Résumé de la 4e partie n la dernière phrase du message produit une curieuse impression sur le policier qui convoque le barman dans son bureau… Les empreintes sont envoyées à la police italienne et l'incroyable réponse arrive deux jours après : «Il s'agit bien de Mario Sebastiani, disparu en octobre 1954 et présumé assassiné». Une demande d'extradition est jointe au message. Arrêté par la police américaine, Mario Sebastiani, qui exerçait depuis sept ans, à New York, la profession de barman, est ramené en Italie. A Santa Rosanna, c'est la sensation. Gina, sa femme, se précipite à la prison de Messine où Mario est détenu. Tout de suite, elle le reconnaît. Elle se jette dans ses bras, partagée entre la joie et les larmes. «Mais qu'est-ce qui s'est passé, Mario ? Pourquoi es-tu parti, pourquoi ne m'as-tu pas donné de nouvelles ?» A toutes ses questions, Mario Sebastiani ne répond pas. Il reste fermé, silencieux. Et c'est la même attitude qu'il adopte devant les enquêteurs et le juge d'instruction. Celui-ci s'acharne. Il utilise la persuasion, l'intimidation, il fait appel à ses sentiments. «Enfin, votre frère est en prison depuis sept ans pour vous avoir assassiné.» Pas de réponse. «Si vous ne répondez pas, vous laissez supposer que vous avez monté toute cette machination pour le faire condamner.» Pas de réponse. «Qu'avez-vous fait le 7 octobre 1954 ? Où êtes-vous allé après avoir abandonné votre béret sur le chemin, votre pantalon et votre chemise ensanglantés dans la chambre de votre frère ?» Pas de réponse. Mario Sebastiani reste buté, les yeux rivés au plancher. Selon la tradition sicilienne, il ne parlera pas. Sur son extraordinaire conduite, ni les policiers, ni les juges, ni sa femme n'auront droit à un mot d'explication. Cela ne l'empêche pas d'être inculpé tandis que, le même jour, son frère Luigi est libéré du bagne. Toute la presse sicilienne et même italienne se bouscule à l'ouverture du procès de Mario Sebastiani. On veut voir l'homme qui, pour perdre son frère, a tout quitté sa femme, son pays, son métier de paysan. Rarement, sans doute, un Sicilien n'a été aussi loin dans la vengeance. Mais Mario reste jusqu'au bout impénétrable. Après avoir satisfait à l'interrogatoire d'identité, il se tait et refuse de répondre aux questions. Mario Sebastiani a été condamné à dix ans de prison. Mais ce n'est pas cette condamnation qu'ont retenue les journalistes et le public. C'est la déposition de son frère Luigi. Tout ceux qui l'avaient vu, sept ans auparavant, ont eu du mal à le reconnaître. Lui, le solide gaillard, était maintenant presque chétif. Et surtout, il y avait dans sa voix quelque chose de brisé. Il a terminé sa déposition par une déclaration que tous les journaux ont reproduite. «Monsieur le Président, j'ai été sept ans au bagne. J'ai parlé avec beaucoup de condamnés. Et je peux vous dire que je ne suis pas le seul innocent. Il y en a d'autres.» II s'est alors produit un brouhaha dans la salle. Le président s'est vivement ému. «Eh bien, dites-nous leurs noms. La justice veut les connaître.» Mais Luigi Sebastiani s'est contenté de répondre, avec un sourire résigné : «A quoi bon, monsieur le Président ? Ils n'ont pas plus de preuve de leur innocence que je n'en avais.»