Né au sein du mouvement des Mouhakimas qui s‘était farouchement opposé à la médiation qui a précipité la chute - contestée - du quatrième Khalife de l'Islam, Ali Ibn Abou Talib, et porté par Mouawya Ibn Abou Sofiane (Fondateur de l'empire de la dynastie omeyade) au tire du Khalifa, après la guerre fratricide de Saffayn, en 657, l'Ibadisme, malgré sa nature pacifiste et réconciliatrice et son rôle premier dans l'éclosion dans la jurisprudence islamique, est resté confiné, des siècles durant, dans quelques aires éparses de l'immense terre musulmane (Oman, l'île de Djerba en Tunisie, Djebel Nefousa en Libye, la région du M'zab en Algérie, Zanzibar, Niger...). Peu connu de l'opinion publique, sinon comme un mouvement religieux et social suivi par quelque 2.500.000 adeptes dans la région du M'zab, ce rite ancestral a refait surface et domine actuellement les débats publics, à la faveur des douloureux évènements qui ont, récemment, secoué la capitale du M'zab, Ghardaïa, et ses environs, notamment à Berriane. Nombre de ses représentants et défenseurs étaient alors montés au créneau pour tenter de dissiper certains malentendus qui avaient effleuré les crispations religieuses entre les deux communautés du M'Zab, les Malékites d'un côté et les Ibadites de l'autre, dans l'espoir d'épargner au pays l'étendue des conflits confessionnels qui déchirent plusieurs pays musulmans (Liban, Irak, Egypte, Yémen...). Pourtant, ces deux courants religieux revendiquent davantage de convergences que de points d'achoppement. En témoigne la coexistence qui continue à prévaloir dans cette région en proie au radicalisme wahabite. Parmi ces sages éclairés, l'auteur, Mohammed Messen, polytechnicien, penseur islamique et auteur de plusieurs ouvrages, qui a présenté, jeudi dernier, lors d'une conférence débat, à la bibliothèque du palais de la culture, à Alger, son dernier livre, « L'Islam tolérant et pacifiste », bref aperçu sur l'histoire et les principes de l'Ibadisme, fraichement paru chez les éditions Ibriz. « Nombreux sont les commentateurs qui soulignent la différence minime entre les deux rites co-existants au M'zab, Malekisme et Ibadisme. En effet, ces différences apparaissent minimes » argue-t-il, dans le linéaire de l'ouvrage, en s'interrogeant sur les raisons qui poussent certains extrémistes à traiter les Ibadites de Kharijites en décrétant à coup de fatwas fallacieuses leur assassinat et la confiscation de leurs biens. « Certains prédicateurs extrémistes (salafistes) du Moyen-Orient, qui écument les télévisions et manipulent à souhait les moyens de technologie de l'information, ont carrément appelé à l'extermination des Ibadites en Algérie dans l'espoir de semer la Fitna avec la communauté malékite » accuse le conférencier en précisant que ces appels à la discorde et au meurtre obéissent à des desseins politiques savamment orchestrés par les mains de l'étranger. En fin pédagogue, l'auteur de la Perle ou la Braise a fait de son dernier livre, destiné au grand public, un moyen pour lever les équivoques et démontrer la nature pacifique et conciliante de cette école dont il est issu. Il propose, pour ce faire, une introduction sommaire et didactique représentant et expliquant les spécificités essentielles d'El Ibadia. Il en a, également, profité pour esquisser un aperçu général sur ses principaux fondateurs et savants (Jabir Ibn Zayd, Abdallah Ibn Ibadh, Cheikh Bayoud, Cheikh Bakkeki et bien d'autres), sur ses fondements théologiques, sa vision de la gouvernance... En outre, M. Messen n'a pas manqué, dans son exposé, de souligner et vanter la participation des Ibadites à la Révolution algériennne, notamment à travers le financement.