de l'or en Algérie », souligne un rapport des services de sécurité. Guelma, par contre, est classée comme la capitale du trafic des Louis. « Toute pièce de Louis d'or qui arrive sur le marché national transite par la wilaya de Guelma », ajoute la même source. Mais pour les services de sécurité, le plus délicat réside actuellement dans l'imitation du poinçonnage et l'or truqué fabriqué dans des ateliers clandestins. Lors des descentes des services de sécurité, des bijoux ont été saisis. Après analyse, il s'est avéré qu'ils sont composés de plaques très fines d'or mélangées à du cuivre. Les vrais faux bijoux provenaient de Batna, Constantine, en passant par Biskra, Aïn Beida et Oum El Bouaghi. Durant l'année 2012, une quantité globale de 48 kg d'or a été saisie au cours d'opérations de contrôle des unités de la Gendarmerie nationale. Selon un bilan établi par cette institution, 61 affaires liées au trafic d'or ont été traitées dont 44 à Sétif et Batna. Ces opérations se sont soldées par la saisie de 1.649 objets précieux dont 439 Louis, 411 bracelets, 159 chaînes et 439 bagues. Du côté de la police, les services de la police des frontières (PAF) ont traité 8 affaires ayant permis la saisie d'or importé illégalement. Plus de 10 trafiquants ont été interpellés. Attention à l'or non poinçonné Pour les enquêteurs, il s'agit d'une fraude fiscale. Les bijoux avec de faux poinçons algériens inondent le marché national. Plusieurs affaires ont été traitées par les services de sécurité dans le cadre de la lutte contre l'exercice illégal et la tromperie sur la qualité. Les spécialistes en la matière expliquent que le poinçon 720 est « l'estampille officielle de l'Italie ». Le poinçon algérien est composé d'un premier dit de marque représenté par une grappe de raisin, et d'un second dit contremarque qui comprend un symbole de la sourate El Koursi, et chaque bijoutier est obligé de faire poinçonner ses produits. Pour faire face à la vente illégale de l'or, les services de sécurité ont programmé des descentes et des campagnes de sensibilisation destinées à certains bijoutiers exerçant dans l'illégalité afin qu'ils se conforment à la réglementation en vigueur, qui prévoit le versement de la taxe de poinçonnage. « L'or non poinçonné est généralement l'origine de vol ou de trucage. Les bijoux volés sont vendus dans les marchés informels ou aux bijoutiers et artisans qui procèdent à leur fonte pour ensuite les revendre », explique le lieutenant-colonel Kerroud.
