Constat ■ Dans moins de deux mois, le ramadan frappera à nos portes. Et qui dit ramadan, dit une programmation télé concoctée spécialement pour la circonstance. La nouvelle grille de la télévision spéciale ramadan comprend des feuilletons ; il s'agit de productions algériennes. Ces feuilletons sont souvent de piètre qualité, notamment sur le plan de la dramaturgie, à savoir l'écriture scénaristique. A chaque fois, la Télévision promet des améliorations, et à chaque fois et ce, malgré les sévères critiques formulées dans la presse, la télévision continue de produire ou coproduire et diffuser encore et encore des feuilletons médiocres. A les voir, l'on peut d'emblée établir un constat très peu réjouissant sur l'état des lieux de la dramaturgie en Algérie : de l'avis de tous, il y a une réelle crise de l'écriture scénaristique. A ce propos, Djamila Arras, comédienne et auteure-scénariste, regrette cet état de fait. Et de dire : «L'écriture scénaristique n'existe pas. En tant qu'auteurs, nous devons nous débrouiller comme nous le pouvons. En outre, il n'y a pas de formation ni d'école en ce sens. Ceux qui écrivent, en parlant des jeunes, ceux qui désirent faire carrière, ne sont ni encadrés ni suivis. Ils sont livrés à eux-mêmes.» Celle qui dit avoir appris toute seule à écrire, une expérience qu'elle a acquise auprès des professionnels syriens, dit : «Nous, nous pouvons en vouloir ou tenir rigueur à ceux qui écrivent des scénarios et dire d'eux qu'ils sont de mauvais auteurs et que ce qu'ils écrivent est de mauvaise qualité.» Djamila Arras estime que les scénaristes algériens font de leur mieux et donnent le meilleur d'eux-mêmes. «Moi, je leur dis chapeau, parce que déjà à partir de rien ou presque, ils ont fait quelque chose. Donc, quel que soit le résultat, je leur dis bravo, contrairement à ceux qui passent leur temps à critiquer et à ne rien faire.» Djamila Arras estime qu'il ne faut pas juger les scénaristes, mais plutôt chercher à comprendre pourquoi il y a crise et comment on en est arrivé là. «Comment pouvons-nous nous permettre de juger ceux qui font des feuilletons avec très peu de moyen», déclare-t-elle, et de poursuivre : «Quand nous considérons bien la question, lorsque nous cherchons à comprendre ce qu'il y a derrière tout cela, nous nous ne pouvons pas les juger.» A la question de savoir pourquoi cela persiste, que rien n'est fait pour changer la situation, Djamila Arras répond : «On est contre la culture. On ne veut pas que les choses changent. On maintient un état de médiocrité. On se complaît à cultiver la médiocrité. On encourage tout sauf la culture. En plus, on a une culture conjoncturelle. C'est une culture d'improvisation. Tout se fait à la dernière minute. On bricole la culture. C'est la culture du bricolage. Ceux qui gèrent la culture sont des bureaucrates, ils n'ont rien à voir avec l'art et la culture.» Pour elle, il faut une vraie décision politique pour remédier à cela, et que cette politique reconnaisse l'art et la culture comme vecteur de renouveau, comme moyen de développement social et d'émancipation de l'esprit. Et que la culture n'est pas occasionnelle, qu'elle est constante, à chaque fois renouvelée, réinventée. La politique doit agir de manière à comprendre l'artiste et répondre à ses besoins et attentes.» Djamila Arras est comédienne et auteure-scénariste. A la question de savoir si elle n'envisage pas d'écrire des livres, cette dernière dit : «J'y pense depuis toujours, mais jusque-là je ne suis pas encore passé à l'acte. J'ai des écrits mais que j'ai mis de côté.» Interrogée si, un jour, elle pense adapter ses scénarios en livre, Djamila Arras répond : «J'ai pensé effectivement à adapter mes œuvres télévisées en écrits, mais un seul me tient à cœur, c'est celui de Aïssa El-Djermouni. C'est un poète de la terre, de la patrie et de la femme. On lui a fait beaucoup de torts. Les gens ont tendance à déformer ses dires et sa poésie. Là, c'est vrai, j'ai l'intention de publier quelque chose. Je donnerai sa poésie intégrale.»