Inspiration n Le duo réinvente le ‘ûd, le réactualise. Il lui confère un souffle nouveau, l'insérant dans une expression plus actuelle. Une ambiance électrique, rock-métal a régné, jeudi, à la salle Cosmos (Office de Riad-el-Feth), lors d'un concert unique et original et ce, à l'initiative du Centre culturel français. Une ambiance psychédélique aux sonorités vibrantes et tonitruantes ; le son était percutent, violent, agressif. Le jeu musical était tumultueux et assourdissant. Animé par le duo Mehdi (un Algérien installé en France) et Smadj (un Français), le concert se voulait particulièrement original : les deux compères jouaient du ‘ûd – un instrument traditionnel, connu pour ses sons épurés, soignés, doux, tendres et élégants –, mais pas à la manière ancienne, habituelle. L'instrument est détourné, transgressé ; son langage est transfiguré, décomposé, recomposé autrement, selon un imaginaire musical rythmique, intense et ardent, donc fort démonstratif. C'est dans une expression distinctement contemporaine, carrément abstraite que les deux instrumentistes jouent. Cet instrument séculaire sur lequel viennent se greffer des sons modernes proprement rock, qui plongent l'auditeur dans une transe «psychotropique», hallucinatoire, déroutante, déstabilisante… Avec une sensibilité qui se faisait sentir avec autant de force, de véhémence que de profondeur, Mehdi et Smadj réinventent le ‘ûd, le réactualisent ; ils lui confèrent un souffle nouveau, l'insérant dans une expression plus actuelle ; une expression aux vibrations électriques, détonantes ; chaque son se produit comme une déflagration, une explosion soudaine et fulminante. L'ouïe est totalement abasourdie, mais vite emballée par autant de débauche de sons qui, à la première écoute, semble se faire entendre dans des phrasés musicaux chaotiques, désespérants. L'ouïe, au départ interloquée, interdite, confondue, déroutée, est d'emblée conquise, elle prête un intérêt singulier à ce qui se joue, avec cet instrument, qu'est le ‘ûd (même la conception de l'instrument en soi a été modifiée ; ce n'est plus avec le ‘ûd tel qu'il est conçu traditionnellement que le duo joue, mais avec un outil littéralement recréé, avec des formes et des volumes pareil s presque à des sculptures aux allures abstraites). Pour le public, la manière dont l'instrument a été approché dans ce concert (il a été abordé d'une façon individuelle) et pensé (il a été imaginé dans un esprit contemporain), et où le tout s'exprimant dans une attitude purement créative, était une réelle découverte et un périple à travers diverses sonorités, celles inspirées notamment du rock-métal. Mehdi et Smadj, en sortant le ‘ûd de son environnement traditionnel, milieu qui le conditionne, voire le prédestine, ont savamment démontré avec beaucoup d'imagination et de poésie aussi que la magie de la créativité peut s'opérer dans un tel domaine. Il suffit, d'une part, de la motivation, et, d'autre part, de la recherche, c'est-à-dire il faut avoir juste de l'inspiration. Le jeu dans lequel Mehdi et Smadj se sont distingués, était juste, naturel, franc, aisé, euphorique ; une prestation musicale admirable d'autant plus que la présence du duo sur scène était décontractée. C'était un moment inoubliable.