Chercher un plombier pour réparer une fuite, un carreleur pour refaire un parterre, un électricien pour arranger des fils pendants, un menuisier, un plâtrier. La quête relève souvent de l'impossible. Il faut être très chanceux pour trouver cette perle rare. Dans certains cas, ces travailleurs manuels exigent un tarif exorbitant sans offrir un travail de qualité. Rares ceux qui se chargent de travaux qu'ils terminent dans les délais. Dans beaucoup de cas, ils imposent leurs horaires et leur manière de travailler. Un père de famille dont la tuyauterie de sa salle de bain était à refaire complètement a dû recourir en urgence à son frère. Dans les petites annonces publiées dans les journaux, on peut lire : « Jeune cherche poste de travail comme gardien ou agent de sécurité ». Il est très rare qu'un plombier ou un électricien, encore moins un plâtrier propose ses services. « Ce n'est pas lucratif et pénible », estiment-ils. Dans beaucoup de cas, les plombiers rechignent à se déplacer pour ce qu'ils jugent être de « petites bricoles ». A en croire certains, le déplacement peut se révéler plus cher que le tarif de la réparation. Un menuisier qui s'empresse de prendre en charge de grands travaux ne dépensera pas son énergie dans le rafistolage d'une porte. Pourtant, selon le ministre de la Formation et de l'Enseignement professionnels, il y a un manque flagrant de métiers liés aux bâtiment et travaux publics. Les chantiers de construcrion de logements ont besoin de main-d'œuvre qualifiée. Ce sont les étrangers qui assurent cette tâche. « Nos jeunes dans leur majorité cherchent le gain facile sans trop s'investir professionnellement », dira un père de famille à la recherche d'un peintre. Le sens de l'effort valorisé chez l'ancienne génération se perd. Pourquoi ces métiers sont boudés ? Le ministre de la Formation et de l'Enseignement professionnels, Mohamed Mébarki l'avait reconnu il y a quelques jours sur les ondes de la Radio. « Le secteur de la formation professionnelle n'attire plus, malgré le chômage. Les centres de formation professionnelle, notamment ceux spécialisés dans des métiers manuels, sont loin d'être complets ». « Sur une offre de 20 à 30 postes, seuls 4 à 5 stagiaires s'inscrivent pour une formation de plombier ou dans les métiers du bâtiment », avait-il souligné. Le ministre explique ce manque d'engouement chez les jeunes par plusieurs facteurs, entre autres, la pénibilité. Face à ce problème, il préconise la réhabilitation des lycées techniques à travers notamment l'établissement du baccalauréat professionnel. « Nous avons soumis un certain nombre de propositions au gouvernement. On attend que la question soit tranchée », a-t-il souligné. Peu d'efforts, beaucoup d'argent Les jeunes courent derrière le gain facile. Beaucoup d'entre eux investissent les abords des marchés en proposant les produits de consommation. Cela va de la boîte de concentré de tomate aux bottes de coriandre ou de céleri. Dernièrement, un jeune à Hammamet nous a confié avoir gagné en une semaine, « l'équivalent de trois mensualités d'un cadre moyen ». Il lui a suffi d'acheter une meule puis de proposer l'aiguisage des couteaux pour le sacrifice. Un autre s'est spécialisé dans le découpage de carcasses de mouton à raison de 1.000 dinars la pièce. Ces deux jeunes ne veulent pas entendre parler de métier, comme la plomberie ou la mécanique. Pour eux, ce sont des tâches qui requièrent beaucoup d'efforts. Comment faire intéresser les jeunes à ces métiers ? « Quand les voituriers seront recrutés et percevront un salaire, les revendeurs de l'informel interdits d'exercer sur la voie publique, ce jour-là, les jeunes sauront, peut-être, la valeur d'un métier et de l'argent gagné à la sueur de leur front », affirme, sentencieux, un enseignant.